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Chers lecteurs, merci de consulter notre blog. La Republique Democratique du Congo vient sortir d'une guerre de plus de 10 ans qui a fauché la vie à plus de cinq million des personnes; L'Ituri est l'un de ces coins du Congo qui a été le plus devasté par cette guerre; elle a perdu près d'un million des ses fils et filles et son image en est sortie terriblement ternie...Ce blog pose et tente de répondre à quelques questions sur cette tragedie: quelles sont les causes reelles des ces tueries, qui en sont les auteurs, que doit-ont faire pour eviter la répétition de cette tragedie? Nous vous proposons ici des articles des journaux,études fouillées et réflexions des éminents scientifiques sur le drame Iturien.

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mercredi 14 mai 2008

ITURI: QUATRE PRIORITÉS POUR UNE PAIX DURABLE EN ITURI

ITURI: QUATRE PRIORITÉS POUR UNE PAIX DURABLE EN ITURI

Rapport Afrique N°140 – 13 mai 2008

TABLE DES MATIÈRES

SYNTHÈSE ET RECOMMANDATIONS.............................................................................i
I.INTRODUCTION .......................................................................................................... 1
II. FINALISER LE DESARMEMENT ET RESTAURER L’AUTORITE DE
L’ETAT........................................................................................................................... 2
A. LE SUCCES LIMITE DE LA TROISIEME PHASE DU DDR ............................................................2
1. Disparition du MRC, dislocation du FNI et résistance des FRPI ..............................3
2. Agendas économiques locaux....................................................................................4
3. L’illusion d’une solution militaire .............................................................................5
B. COMMUNAUTES LOCALES ET CAPACITES ADMINISTRATIVES CIVILES.....................................6
1. Investir dans la sensibilisation et la réinsertion .........................................................6
2. Restaurer les capacités administratives et policières locales .....................................7
III. PREVENIR DE NOUVEAUX CONFLITS FONCIERS............................................ 9
A. IMBROGLIO JURIDIQUE ..........................................................................................................9
B. REINSTALLATION PROBLEMATIQUE DES REFUGIES ET DEPLACES .........................................10
C. RENFORCER LA PREVENTION ET REVISER LA LOI FONCIERE .................................................12
IV. L’EXPLOITATION DES RESSOURCES NATURELLES ET MINIERES......... 13
A. LES DOUANES, LE BOIS ET L’OR...........................................................................................13
1. Trafics aux frontières et exploitation sauvage des forêts.........................................13
2. Exploitation aurifère anarchique..............................................................................14
B. NOUVELLES TENSIONS ENTRE KAMPALA ET KINSHASA POUR LE PETROLE DU LAC ALBERT.17
V. JUGER ET RECONCILIER....................................................................................... 21
A. LUTTER CONTRE L’IMPUNITE DE MANIERE CREDIBLE ET EFFICACE ......................................21
B. RECONCILIER LES ITURIENS ................................................................................................23
VI. CONCLUSION ............................................................................................................. 25
1. L’introuvable stratégie politique intégrée................................................................30
2. Le désarmement forcé..............................................................................................32
ANNEXES
A. CARTE DE L’ITURI...............................................................................................................26
B. CARTE DE LA REBUPLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO ......................................................27
C. LES PRINCIPAUX GROUPES ARMES DE L’ITURI .....................................................................28
D. SUCCES ET LIMITES DU DESARMEMENT PENDANT LA TRANSITION
1. L’INTROUVABLE STRATEGIE POLITIQUE INTEGREE ....................................................30
2. LE DESARMEMENT FORCE .........................................................................................32
3. LE DESARMEMENT PAR LA COOPTATION....................................................................35
E. LISTE DES ACRONYMES .......................................................................................................37
F. À PROPOS DE L’INTERNATIONAL CRISIS GROUP..................................................................39
G. RAPPORTS ET BRIEFINGS DE CRISIS GROUP SUR L’AFRIQUE ................................................40
H. LE CONSEIL D’ADMINISTRATION DE CRISIS GROUP.............................................................42
Rapport Afrique N°140 13 mai 2008
CONGO : QUATRE PRIORITES POUR UNE PAIX DURABLE EN ITURI
SYNTHÈSE ET RECOMMANDATIONS
Le risque d’une reprise des violences en Ituri est
aujourd’hui limité du fait de la présence de la Mission
des Nations unies (MONUC), du démantèlement de la
plupart des groupes armés et de la lassitude de la population
après des années de souffrance et de destructions.
Cependant, les problèmes de fond à l’origine des
violences extrêmes qu’a connu le district pendant la
guerre – un accès équitable à la terre et une gestion
transparente des revenus issus de l’exploitation des
ressources naturelles et minières – restent entiers.
L’absence de réconciliation intercommunautaire et
l’impunité pour la grande majorité des crimes commis
pendant la guerre sont également extrêmement inquiétants
en perspective d’élections locales en 2009. Afin
d’éviter toute reprise de la violence, dont les femmes
seraient les premières à souffrir, les éléments fondamentaux
d’une paix durable doivent être urgemment
mis en place dans le cadre d’une stratégie intégrée
impliquant les institutions nationales et provinciales
avec le soutien actif de la MONUC et des bailleurs de
fonds du Congo.
En premier lieu, obtenir le désarmement des derniers
groupes armés encore actifs en Ituri et récupérer
l’armement disséminé en grand nombre au sein des
différentes communautés ne pourront réussir par la
force ou la simple cooptation de leurs leaders au sein
des institutions nationales. Le désarmement du district
doit passer par l’instauration d’un minimum de confiance
entre les communautés locales et l’administration. Des
actions soutenues de sensibilisation et un investissement
continu dans la reconstruction des capacités
administratives civiles locales sont nécessaires également
dans la perspective du passage du district au statut
de province à l’horizon 2009. Le retrait des Forces
armées de la République démocratique du Congo
(FARDC), toujours coupables de nombreuses violations
de droits humains, des zones pacifiées et leur
remplacement par la police nationale sont également
des éléments clés du rétablissement de cette confiance.
Au-delà du désarmement et de la restauration de l’autorité
de l’État, et face au risque de voir les futures élections
locales servir de détonateurs à de nouveaux troubles,
trois défis majeurs se posent et doivent être traités de
façon simultanée. En premier lieu, il y a la question des
conflits fonciers, qui sont à l’origine de l’explosion de
violence. Ces conflits ne sont toujours pas réglés et
menacent constamment de déboucher sur de nouveaux
affrontements interethniques. Avec le retour chez eux
des réfugiés et des déplacés et la reprise attendue de
l’activité économique, la résurgence des conflits
fonciers est quasi-inévitable. Des actions de prévention
et une clarification de l’imbroglio juridique lié à la loi
foncière et au statut des chefferies sont indispensables.
Un autre facteur de risque est l’absence de transparence
et de justice dans la gestion des ressources naturelles et
minières. Alors que le népotisme imprègne encore très
fortement les pratiques politiques locales, le partage
inégal et peu transparent des revenus tirés de l’exploitation
de l’or, des douanes, ou plus encore du pétrole du
lac Albert, risque de déboucher sur de nouvelles tensions.
La mise en place d’un cadre de gestion transparent des
ressources du district, le démantèlement des réseaux
mafieux de détournement des ressources minières et
forestières et la gestion prudente des attentes suscitées
par la découverte du pétrole au niveau du lac Albert
s’avèrent capitales.
Enfin, la réconciliation intercommunautaire reste superficielle
et la justice locale est toujours incapable de
lutter de manière satisfaisante contre l’impunité. Alors,
la poursuite des enquêtes de la Cour pénale internationale
(CPI) et la mise en place de chambres mixtes
(nationales/internationales) et d’une Commission vérité
et réconciliation apparaissent plus que jamais nécessaires
si l’on souhaite que l’Ituri parvienne réellement à
tourner la page de la guerre qui l’a dévasté pendant près
de dix ans.
La communauté internationale s’est investie lourdement
pour le désarmement des milices et a largement
mené le processus politique et militaire qui a permis
leur reddition progressive tout au long de la transition.
Aujourd’hui, c’est le succès de la reconstruction du
Congo qui se joue en Ituri. Si une approche volontariste
et intégrée réunissant institutions nationales, régionales
et partenaires internationaux n’est pas adoptée pour
consolider la paix dans ce district trop souvent ignoré
Congo: quatre priorités pour une paix durable en Ituri
Rapport Afrique de Crisis Group N°140, 13 mai 2008 Page ii
par Kinshasa, le retour du chaos signifierait à lui seul
l’échec d’un processus de paix qui n’a que trop profité
aux chefs de guerre et n’a pas encore véritablement
bénéficié aux victimes du conflit.
RECOMMANDATIONS
Terminer le désarmement et restaurer l’autorité
de l’État
Au Gouvernement congolais :
1. Concentrer le déploiement des FARDC sur les poches
de résistances des miliciens du Front des nationalistes
intégrationnistes (FNI) et des Forces de résistance
patriotique en Ituri (FRPI) et les remplacer systématiquement
dans le reste du district par des forces
de police comprenant des ressortissants de l’Ituri.
2. Ordonner à l’auditorat militaire d’ouvrir des enquêtes
sur les complicités des officiers FARDC dans
l’exploitation illégale des ressources naturelles et
minières en Ituri.
3. Ouvrir une enquête disciplinaire sur la gestion de la
Province Orientale par le gouverneur Médard Autsai.
À la MONUC :
4. Augmenter le soutien tactique et opérationnel aux
FARDC afin de faciliter l’encerclement des positions
des miliciens FRPI, limiter leurs capacités de
mouvement et restreindre leur accès aux soutiens
extérieurs.
5. Mettre en place une task force civile et militaire
vouée à l’application d’une stratégie intégrée combinant
sensibilisation et pressions pour finaliser le
désarmement des milices FNI et FRPI avec l’appui
des chefs des communautés locales.
Au Programme des Nations unies pour le
développement (PNUD) et aux bailleurs de
fonds du Congo :
6. Renforcer des programmes de sensibilisation en faveur
du désarmement communautaire accompagnés de
programmes de réinsertion pour ex-combattants dans
l’agriculture, la pêche, l’élevage et la réhabilitation
des dessertes agricoles et lancer un plan de reconversion
spécifique pour les mineurs artisanaux, devant
quitter les concessions minières, et qui comptent
parmi eux de nombreux ex-combattants.
7. Relancer des programmes de renforcement des capacités
administratives du district en prévision de sa
transformation en province à l’horizon 2009 et
doter le district des moyens humains de gérer les
programmes de réinsertion et de reconstruction.
Prévenir les conflits fonciers
Au Gouvernement congolais :
8. Lancer un processus de consultation visant à la présentation
au Parlement d’un texte révisant la loi
foncière et clarifiant le statut des chefs coutumiers
avant la fin de l’année 2008.
9. Lancer en collaboration avec l’Assemblée provinciale
de la Province Orientale une mission d’étude
visant à proposer un nouveau découpage administratif
de l’Ituri.
Au Haut Commissariat des Nations unies pour
les réfugiés (UNHCR) :
10. Mettre en place des projets pilotes de réinstallation
des réfugiés et déplacés fondés sur le dialogue et la
sensibilisation des communautés locales.
Aux bailleurs de fonds du Congo :
11. Assurer le financement régulier de la Commission
foncière de l’Ituri regroupant les partenaires nationaux
et internationaux impliqués dans les opérations
de sensibilisation locale pour la prévention des
conflits fonciers dans le district.
Améliorer la gestion des ressources douanières,
forestières, minières et pétrolières
Au Gouvernement congolais :
12. Ouvrir une enquête judiciaire sur l’exploitation
illégale des ressources forestières en vue de démanteler
les réseaux mafieux transfrontaliers impliqués
dans l’exploitation illégale du bois.
13. Contrôler l’application stricte du code minier, donner
suite aux recommandations de la commission de
revisitation des contrats miniers concernant l’Office
des mines d’or de Kilomoto (OKIMO), instaurer un
moratoire sur l’attribution des concessions
minières et forestières jusqu’à la mise en place
d’un cadre de contrôle efficace du secteur, et
augmenter les contrôles sur les entrepôts et aéronefs
utilisés pour l’exploitation aurifère afin de
limiter les risques d’exportations illégales.
14. Publier les contrats liant l’État congolais aux sociétés
minières et pétrolières, et assurer la transparence
de la gestion des paiements effectués auprès
des agences de l’État par celles-ci.
15. Mettre en place un mécanisme de certification et de
traçabilité des minerais et autres ressources naturelles
issues de l’Ituri.
Congo: quatre priorités pour une paix durable en Ituri
Rapport Afrique de Crisis Group N°140, 13 mai 2008 Page iii
Promouvoir la réconciliation intercommunautaire
et la lutte contre l'impunité
Au Gouvernement congolais :
16. Présenter un projet de loi organique au Parlement
conformément à la Constitution de 2006 pour la
mise en place d’une Commission vérité et réconciliation
comportant un chapitre spécifique pour l’Ituri.
17. Présenter un projet de loi pour la mise en oeuvre du
Statut de Rome donnant aux tribunaux civils compétence
pour juger des crimes de guerre et des
crimes contre l'humanité et permettant la création
de chambres mixtes (nationales/internationales) au
sein du système judiciaire congolais.
18. Proposer la création au sein de l’appareil judiciaire
congolais de chambres mixtes (nationales/internationales)
compétentes pour poursuivre les auteurs des
crimes de guerre et des crimes contre l’humanité
commis en Ituri ; et engager des consultations avec
les acteurs nationaux et les partenaires internationaux
intéressés afin d’étudier les modalités de fonctionnement
de ces chambres et permettre leur mise
en place dans les meilleurs délais.
À la Cour pénale internationale :
19. Réaffirmer publiquement que le bureau du Procureur
va continuer les enquêtes concernant les crimes
atroces commis en Ituri ; veiller à ce que ses investigations
concernent notamment les principaux chefs
de milices de l’Ituri toujours en liberté (Jérôme
Kakwavu, Peter Karim, Cobra Matata, Floribert
Kisembo Bahemuka), les responsables du massacre
de Nyakunde, ainsi que les dirigeants congolais,
rwandais et ougandais qui ont armé et soutenu les
milices actives en Ituri ; et poursuivre ceux dont la
responsabilité dans ces crimes pourra être établie.
Nairobi/Bruxelles, 13 mai 2008
Rapport Afrique N°140 13 mai 2008
CONGO : QUATRE PRIORITES POUR UNE PAIX DURABLE EN ITURI
I. INTRODUCTION
En juin 2003, à la veille de la mise en place du gouvernement
de transition, l’Ituri1 se trouvait dans une
situation pré-génocidaire. Sous l’effet de la disparition
de l’État, de la crise économique, des manipulations
des tensions intercommunautaires par les forces
d’occupation ougandaises et de la rivalité croissante
entre Kampala, Kinshasa et Kigali pour le contrôle de
la région, les violences suscitées par les conflits
fonciers et les clivages de plus en plus marqués entre
communautés ont dégénéré en guerre interethnique
ouverte entre populations Lendu et Hema. En quatre
ans, le conflit a fait plus de 50 000 morts et a forcé
plus de 500 000 personnes à quitter leur résidence.2
Au sein des deux communautés Lendu et Hema,
elles-mêmes divisées en plusieurs sous-groupes, des
groupes miliciens plus structurés se sont constitués,
chacun affirmant se battre pour la survie de « sa »
population. En 2003, l’Ituri ne comptait ainsi pas
moins de six groupes armés3 et un nombre total de
miliciens estimé entre 20 000 et 25 000.4
1 District de la Province Orientale frontalier de l’Ouganda et
du Soudan, l’Ituri dont le chef lieu se trouve à Bunia,
s’étend sur une superficie de 65 658 km² et compte près de 4
millions d’habitants pour une densité de population d’environ
30 habitants au km². L’Ituri est divisée en cinq territoires
– Aru, Mahagi, Djugu, Irumu, Mambasa – 45 collectivités
et cinq cités.
2 Ces chiffres sont avancés par la plupart des organisations
présentes sur le terrain à l’époque, voir notamment « Ituri :
couvert de sang, violences ciblées sur certaines ethnies dans
le nord est de la RDC », Human Rights Watch, juillet 2003.
3 L’Union des patriotes congolais (UPC), le Front des nationalistes
intégrationnistes (FNI), les Forces de résistance
patriotique en Ituri (FRPI), les Forces armées du peuple
congolais (FAPC), le Parti pour l’unité et la sauvegarde de
l'intégrité du Congo (PUSIC) et les Forces populaires pour
la démocratie au Congo (FPDC). Voir annexe C.
4 Pour un point plus complet sur la situation en Ituri avant
2003, voir le Rapport Afrique de Crisis Group N°64, Congo
Crisis: Military Intervention in Ituri, 13 juin 2003 ; et le
Rapport spécial sur les évènements d’Ituri (janvier 2002-
décembre 2003), lettre datée du 16 juillet 2004 adressée au
président du Conseil de sécurité par le Secrétaire-général,
S/2004/573, disponible sur http://daccessdds.un.org/doc/
Depuis lors, des progrès significatifs ont été accomplis.
Ces progrès sont en grande partie dus à la très forte
mobilisation de la communauté internationale en faveur
du desarmement des groupes armés locaux. Suite aux
opérations militaires et de sensibilisation menées par la
MONUC et aux enquêtes ouvertes par la Cour pénale
internationale (CPI), la marge de manoeuvre laissée à ces
groupes s’est progressivement réduite et un processus de
désarmement a pu être engagé. Couplé au dialogue initié
sur le tard par les autorités congolaises avec les derniers
chefs miliciens et au rapprochement entre Kinshasa et
Kampala, ces efforts ont abouti à une diminution significative
du niveau de violence et du nombre de combattants
évoluant dans les différentes milices de l’Ituri.
Les groupes armés de l’Ituri n’ayant pas signé l’accord de
Sun City,5 le retour de la paix dans le district s’est fait
selon un processus différent de celui poursuivi dans le
reste du pays. Si quelques tentatives ont eu lieu pour
initier un dialogue avec les groupes armés et les communautés
de base, il n’y a jamais eu sur la durée de véritable
stratégie politique globale pour ramener la paix dans cette
région périphérique de la RDC. On a plutôt assisté à une
juxtaposition d’initiatives qui ont progressivement permis
de ramener le calme sans toutefois régler en profondeur le
problème d’insécurité dans le district ou les causes profondes
du conflit. Près de cinq ans après le début du désarmement,
des groupes miliciens restent encore actifs sur
certains points du district et ni les FARDC ni la MONUC,
dont une partie des effectifs a été redéployée dans la province
du Nord Kivu, ne semblent aujourd’hui en mesure
de les forcer à déposer les armes. Quant au désarmement
des communautés, il n’a pas encore été sérieusement engagé.
À l’approche des élections locales, du retrait de la MONUC,
et en perspective de la transformation du district en province
à l’horizon 2009, il est cependant indispensable de
UNDOC/GEN/N04/ 430/64/IMG/N0443064.pdf?OpenElement.
5 En application de l’accord de Sun City du mars 2003, le gouvernement
de transition qui entre en fonction le 30 juin 2003
réunissait les trois principaux belligérants – le gouvernement du
président Kabila, le Mouvement pour la libération du Congo
(MLC) de Jean Pierre Bemba et le Rassemblement congolais
pour la démocratie d’Azarias Ruberwa – ainsi que plusieurs
groupes armés affiliés au gouvernement (RCD-KML, groupes
Mayi Mayi) et des représentants de la société civile et de l’opposition
politique non armée.
Congo: quatre priorités pour une paix durable en Ituri
Rapport Afrique de Crisis Group N°140, 13 mai 2008 Page 2
consolider ces acquis par l’application d’une stratégie
intégrée. La stabilité de l’Ituri reste fragile. Les problèmes
sous-jacents à l’escalade des violences n’ont
toujours pas été réglés, et le désarmement ne pourra
être conclu avec succès sans y associer un traitement
des conflits fonciers, une amélioration de la gestion
des ressources naturelles et minières et un soutien
résolu à la lutte contre l'impunité. Au moment où le
Congo se débat toujours pour tenter d’établir un
nouveau système de gouvernance destiné à bénéficier
plus à ses populations plus qu’à ses politiciens, ce
rapport présente une analyse des quatre priorités qui
doivent être traitées par les acteurs nationaux et internationaux
pour instaurer une paix durable dans le
district et mettre un terme définitif aux tueries qui
l’ont ensanglanté depuis presque dix ans.
II. FINALISER LE DESARMEMENT ET
RESTAURER L’AUTORITE DE L’ETAT
Le processus de paix en Ituri s’est déroulé en quatre grandes
étapes. Après une première phase purement militaire
visant à retirer le contrôle de Bunia à l’UPC, la MONUC,
le Comité international d’appui à la transition (CIAT) et
les autorités de transition ont lancé une initiative globale
en faveur de la restauration de l’État de droit dans le
district. Cette approche a connu quelques succès mais s’est
rapidement heurtée à la difficulté de faire avancer au
même rythme les différents acteurs du processus et à trouver
le bon équilibre entre dialogue, cooptation, incitation
et action coercitive.
Après la mort, le 25 février 2005, de neuf casques bleus
bangladeshi à Ndoki, l’option militaire avait été privilégiée.
Celle-ci a donné une impulsion au programme de
désarmement mais n’a pas permis de mettre un terme au
phénomène des milices. Un an plus tard, suite à la prise
en otage, en mai 2006, de sept casques bleus par le FNI
de Udaga Peter Karim, la MONUC et les autorités congolaises
ont dû réviser leur stratégie. Sans renoncer à la
pression militaire, ils tentèrent d’ouvrir à nouveau le dialogue
avec les groupes armés. Dans un contexte pré-électoral
marqué par l’obsession de récupérer les votes de la
population pour les scrutins législatifs et présidentiels de
2006, ce dialogue s’est vite transformé en une opération
de cooptation.
A. LE SUCCES LIMITE DE LA TROISIEME
PHASE DU DDR
Au final, après plus de quatre ans d’initiatives répétées,
les principales milices Hema de l’Ituri ont été désarmées
et seules deux branches du FNI (Lendu) ainsi que l’essentiel
des FRPI (Ngiti) restent toujours réfractaires au processus.
Début 2008, des affrontements ont éclaté entre le
FNI, les FRPI et les FARDC, provoquant de nouvelles
vagues de déplacés. Même si, après la reddition de nombreux
combattants FNI, il ne reste probablement pas plus
de 1 500 combattants encore actifs sur le terrain en Ituri,
les chances de les voir se rendre rapidement apparaissent
limitées, en l’absence d’une stratégie combinant de façon
étroite dialogue et pression militaire. Par ailleurs, le lancement
d’une nouvelle étape de désarmement, démobilisation
et réintégration (DDR) centrée sur le désarmement
des communautés s’avère également inévitable. Pour
réussir, cette nouvelle phase du DDR doit s’intégrer dans
une action visant à rétablir l’autorité de l’État dans un
contexte sécuritaire qui s’est à nouveau dégradé depuis
six mois.
Congo: quatre priorités pour une paix durable en Ituri
Rapport Afrique de Crisis Group N°140, 13 mai 2008 Page 3
1. Disparition du MRC, dislocation du FNI
et résistance des FRPI
Le 9 avril 2007, après la signature des accords de désarmement
de décembre 20066 et quelques aléas supplémentaires,
le leader du FNI Peter Karim sort enfin de
la brousse avec un petit groupe de combattants. Il
espère par sa présence à Bunia s’imposer comme un
interlocuteur de premier plan pour la sensibilisation
et le désarmement de l’ensemble des branches du FNI,
qui reste très fragmenté, et sécuriser ses intérêts
personnels.7 Il compte aussi obtenir par ce biais une
renégociation des modalités d’intégration du FNI au
sein des FARDC en s’inspirant notamment des opérations
de mixage menées au Nord Kivu entre les
FARDC et le Congrès national pour la défense du
peuple (CNDP) de Laurent Nkunda.8 L’idéal pour lui
serait, comme le demandent en fait l’ensemble des
miliciens de l’Ituri, d’obtenir la création d’une nouvelle
région militaire en Ituri dirigée par des officiers
autochtones.9
À travers cette revendication, on perçoit la volonté de
rester dans une région où l’on a ses attaches et ses
intérêts, le souhait de pouvoir continuer à apparaître
comme le protecteur de sa communauté face aux
exactions des FARDC ou de la police, mais aussi la
peur d’avoir à se rendre à Kinshasa et d’être finalement
arrêté là-bas, comme d’autres chefs de milices
avant lui.10
Mathieu Ngudjolo, leader du Mouvement révolutionnaire
congolais (MRC), décide également de mettre
un terme à la lutte armée, ne pouvant espérer obtenir
davantage que ce qu’il avait déjà négocié. Chercher à
relancer le MRC en se rapprochant à nouveau de
Laurent Nkunda n’apparaît pas être une option
réaliste, même pour les combattants Hema qui se
sentent proches du CNDP.11 Les discussions sur les
6 Cf. Annexe D pour tous les détails.
7 Peter Karim (alias Peter Udaga) possède plusieurs
exploitations forestières, entretien de Crisis Group, excombattants
de l’Ituri, Bunia, décembre 2007.
8 Voir sur ce point le Rapport Afrique de Crisis Group
N°133, Congo:Ramener la paix au Nord Kivu, 31 octobre
2007.
9 Voir les revendications contenues dans le cahier des
charges du Mouvement révolutionnaire congolais (MRC),
note de bas de p. 170.
10 Entretiens de Crisis Group, ex-combattants de l’Ituri,
Bunia, novembre 2007.
11 Plusieurs combattants du MRC, d’origine Hema, sont
partis entre 2005 et 2006 dans le Masisi pour rejoindre leur
ancien compagnon d’arme et actuel chef d’état-major du
CNDP, Bosco Ntaganda. La plupart – y compris Innocent
Kayna « India Queen », un ancien commandant de l’UPC
modalités d’intégration des groupes armés au sein des
FARDC tournent court cependant. Sur instruction directe
de la présidence à Kinshasa, le commandant de la zone
d’opérations de l’Ituri, le général Vainqueur Mayala,
rejette catégoriquement la demande de création d’une
nouvelle région militaire. Afin d’éviter un nouvel enlisement,
Mayala décide de faire partir de l’Ituri un maximum
de miliciens pour le brassage et de renforcer les
campagnes de sensibilisation.12 Cette stratégie se révèle
efficace. En mai 2007, le mouvement de désarmement
des FNI s’accélère avec plus de 1 000 miliciens et 1 500
enfants associés désarmés.
Le 5 juillet, en présence du vice ministre de la Défense,
Yvonne Iyamulenge Kabano, et du Représentant spécial
du Secrétaire général (RSSG) adjoint, Ross Mountain, la
3ème phase du DDR est officiellement lancée pour une
période de 60 jours. Sur la base des listes soumises par les
chefs de milices, le PNUD se fixe comme objectif de désarmer
4 665 combattants. Il retient également comme
hypothèse que 70 pour cent des ex-combattants opteront
pour un retour dans la vie civile et 30 pour cent choisiront
l’intégration dans les FARDC. Peter Karim et Mathieu
Ngudjolo, qui assistent à la cérémonie du lancement de la
3ème phase du DDR, renouvellent leur adhésion au processus
tout en réclamant le respect des engagements pris par
le gouvernement en matière d’amnistie,13 de libération des
prisonniers et de reconnaissance des grades. Pour les FRPI,
la situation est plus complexe. Cobra Matata dénonce le fait
que le ministère de la Défense ne prévoit de reconnaître
qu’un seul poste de colonel au bénéfice des FRPI, alors
qu’il en promet treize au FNI et sept au MRC.
Les opérations de désarmement débutent ainsi le 5 août sans
les FRPI. Le MRC désarme en masse et la grande majorité
des combattants se révèle être éligible au processus. Derrière
ces bons chiffres se cache toutefois une réalité plus
qui a depuis été finit arrêté et transféré à Kinshasa – sont
finalement rentrés en Ituri. En effet, selon leur propre
témoignage, la plupart des réunions du CNDP se tenaient en
Kinyarwanda et la question de l’Ituri n’était jamais sérieusement
prise en compte. Ils se sont vite rendus compte que le combat du
CNDP n’était pas vraiment le leur. Entretien de Crisis Group, excombattants
de l’Ituri, Bunia, novembre 2007.
12 Le 25 avril, deux officiers FRPI et un officier du MRC sont
envoyés à Kinshasa pour suivre une formation. Entre la fin avril
et le début du mois de mai, 741 ex-combattants (464 FNI, 146
MRC et 131 FRPI) sont envoyés au centre de brassage de
Lukusa à Kisangani. À l’annonce de ce transfert, une centaine
d’éléments préfèrent toutefois s’enfuir du camp plutôt que
d’avoir à quitter le district de l’Ituri, ibid.
13 Fin 2006, Peter Karim, Mathieu Ngudjolo et Cobra Matata
avaient reçu, via le procureur militaire, une lettre du ministre de
la Défense de l’époque leur garantissant qu’aucune poursuite
judiciaire ne serait lancée contre eux, entretien de Crisis Group,
ex-combattants de l’Ituri, Bunia, décembre 2007.
Congo: quatre priorités pour une paix durable en Ituri
Rapport Afrique de Crisis Group N°140, 13 mai 2008 Page 4
complexe : sur la liste des 568 combattants fournie au
PNUD par Ngudjolo, figurent 140 fausses ex-combattantes
recrutées par Ngudjolo dans les villages autour
de Kambutso afin de gonfler artificiellement ses
effectifs.14
La situation est assez différente du côté du FNI en
raison de la fragmentation du mouvement. Les miliciens
FNI de Peter Karim se présentent nombreux sur
les sites mais, s’ils figurent bien sur la liste des 602
combattants établie par Peter Karim, ils n’ont souvent
pas d’armes à remettre.15 Une branche dissidente apparaît
dans la région de Lalo et Dhera, au nord ouest du
territoire de Djugu, chez les Lendu Pitsi. Entre août
et novembre 2007, elle attaque à plusieurs reprises les
FARDC et leur ravit des stocks d’armes et de munitions.
Ces affrontements provoquent le déplacement
de plus de 5 000 civils. Dans la région de Loga, au
sud du territoire de Djugu, chez les Lendu Djatsi, la
branche FNI locale dirigée par Floribert Burombi et
forte d’environ 300 combattants refuse également
d’adhérer au processus. 16
Du côté des FRPI, la résistance au DDR est encore
plus grande. Fin août 2007, à peine 10 pour cent des
3 495 combattants figurant sur la liste fournie par
Cobra Matata ont été désarmés. Face à cette situation,
les Nations unies et le ministère de la Défense décident
de prolonger d’un mois l’opération et de revoir à
la baisse la liste des combattants artificiellement
gonflée.17 Le 6 octobre, cédant à leur pression, le
ministre de la Défense accorde aux FRPI deux postes
de colonel au sein des FARDC, en plus de celui déjà
attribué à Cobra Matata.18 Ni cette concession tardive
14 La grande majorité de ces jeunes femmes s’est présentée
avec des talkies-walkies et des appareils de communication
UHF/VHF. À leur sortie du site de démobilisation, elles ont
reversé à Ngudjolo plus de la moitié des sommes données
par le PNUD. Entretien de Crisis Group, officiers MRC,
Kinshasa, février 2008 et Bunia, mars 2008.
15 Le PNUD a confirmé avoir mis en place des mesures de
contrôle très strictes destinées à démasquer les faux miliciens.
Les abus observés lors du précédent programme
piloté par la Commission nationale de démobilisation et de
réinsertion (CONADER) ne semblent ainsi pas avoir atteint
la même échelle.
16 Cette branche FNI est présente notamment à Loga, Jili,
Anu, Klutsoko et Masumbuko. Plusieurs observateurs affirment
que Burombi s’est présenté sur un site de désarmement
début 2007.
17 La date limite fixée à l’origine pour terminer la phase III
du DDR était le 13 septembre 2007. Après révision, la liste
des miliciens FRPI à désarmer a été ramenée de 3 495 à
2 000 combattants.
18 Le FRPI obtient deux postes de colonels supplémentaires
au profit du président du FRPI Muhito Akobi et Oudo
ni les menaces d’une reprise des opérations militaires
brandies par le nouveau commandant FARDC en Ituri, le
Général Kinkela, ne suffisent cependant à faire sortir de
la brousse la majorité des troupes du groupe armé Ngiti.
À la fermeture des sites de transit, le bilan est ainsi très
contrasté. En trois mois, 1 858 combattants ont pu être
désarmés et 1 611 armes récupérées, principalement dans
le territoire de Irumu (1 053 miliciens) et Djugu (596
miliciens). Contrairement aux estimations initiales, 95
pour cent des anciens combattants ont finalement opté pour
le retour à la vie civile. Le MRC a désarmé 100 pour cent
de ses combattants déclarés et le FNI 50 pour cent. Du
côté des FRPI, le pourcentage de démobilisés se situe aux
alentours de 15 pour cent des effectifs déclarés, soit environ
300 combattants. À ce chiffre, il convient cependant de
soustraire les 193 faux combattants FRPI de Aveba à qui
les FARDC ont vendu de vrais-faux certificats d’enregistrement.
19
2. Agendas économiques locaux
Plusieurs raisons expliquent cette résistance de certaines
composantes du FNI et des FRPI aux opérations de DDR.
Les motivations de la branche FNI dans la région de Loga
sont liées à un agenda communautaire local. Le FNI de
Loga se comporte toujours comme une milice d’autodéfense
communautaire encouragée par le chef local, Eudes
Dyogo Masumbuku, hostile au retour des FARDC dans la
région et ayant comme priorité la défense des Walendu
Tatsi de Loga, Jili, Anu et Klutsoko. Cette branche, qui
n’a pas évolué dans la zone opérationnelle de Peter Karim
mais dans celle du MRC, a toujours résisté aux pressions
exercées par Mathieu Ngudjolo pour rejoindre ce mouvement
et plus encore pour déposer les armes dans le cadre
du DDR.20 Bien que le nombre de ses combattants soit
relativement réduit, la milice locale conserve tout son
armement et, du fait de sa forte implantation communautaire,
pourrait rallier de très nombreux démobilisés.21
De même, le maintien du petit groupe FNI évoluant entre
Arua en Ouganda et Musekere sous le commandement de
Mbafele, quatre postes de lieutenants colonels et sept postes de
majors.
19 Selon le coordinateur de la CONADER pour l’Ituri, le Colonel
Duku, sur les 193 cas de fraude, seuls 70 auraient été des cas de
fraude avérés. Pour les 123 autres cas, il se serait agi de vrais
combattants ayant rendu leurs armes peu avant le lancement de la
phase III et qui auraient ensuite demandé à pouvoir bénéficier
des programmes de réinsertion à travers la délivrance de ces
certificats. Entretiens de Crisis Group, le coordinateur de la
CONADER pour l’Ituri, Bunia, mars 2008.
20 Lors du DDR phase III, Ngudjolo était allé sensibiliser cette
branche radicale du FNI, sans résultat.
21 Entretien de Crisis Group, officiers ex-MRC, Bunia, mars
2008.
Congo: quatre priorités pour une paix durable en Ituri
Rapport Afrique de Crisis Group N°140, 13 mai 2008 Page 5
Sheriff Ndjadza s’explique davantage par des raisons
économiques et le contexte régional que par un
quelconque agenda politique.22 Sheriff, un Lendu Pitsi
ayant longtemps évolué au sein du FNI, est un des
membres fondateurs du MRC. À ce titre, il a pendant
longtemps été officier de liaison du MRC auprès de
l’armée ougandaise et a entretenu des liens étroits
avec ses leaders Kakolele et Bosco Ntaganda, même
après leur départ de l’Ituri et leur intégration au sein
du CNDP de Laurent Nkunda.
Sheriff contrôlerait un groupe d’une centaine de miliciens,
parmi lesquels de nombreux ex-FAPC
(Walendu, Alur, Lugbara, Kakwa). Le mouvement est
très impliqué dans l’exploitation du bois dans la
localité de Zeu. Outre l’intérêt financier, ce groupe
serait utilisé par l’armée ougandaise pour s’informer
des mouvements de combattants dans les zones
situées à proximité des camps des rebelles de la
LRA, où la présence FARDC reste faible.
La résistance des FRPI au DDR s’explique par la
même combinaison de facteurs, dans un contexte
communautaire encore plus spécifique. Dans la zone
qu’ils contrôlent dans le territoire d’Irumu (Balazana,
Tcheyi et le Mont Omi), les FRPI contrôlent d’importantes
activités lucratives – comme le trafic du bois
près de Mambasa et l’exploitation de plusieurs mines
d’or23 – qui procurent à leurs combattants des revenus
sans commune mesure avec ce qu’ils pourraient gagner
s’ils intégraient les FARDC ou revenaient à la vie
civile. Le mouvement est par ailleurs très fortement
enraciné dans la communauté des Lendu sud, les
Ngiti. Ces derniers ont en héritage un fort esprit de
rébellion contre l’autorité centrale. Le retard pris pour
la reconnaissance des grades militaires, le transfert le
17 octobre 2007 à la CPI de leur ancien leader, Germain
Katanga, puis l’arrestation depuis août de leur
leader spirituel, Kakado, n’a fait que les conforter
dans leur sentiment de défiance à l’égard du pouvoir
central.
3. L’illusion d’une solution militaire
Confronté à cette persistance du phénomène milicien
après la clôture de la troisième phase du DDR et le
départ en formation, le 1er novembre 2007, de Peter
Karim, Mathieu Ngudjolo et Cobra Matata pour le
Centre supérieur militaire à Kinshasa, le gouverne-
22 Entretien de Crisis Group, ex-combattants de l’Ituri,
Bunia, décembre 2007.
23 Des informations font état de la présence d’un petit groupe
d’exploitants miniers qui exploiteraient des gisements de fer
au Mt Omi suite à un accord passé avec le FRPI à l’époque
où Cobra Matata dirigeait ce mouvement, ibid.
ment va décider d’en revenir aux opérations de désarmement
forcé pour en terminer avec les milices. Entre
décembre 2007 et février 2008, les FARDC lancent ainsi
plusieurs attaques contre des positions FNI et FRPI. Ces
opérations rencontrent un certain succès. Début mars
2008, le FNI de Lalo apparaît ainsi totalement démantelé.
La situation se révèle être plus complexe avec les FRPI :
le 26 janvier, les FARDC et la MONUC réussissent, dans
le cadre de l’opération « Iron Stone », à prendre leur
bastion de Tcheyi. Cependant, dans les semaines qui suivent,
les FARDC éprouvent de grandes difficultés à rester
maîtres de la zone. Les FRPI parviennent en effet à se
replier dans les forêts alentours et sur le mont Oyo. Le 6
février, ils lancent une attaque à l’arme lourde près de
Kamatsi, qui fait plus d’une dizaine de blessés côté
FARDC. Ces derniers empêchent finalement les FRPI de
reprendre Tcheyi, mais la situation sur le terrain reste indécise.
Fin février, la MONUC tente d’ouvrir des pourparlers
avec les responsables de la milice, mais ces
derniers demandent au préalable le retrait des FARDC de
Tcheyi et la libération de Kakado. Devant le refus du
commandant adjoint de la zone, le Colonel Nyembo, les
FRPI lancent le 25 février une nouvelle attaque surprise
sur la 13ème brigade FARDC qui opère dans la région.
Celle-ci prend alors la fuite et les opérations militaires
sont immédiatement stoppées dans le secteur.
La MONUC tente actuellement de mettre à profit cette
pause dans les opérations pour rouvrir un canal de négociation
et sensibiliser davantage les FRPI sur l’intérêt
qu’ils auraient à déposer les armes. Ces négociations
progressent difficilement car l’agenda des FRPI est confus
et son leadership continue d’exiger, au préalable à toute
négociation, le départ des FARDC de Tcheyi. Les militaires
de la MONUC sont, de leur côté, confiants dans
l’imminence d’une reddition et se disent prêts à lancer,
avec les FARDC, une opération d’envergure contre les
FRPI en cas de résistance prolongée.
Pourtant, il est peu probable qu’une solution purement
militaire permette d’aboutir rapidement. Suite au redéploiement
dans le Nord Kivu des éléments de la 4ème et
de la 6ème brigade, le dispositif militaire FARDC en Ituri a
été sensiblement réduit.24 Mal soutenues par l’état-major,
les troupes ont un moral très bas et l’indiscipline continue
de régner dans leurs rangs. Nombre de militaires se sou-
24 Selon des sources proches de l’état-major général à Kinshasa,
le commandant de la zone opérationnelle de l’Ituri, le général
Kinkela, avait pris la décision de dégarnir certaines positions
FARDC prétendant que les miliciens résiduels du territoire
d’Irumu étaient maitrisés. Les FARDC comptent environ 12 000
hommes sur le terrain, issus de la 4ème brigade du Colonel
Bonane, de la 1ère brigade, des unités d’appui et de la 13ème
brigade du Colonel Akilimani.
Congo: quatre priorités pour une paix durable en Ituri
Rapport Afrique de Crisis Group N°140, 13 mai 2008 Page 6
cient davantage du trafic d’or et de bois que des
opérations militaires proprement dites et sont très peu
motivés pour aller déloger une milice communautaire
comme les FRPI, réfugiée dans son sanctuaire, soutenue
par sa communauté25 et pouvant compter sur des
soutiens extérieurs, parmi lesquels le groupe de Sheriff
Ndjadza, voire le CNDP.26
Plusieurs observateurs doutent que les FRPI auraient
pu mener les actions récentes contre les FARDC et la
MONUC sans la présence de conseillers extérieurs –
des officiers CNDP probablement – leur niveau opérationnel
étant généralement beaucoup plus faible. Il
semble que le CNDP qui avait toujours souhaité ouvrir
sans succès un front en Ituri ait choisi d’aider les
FRPI – pourtant historiquement hostiles aux Tutsi –
selon une logique purement opportuniste, les deux
ayant en commun le même adversaire, les FARDC. 27
Enfin, du côté des FARDC, le prolongement des opérations
contre les FRPI présente certains avantages. La
poursuite des opérations militaires est l’occasion pour
certains responsables à Kinshasa de continuer à s’enrichir
dans le trafic de bois, d’or ou de coltan dans
lequel les brigades sont impliquées. Avec près de 200
éléments encore à leurs côtés, une bonne connaissance
du terrain et une forte capacité de mobilisation
des jeunes démobilisés, encore mal réintégrés à la vie
civile, les FRPI pourraient ainsi être en mesure de
résister encore plusieurs mois.28
B. COMMUNAUTES LOCALES ET CAPACITES
ADMINISTRATIVES CIVILES
Que ce soit pour le groupe FNI de Loga ou les FRPI,
la question de l’implication des communautés dans le
processus de désarmement apparaît à chaque fois
comme un enjeu crucial. Dans les deux cas, le bureau
de la MONUC à Bunia a un rôle particulier à jouer.
Compte tenu de la défiance des populations Ngiti des
FRPI et des Walendu Pitsi du FNI de Loga vis-à-vis
des FARDC et du discrédit qui affecte les autorités
civiles congolaises après le non respect de leur enga-
25 Les FRPI peuvent compter sur la sympathie de la communauté
Ngiti qui n’a pas oublié les exactions commises contre
elles par les FARDC, notamment lors du massacre de Bavi.
26 Entretiens de Crisis Group, MONUC, FARDC et ex-combattants
de l’Ituri, Bunia, mars 2008.
27 Ibid.
28 Les FRPI pourraient avoir reçu récemment de l’armement
neuf et une connexion avec la ADF-NALU ne saurait être
exclue. Deux combattants FRPI ont été arrêtés en mars 2008
à Komanda en possession d’armes neuves. Entretiens de
Crisis Group, Bunia, mars 2008.
gements pris vis-à-vis des groupes armés, la MONUC
devrait mettre sur pied une task force combinant pression
militaire, pression politique et dialogue, notamment avec
l’aide des chefs de communautés locales.
1. Investir dans la sensibilisation et la réinsertion
S’agissant des FRPI, le soutien de la brigade de la MONUC
au FARDC, dans le cadre des opérations conjointes, devrait
être renforcé afin de compenser la réduction des effectifs
et le manque de moyens logistiques sur un terrain difficile
d’accès. Il s’agirait moins de mener une offensive directe
contre les FRPI que de les encercler et de limiter ainsi
leur possibilité de recevoir des soutiens de l’extérieur. Un
engagement plus direct de la brigade renforcerait également
la crédibilité du dialogue ouvert entre la direction
des FRPI et le bureau de la MONUC à Bunia. En parallèle,
les bureaux de la MONUC à Bunia et à Kampala
devraient enquêter sur les éventuels soutiens extérieurs
dont semblent bénéficier les FRPI et les activités du
groupe de Sheriff Ndjadza. Avec l’appui du bureau de la
MONUC à Kinshasa, il s’agirait aussi de voir quels
pourraient être les hauts responsables, notamment au sein
de l’état-major général, qui auraient intérêt à la persistance
des troubles en Ituri afin de justifier le maintien
en opération de contingents et de récupérer in fine une
partie des revenus tirés des trafics de bois et d’or dans
lesquels ces contingents sont impliqués.29
Pour une pacification durable, cependant, il est nécessaire
de prévoir une étape suivante du DDR, directement
centrée sur le désarmement communautaire. Même si de
nombreux civils ont remis des armes, le désarmement
communautaire a été le point faible des précédents programmes
de DDR. Or, cette guerre n’a pas seulement impliqué
des milices, mais bien dressé des communautés les
unes contre les autres. Jusqu’à présent, ni les comités de
défense mis en place au sein de la population Lendu ni les
forces d’autodéfenses qui existaient chez les Hema, n’ont
été désarmés. Dans la région d’Anu et de Klutsoko, les
comités d’auto-défense Lendu du chef Eudes Dyogo
Masumbuku possèdent encore beaucoup d’armes et continuent
d’être actifs et de se confondre avec la branche FNI
de Loga.
Désarmer les communautés prendra du temps et nécessitera
un important travail de sensibilisation au plus près
des communautés villageoises. Dans un contexte marqué
par des structures étatiques faibles et une armée nationale
considérée par les communautés comme une source d’insécurité,
la persuasion et le dialogue, plutôt que le recours à
de nouveaux ultimatums, est le seul moyen de progres-
29 Ibid.
Congo: quatre priorités pour une paix durable en Ituri
Rapport Afrique de Crisis Group N°140, 13 mai 2008 Page 7
ser.30 Le programme de DDR communautaire devra
ainsi veiller à faire des paysans les acteurs du processus.
Pour cela, il faut augmenter le financement de
projets durables comme des micro-coopératives dans
les domaines de l’agriculture, de l’élevage, de la pêche
et de l’entretien des dessertes agricoles impliquant les
ex-combattants et les communautés de réinsertion.
Dans ce contexte, la réinsertion des ex-combattants
constitue un enjeu crucial. Si elle est réussie dans ses
multiples aspects, économiques, communautaires mais
aussi psychologiques, l’Ituri pourra, en effet tourner
la page des conflits armés. Dans le cas contraire, de
nouvelles violences paraissent inévitables. Pour l’heure,
il est encore trop tôt pour évaluer les résultats des programmes
de réinsertion durables lancés en janvierfévrier
2008 par le PNUD31 dans le cadre de la phase
III, avec l’appui de la Suède, de la Norvège, de
l’Irlande, du Japon, de l’Espagne et des États-Unis.
Le succès de ce programme est essentiel si l’on veut
éviter que des groupes désormais résiduels ne puissent,
comme lors des précédents programmes de DDR,
recruter les combattants ayant échoué à se réinsérer
dans la vie civile.32 Pour une pacification en profondeur,
ces efforts doivent s’inscrire dans une stratégie
globale visant à restaurer l’autorité de l’État dans la
province.
2. Restaurer les capacités administratives et
policières locales
Si le district est sorti de l’état d’anarchie totale dans
lequel il se trouvait en 2003, la situation reste fragile
et le banditisme se développe, souvent à l’initiative
des éléments incontrôlés des FARDC, y compris dans
la ville de Bunia. À Bunia, ces assassinats sont analysés
localement, à tort ou à raison, comme des règlements
de compte des militaires et des policiers à l’encontre
des ex-combattants, notamment ceux d’origine
d’Hema.
30 Entretiens de Crisis Group, ancien responsable d’un groupe
armé, Kampala, novembre 2007.
31 Le programme de réinsertion durable, dont le coût s’élève
à $3 millions, touche ainsi un total de 2 415 personnes. En
pratique, cependant, les membres des communautés de réinsertion
n’étant recrutés que pour un mois, le nombre de
bénéficiaire du programme de réinsertion transitoire pourrait
dépasser les 3 500. Entretien de Crisis Group, bureau du
PNUD, Bunia, novembre 2007.
32 En mai 2007, le PNUD et la MONUC ont organisé un
séminaire sur le sujet en présence du commissaire de district
et des administrateurs de territoires. Outre des actions de sensibilisation
sur le terrain, les participants avaient demandé le
lancement d’urgence de projets de développement ciblant la
population afin qu’elle puisse rendre les armes.
Ces derniers, qui se sont réinsérés dans des activités de
taxi-moto, s’estiment victimes d’un ciblage et la tension ne
cesse de s’accroître en ville. Le 30 mars, suite à l’assassinat
du sixième conducteur de taxi-moto Hema depuis le
début de l’année 2008, les taxi-motos ont organisé des
manifestations en ville, au cours desquelles les ex-combattants
ont affirmé regretter d’avoir rendu les armes. Le
31 mars, après qu’une étudiante a été tuée, percutée par
un véhicule des casques bleus pakistanais de la MONUC,
les étudiants ont fini par se joindre aux taxi-motos pour
attaquer à coup de pierre et de projectiles en feu le
bâtiment de la MONUC.
De façon générale, au cas où la MONUC viendrait à quitter
la région, il est à craindre que les progrès observés ces
dernières années soient rapidement remis en cause. Les
programmes d’appui mis en oeuvre depuis 2003 dans le
domaine des secteurs de la sécurité,33 de la justice34 et du
renforcement des capacités administratives locales35 ont
permis de stabiliser la situation, mais les progrès restent
encore très fragiles et réversibles. Sur le terrain, malgré
les efforts faits par l’auditorat militaire pour sanctionner
les auteurs d’exaction et une baisse observée des cas de
violences sexuelles attribuées aux forces de sécurité, les
populations continuent d’accuser les militaires d’être hostiles
aux Ituriens et de chercher à venger la mort de leurs
camarades dans les mains des groupes armés. Face à ce
malaise, certains chefs de collectivités proposent d’intégrer
au sein des effectifs militaires déployés en Ituri un
tiers au moins des ressortissants de chaque communauté
locale.36
Une telle option rassurerait probablement les communautés,
mais elle aurait pour inconvénient de remettre en cause
le caractère national et unitaire d’une institution déjà très
33 La mission de conseil et d’assistance de l’Union européenne
en matière de réforme du secteur de la sécurité en République
démocratique du Congo (EUSEC) a mis en place au sein des brigades
des officiers qui veillent au respect de la chaîne de paiement.
La MONUC, de son côté, entraîne et conseille (mentoring)
les brigades FARDC.
34 Dans le cadre du Programme pour « la restauration des capacités
juridictionnelles à l’Est du Congo pour soutenir l’instauration
de l’État de Droit », REJUSCO, lancé en 2006, l’Union Européenne
(UE), la Coopération britannique (DFID) et néerlandaise
contribuent au retour des magistrats dans le district, via
notamment le versement des primes spéciales, à la remise en état
des cours civiles et militaires et des prisons, à l’organisation de
formations pour les praticiens et d’activités de sensibilisation au
droit au profit des populations. REJUSCO apporte aussi un appui
technique pour s’assurer du respect de la procédure pénale et
faire le suivi des procès.
35 Depuis 2003, l’UE travaille au renforcement des capacités du
commissaire de district avec pour objectif la restauration de la
chaine administrative entre Bunia et les territoires et collectivités.
36 Entretiens de Crisis Group, chefs de collectivités, Bunia,
novembre 2007.
Congo: quatre priorités pour une paix durable en Ituri
Rapport Afrique de Crisis Group N°140, 13 mai 2008 Page 8
fragilisée. Elle pourrait par ailleurs amplifier encore
la baisse de moral observée au sein des FARDC,
notamment chez les officiers, suite à l’intégration à
des grades supérieurs aux leurs,de nombreux anciens
miliciens sans qualification. À terme, l’amélioration
de la sécurité en Ituri passe plutôt par le remplacement
progressif des forces armées par les éléments
d’une police nationale restructurée, intégrant plus
largement des originaires de la province, sous réserve
toutefois que ces derniers n’aient pas été d’anciens
miliciens.
Dans le cadre de son projet de stratégie pour la sécurité
et la stabilisation de l’est de la RDC, la MONUC
a prévu, pour la composante autorité étatique de son
programme, de contribuer à l’équipement et au déploiement
d’unités de police, de magistrats et d’agents de
la justice, en priorité dans les territoires de Djugu,
Irumu, Mahagi et Aru. Elle compte aussi contribuer
au renforcement de la présence de la police aux frontières
et des représentants de l’administration étatique
dans ces mêmes territoires. De son côté, le PNUD
élabore actuellement un plan d’action pour la stabilisation
et la réinsertion communautaire pour 2008-
2010, en concertation avec la base, les autorités locales
et provinciales37 afin de renforcer la cohérence des
programmes d’action des différentes agences intervenant
sur le terrain.
Jusqu’ici, le plan comprend cinq secteurs prioritaires :
sécurité, éducation, agriculture, transport, santé. Malheureusement,
rien n’est spécifiquement prévu dans
ces plans pour renforcer de manière durable la capacité
des institutions locales, appelées à partir de 2009,
à exercer les responsabilités d’une province à part
entière. Le seul programme d’appui existant dans ce
domaine est le programme mis en oeuvre par l’UE. Or
ce dernier s’est interrompu le 19 avril 2008, à la fermeture
du bureau de l’UE à Bunia.38 Dans ces conditions,
on peut craindre que l’Ituri se retrouve rapidement
confrontée à une incapacité institutionnelle pure
et simple de tirer réellement partie des programmes
d’aides envisagés par les autres bailleurs.
Pour l’heure, en dehors de Bunia, la chaine de commandement
administrative reste faible. Suite à la décision
prise le 20 octobre par le gouverneur de la province,
M. Autsai, de suspendre Pétronille Vaweka, le
district n’a pas eu de commissaire de district à part
37 Un séminaire a eu lieu à Bunia pour présenter le plan les
11-12 mars 2008. Le PNUD compte faire adopter le plan au
niveau de l’Assemblée provinciale à Kisangani, courant mai
2008.
38 Entretiens de Crisis Group, bureau de l’UE, Bunia, mars
2007.
entière pendant près de six mois.39 Le personnel administratif
est pléthorique, âgé et mal formé. Au-delà du recyclage,
c’est une réforme en profondeur de l’administration
locale qui s’impose et qui, malheureusement, de l’avis
des principaux partenaires de la RDC, ne pourra s’effectuer
qu’une fois que le district aura été élevé au rang de
province. Les obstacles administratifs à surmonter, que ce
soit à Kinshasa ou à Kisangani, sont en effet encore trop
lourds pour pouvoir espérer avoir un impact dans le
district en intervenant au niveau de la capitale nationale
ou provinciale.
On peut craindre cependant qu’avec la gestion actuelle du
gouverneur Autsai, la situation soit difficile à redresser
après 2009. L’action de ce dernier est unanimement
dénoncée par les observateurs tant locaux qu’internationaux.
Au cours de l’année 2007, il a multiplié les nominations
aux postes de direction dans l’administration locale
en privilégiant l’appartenance ethnique et l’affiliation
politique plutôt que la compétence.40 La corruption et le
népotisme41 constituent un modèle de mauvaise gouvernance
qui est ainsi en train de se consolider et le risque
existe que l’Ituri ne puisse pas être en mesure de gérer de
manière satisfaisante avant 2010 les trois dossiers dont
l’évolution conditionne en grande partie la consolidation
de la paix, à savoir, le retour des réfugiés et des déplacés
dans un contexte de conflits fonciers non réglés, la
question de la gestion des ressources, et la question de la
justice et de la réconciliation communautaire.
39 M. Germain Okumu a finalement pris ses fonctions de commissaire
de district le 18 avril 2008. D’ethnie Alur, comme Mme
Vaweka, il a, dans le passé, exercé les fonctions d’administrateur
du territoire de Mahagi et de coordinateur de la commission
électorale dans ce même territoire. Entretiens téléphoniques de
Crisis Group, MONUC, mai 2008.
40 Entretiens de Crisis Group, organisations non-gouvernementales
(ONGs) et hommes politiques locaux, Bunia, novembre 2007.
41 Le fils du gouverneur Autsai a été nommé en mars 2008
responsable des Douanes à Aru. Son neveu Mokili est le Chef
des services de l’environnement à Bunia, un poste important
pour contrôler le secteur du bois. Undiro contrôle le tourisme,
Mawa, la Direction Générale des Recettes Administratives et
Domaniales (DGRAD), Ezowa est responsable de la Jeunesse et
sports et Adru, la fonction publique. De nombreux Lugbara
occupent désormais des postes de direction à la tête des services
en charge de la collecte des taxes pour le district et la province.
Congo: quatre priorités pour une paix durable en Ituri
Rapport Afrique de Crisis Group N°140, 13 mai 2008 Page 9
III. PREVENIR DE NOUVEAUX
CONFLITS FONCIERS
Les conflits fonciers ne résultent pas d’une pénurie de
terre en tant que telle ni de l’expropriation massive
d’une communauté par une autre. Paradoxalement,
certaines zones à très forte densité de population,
comme Djukot ou Angal, dans le territoire de Mahagi,
n’ont pas débouché sur les violences observées dans
les territoires de Aru, Djugu ou Irumu. Le coeur du
différend foncier se situe au niveau de la valeur
reconnue aux titres de propriété légaux par rapport
aux droits ancestraux des communautés sur les terres.
Le cas de conflit le plus fréquemment observé est celui
qui oppose des membres de la communauté Hema
ayant acquis des titres fonciers auprès du service du
cadastre sur des terres considérées par des chefs coutumiers
Lendu comme leur appartenant de droit, en
vertu de la coutume.
Lorsque les propriétaires Hema tentent de prendre
possession de sa concession et envoient la police
pour obtenir le départ des éventuels occupants, la communauté
de ces derniers prend leur défense et un
cycle de violence et de représailles s’enclenche. Il existe
cependant également des conflits fonciers opposant
plus classiquement éleveurs et agriculteurs : dans certains
cas, le problème surgit lorsque les troupeaux
des éleveurs détruisent des cultures et que les agriculteurs
décident, en représailles, de frapper certaines
bêtes. Dans d’autres, agriculteurs et éleveurs s’accusent
d’avoir déplacé les bornes délimitant leurs concessions.
La difficulté en Ituri, comme ailleurs en
RDC, est que la justice, et plus généralement l’État,
ne sont pas, dans les faits, en mesure de réguler ces
conflits. Cela tient à la faiblesse de ses moyens
décrits précédemment, mais aussi et surtout du chaos
juridique dans lequel se trouve le pays, sur ce sujet,
depuis des décennies.
A. IMBROGLIO JURIDIQUE
La loi foncière du 20 juillet 197342 et la jurisprudence
ont défini un cadre juridique et des procédures relativement
précises. La loi foncière a ainsi aboli la propriété
privée du sol et posé comme principe celui de
la propriété inaliénable de l’État congolais. Son
article 385 dispose que les terres occupées par les
42 C’est la loi n°73/021 du 20 juillet 1973 portant sur le
régime général des biens, le régime foncier et immobilier et
le régime des sûretés, telle que modifiée et complétée par la
loi n° 80-008 du 18 juillet 1980.
communautés locales, du fait de la coutume ou des usages
locaux, deviennent des terres domaniales. L’article 387
ajoute que la question de l’acquisition et de la transmission
des droits de jouissances, régulièrement acquis sur
ces terres à l’occasion de la concession par l’État d’une
partie des terres domaniales à un particulier, sera réglée
par une ordonnance présidentielle ultérieure. Or, cette
ordonnance présidentielle qui aurait dû encadrer la transition
du droit coutumier vers le droit foncier sur les terres
domaniales n’a jamais été prise. De fait, une grande partie
des terres se retrouvent ainsi en RDC sans règle d’attribution
et de gestion précise et le service du cadastre comme
les chefs coutumiers s’estiment seuls compétents pour
autoriser les particuliers à occuper ces terres domaniales.
À cela s’ajoutent les problèmes liés à la corruption endémique
dans l’administration congolaise et au manque de
formation de nombreux agents du cadastre.43 Trop souvent,
l’enquête de vacance ou d’indemnisation des populations
spoliées, prévue par l’article 193 de la loi foncière,
n’est pas ouverte, ou est menée de façon complaisante en
l’échange de pots de vin versés au service du cadastre.
Dans de tels cas, la jurisprudence congolaise se veut particulièrement
formaliste puisqu’elle ne permet de contester
le caractère illégal de la procédure que pendant les
deux ans qui suivent la délivrance de l’acte. Passé ce
délai, le titre est considéré comme légal du simple fait
que l’autorité qui l’a émis était habilitée à le faire.
Sur le terrain cependant, ce type de raisonnement s’avère
totalement inapplicable sauf à vouloir risquer de nouvelles
violences. En effet, les enquêtes de terrain et les séminaires
de sensibilisation à la loi foncière ont montré que
les populations ne connaissent pas la loi foncière et pensent
que les chefs coutumiers sont toujours habilités à
délivrer les titres fonciers et que les juges n’ont pas
l’autorité pour s’immiscer dans ce type de conflit. Face à
une telle impasse, plusieurs programmes de sensibilisation
et de médiation ont été lancés ces deux dernières
années avec l’aide des bailleurs.44
L’ONG belge RCN-Justice et Démocratie a ainsi organisé
des séminaires sur la loi foncière, tandis que le Réseau
Haki na Amani (RHA) et Africa Initiative Programme
(AIP) mettaient en place des Comités locaux d’identifica-
43 À l’image des autres circonscriptions foncières du pays, l’Ituri
est administrée par un conservateur des titres immobiliers qui a la
charge d’un livre d’enregistrement pour l’inscription des certificats
d’enregistrement, d’un registre de certificats et d’un répertoire
alphabétique des personnes auxquelles des certificats sont
délivrés. La procédure d’obtention du certificat d’enregistrement
comprend trois étapes : la demande de terre, le contrat de location
ou d’occupation provisoire et le contrat de concession.
Entretien de Crisis Group, ONG RCN, Bunia, novembre 2007.
44 Entretiens de Crisis Group, ONGs RCN, Haki na Amani,
Africa Initiative Program, Bunia, novembre 2007.
Congo: quatre priorités pour une paix durable en Ituri
Rapport Afrique de Crisis Group N°140, 13 mai 2008 Page 10
tion des conflits fonciers et des comités de paix. Ces
programmes ont ciblé les représentants locaux de
l’administration et du ministère de la Justice, ainsi
que les communautés elles-mêmes, et rencontré un
certain succès. Elles ont permis d’établir une cartographie
plus précise des litiges fonciers dans le
district et, à travers différentes rencontres, ont limité
le nombre des violences liées directement à ce type
de litiges.
La sensibilisation est cependant loin d’avoir réglé tous
les problèmes : les participants à ses ateliers semblent
souvent davantage intéressés par le per diem offert
par l’organisateur que par la recherche de solutions
aux conflits fonciers. Même une fois informées de la
loi, les communautés de base, et particulièrement les
chefs coutumiers, en contestent encore souvent le
bien fondé. Ils tiennent ces textes, qui n’ont jamais
été véritablement appliqués depuis des décennies,
comme caducs. Pointant par ailleurs leur possible non
conformité à la constitution,45 l’absence de l’autorité
de l’État sur une grande partie du territoire, et la corruption
des juges, les chefs coutumiers affirment qu’en
leur retirant le droit de délivrer des titres fonciers, on
s’attaque à l’un des piliers de leur pouvoir et on les
prive d’une source importante pour le budget de leur
entité.46 Ils souhaiteraient plutôt qu’on les associe à la
préparation d’un nouveau projet de loi destinée à
compléter la loi foncière de 1973.47
Le problème étant d’une grande complexité juridique
et d’une grande sensibilité sur le plan politique, en
particulier à l’approche des élections locales prévues
pour 2009, ce projet ne fait, pour l’instant, l’objet
d’aucun débat au parlement national et il est peu
probable que des solutions de droit soient rapidement
trouvées à ce conflit. Cette situation est d’autant plus
regrettable que le temps presse car de nombreux
45 La Constitution du 18 février 2006 dispose ainsi à son
article 9 que « l’État exerce une souveraineté permanente
notamment sur le sol, le sous-sol, les eaux et les forêts, sur
les espaces aériens, fluviaux, lacustres et maritimes congolais
ainsi que sur la mer territoriale congolaise et sur le plateau
continental. » Cette notion de souveraineté permanente
a été interprétée comme la source potentielle de confusion et
un recul par rapport à la notion de propriété figurant dans la
loi foncière de 1973, la souveraineté étant davantage
associée à l’idée d’autorité que de possession.
46 « Ils font des séminaires pour dire qu’il ne faut pas régler
les litiges avec les chefs coutumiers mais avec les juges. Le
problème est que leur justice est corrompue ; ce pays est
foutu par l’argent. On voit des terres vendues sans information
des communautés qui vivent sur ces terres ni respect
des procédures », entretiens de Crisis Group, chefs coutumiers,
Bunia, novembre 2007.
47 Ibid.
réfugiés et déplacés envisagent dès à présent de rentrer
chez eux pour profiter d’un certain retour au calme.
B. REINSTALLATION PROBLEMATIQUE
DES REFUGIES ET DEPLACES
Peu avant la tenue des élections, le district a connu une
vague de retours de plus de 150 000, personnes déplacées.
48 Or, dans bien des cas, les terres ont été occupées
après leur départ et leur retour risque de susciter de
nouvelles tensions. Nombre de déplacés se sont, en effet,
installés sur des terres laissées vacantes par des réfugiés
ou des déplacés d’autres communautés, qui peuvent
désormais souhaiter venir les récupérer. On assiste, par
ailleurs, du fait de ces déplacements, à une augmentation
des densités de populations dans certaines zones. Cela entraîne
une raréfaction des ressources disponibles à la fois
pour l’agriculture et l’élevage et pourrait déboucher sur
des tensions graves dans les mois à venir.49 Selon le
PNUD, il reste en effet encore dans la province près de
170 000 déplacés internes tandis que 50 000 Ituriens
vivent comme réfugiés en dehors de la RDC.
Pour l’heure, on trouve des foyers de tensions dans chaque
territoire du district. Dans le territoire de Djugu,50 des
conflits de terre opposent principalement les Walendu
Tatsi, Djatsi et Pitsi aux Bahema. Les premiers accusent
les seconds de faire paître leur troupeau n’importe où et
d’avoir corrompu l’administration pour acquérir illégalement
des titres de propriété foncière. Les seconds affirment
que les Lendu souhaitent simplement leur prendre le
fruit de leur travail51 en cherchant à contester leurs droits
au nom de la coutume.52 Toutefois, le territoire est en
réalité une véritable mosaïque d’ethnies53 avec de nombreux
villages d’une communauté enclavés dans une zone
peuplée par une ethnie différente. Comme le reconnait
lui-même l’administrateur du territoire, Tshatshu Lilo, le
retour chez eux des déplacés et des réfugiés est un pro-
48 125 000 dans le territoire de Djugu, 10000 à Irumu, 25 255 à
Aru et 12 392 dans le territoire de Mambasa.
49 Entretiens de Crisis Group, Africa Initiative Program, Bunia,
novembre 2007.
50 À Kparnganza, situé à 30km de Bunia, l’administrateur de
territoire a décidé en 2007 d’interdire toute nouvelle construction
afin d’éviter que n’émergent de nouveaux conflits entre Bahema
nord et Walendu Tatsi.
51 Entretiens de Crisis Group, chef de collectivité Lendu du
territoire de Djugu, Bunia, novembre 2007.
52 Entretiens de Crisis Group, chef de collectivité Hema du
territoire de Irumu, Bunia, novembre 2007.
53 La population du territoire de Djugu est composée de Bahema
Badjere, Bahema Banwagi, Bagegere, Bahema Nord, Baniali,
Ndo Okebo, Walendu Djatsi, Walendu Pitsi, Walendu Tatsi,
Mambisa.
Congo: quatre priorités pour une paix durable en Ituri
Rapport Afrique de Crisis Group N°140, 13 mai 2008 Page 11
blème très délicat.54 Les commerçants Hema qui
veulent retourner à Kobu ne peuvent y retrouver,
leurs propriétés ayant pour la plupart été détruites
pendant la guerre.
Le même problème se pose pour les Lendu de Fataki
dont les terres et les maisons sont aujourd’hui occupées
par les Hema. Tout en reconnaissant que Fataki
se trouve en territoire Lendu, les Hema, qui affirment
s’être installés à Fataki depuis plusieurs dizaines
d’années, comme enseignants, commerçants ou infirmiers,
ne voient pas pourquoi ils devraient quitter
cette ville pour laisser rentrer les Lendu partis pendant
la guerre.55 De leur côté, à Jiba, les Walendu Pitsi
refusent l’accès à leur ferme à la famille Magbo (des
Hema) et menacent de leur déclarer la guerre au cas
où ils s’obstineraient à revenir sur cette concession.
Dans le territoire d’Aru, les différends fonciers et les
conflits de limite territoriale sont nombreux dans la
collectivité des Aluru56 et celle des Zaki.57 Dans cette
dernière, les populations Gawa et Nyaya s’affrontent
régulièrement. En 2007, plusieurs centaines d’habitations
ont ainsi été détruites, provoquant le déplacement
de 562 familles.58 Dans le territoire de Mahagi,
les fortes densités de populations (plus de 500 habitants/
km²) créent aussi des conflits fonciers, de fortes
résistance au retour des déplacés dans les collectivités
de Mokambo (précisément à Musongwa) et des
Walendu Watsi (vis-à-vis des déplacés de Dzeba).
On observe par ailleurs des mouvements de populations
à la recherche de terres pour l’agriculture vers les
terres dites de réserves comme Anghal II et Djukoth
II.59 Des tensions sont également récurrentes à Magurugu,
dans la collectivité de War Palara, à Ngote, dans
la collectivité de Pandoro, et elles peuvent déboucher
sur de violents incidents, comme en octobre 2007
lorsque la population de Pashua et celle de Djupabot
54 Entretien de Crisis Group, monsieur l’administrateur du
territoire de Djugu, Bunia, juillet 2007.
55 Entretien de Crisis Group, responsable administratif
Hema de la province, Bunia, juillet 2007.
56 Dans la collectivité Aluru, les conflits identifiés opposent
les groupements Awudje, Nguru et Olu, Yira et Zaki, Ndo et
Olo, Aluru et Ndo, Azumba et Awuko.
57 Dans la collectivité des Zaki, les conflits opposent les
groupements Labho, Appa et Lamina, Angiria et Angonda,
la Cité d’Aru et la collectivité de Otso.
58 Voir rapport de l’Office des Nations unies pour la coordination
de l’action humanitaire (OCHA) du 7 mars 2008.
59 Voir le conflit foncier au niveau du village de Luu et le
conflit parcellaire au niveau du village Umoyo, dans la
collectivité des Djukhot.
se sont affrontées au sujet d’un bout de terre occupé par
les habitants de Pashua depuis cinq ans.60
Dans le territoire d’Irumu, en dépit d’une densité de peuplement
beaucoup plus faible, les problèmes fonciers sont
également très nombreux : dans les localités de Bogoro,
Buguma, Kyamukaka, Lakpa, Nyakunde, Nombe, Buguge
(Mt Omi), les Lendu Bindi (Ngiti) occupent les terres
appartenant aux Hema.61 Dans la collectivité de Kasenyi,
le retour d’Ouganda des éleveurs Hema-Sud et de leurs
20 00062 têtes de bétail provoque de sérieux problèmes de
surpâturage. Nombre de retournés Hema ne sont pas originaires
de Kasenyi mais de Nyakunde, à 45km de Bunia,
mais ils ne peuvent rentrer à Nyakunde car la ville est
occupée par les Lendu. Dans la zone de Tcheyi, occupée
depuis des années par les Lendu Bindi des FRPI, le retour
des communautés Bumbikasa Bunyagwa, chassées depuis
des longues années, risque également de susciter de nombreuses
tensions.
Face à cette situation, la réponse des autorités, tant nationale
que locale, n’a pas été jusqu’ici à la hauteur. La plupart
des responsables a peur de s’attaquer à ce problème.
Avant d’être suspendu, la commissaire de district,
Pétronille Vaweka, avait certes mené de nombreuses activités
de sensibilisation afin d’apaiser les conflits fonciers,
en particulier dans le territoire de Mahagi. Des administrateurs
ont pris des mesures de prévention afin de contenir
le risque de violence. Les services administratifs du
district ont manifesté leur intérêt à travailler activement à
la prévention des conflits de terre. Cependant, au niveau
provincial, les actions du gouverneur Autsai ont brouillé
le message des autorités et donné le sentiment que les
auteurs de violence jouiraient d’une totale impunité en
cas de conflit foncier.63
60 Selon la MONUC, ces affrontements ont fait une dizaine de
blessés.
61 Le chef de groupement Hema de Bogoro a été rétabli sur place
courant 2007, à son retour d’exil en Ouganda. Mais une grande
partie de sa population n’est pas encore rentrée en raison de
l’occupation du village par les Walendu Bindi.
62 Entretien de Crisis Group, les autorités locales Bahema-Sud,
Kasenyi et Bunia, mars 2008.
63 En juin 2007, le gouverneur Autsai a fait libérer 60 personnes
condamnées pour avoir brûlé plusieurs habitations suite à un conflit
foncier à Ndéri, à 300km au nord de Bunia, dans le territoire
de Aru. Le 30 juillet, le gouverneur de la Province Orientale a
fait libérer 90 prisonniers condamnés pour la destruction d’une
centaine de maisons dans la région d’Ariwara, territoire d’Aru. À
chaque fois, les responsables judiciaires de la province ont protesté
contre ces décisions, qui constituent de surcroît, une violation
flagrante de la constitution, sans résultat, le gouverneur affirmant
avoir agi sur instruction du président Kabila. Entretiens de
Crisis Group, autorités judiciaires du district, Bunia, novembre
2007.
Congo: quatre priorités pour une paix durable en Ituri
Rapport Afrique de Crisis Group N°140, 13 mai 2008 Page 12
C. RENFORCER LA PREVENTION ET
REVISER LA LOI FONCIERE
Courant 2007, l’UE a proposé de mettre en oeuvre,
avec le soutien de la plupart des organisations nongouvernementales
(ONGs) travaillant dans le secteur,
la MONUC et le commissaire de district, une commission
foncière en Ituri chargée de mener des actions
de prévention et de sensibilisation sur les conflits
fonciers. Installée le 26 février 2008, cette commission
rassemble, sous la présidence du Major Kayembe,
des responsables politiques, de la société civile, des
FARDC, de la police et des représentants de la communauté
internationale. Elle compte se rendre régulièrement
sur le terrain afin d’installer ou d’appuyer
et renforcer, lorsqu’ils existent déjà, les comités locaux
de pacification dans chaque collectivité et de proposer
des actions de médiations. Le problème pour
l’instant est que la commission n’a toujours pas reçu
de budget et que la première mission prévue pour se
dérouler en mars à Aru a dû finalement être annulée.
Ces initiatives devraient pourtant être encouragées et
soutenues sur la durée, tant par les bailleurs que par
les responsables politiques locaux et nationaux. Elles
devraient s’accompagner d’expériences pilotes afin de
préparer le retour des réfugiés et des déplacés64 dans
les zones déjà affectées par des conflits fonciers,
ainsi que d’initiatives visant à moderniser les
techniques de production agricole et d’élevage. La
mise en place de coopératives agro-pastorales et
l’utilisation de méthodes requérant moins d’espace
pourraient apaiser de nombreuses tensions et renforcer
la solidarité entre les différents groupes ethniques.65
Si rien n’est fait, on peut craindre que la situation nourrisse
rapidement de nouvelles tensions, condamne à
l’échec le plan de désarmement communautaire et
incite certains démobilisés à rejoindre à nouveau des
milices villageoises et communautaires. Les élections
locales prévues pour 2009 pourraient servir de révélateurs
et de détonateurs à de nouvelles vagues de
violences autour des conflits fonciers. Ceci est
d’autant plus probable que ces élections auront pour
circonscription le groupement et que de très nombreux
problèmes se posent justement à ce niveau :
certains groupements ont disparu, d’autres ont vu la
64 Dans le cadre de la mise en oeuvre des accords de
Ngurdoto, la réunion ministérielle de suivi entre la RDC et
l’Ouganda, qui s’est tenue du 12 au 15 décembre 2007, a
prévu la signature prochaine d’un accord tripartite avec le
UNHCR pour le rapatriement des réfugiés.
65 À l’époque du Zaïre, il y avait à Nioka, dans le territoire
de Mahagi, la plus grande station de recherche sur l’élevage
du pays.
composition de leur population bouleversée du fait de la
guerre, qui souvent n’ont pas pu se faire enrôler.
Dans la collectivité de Kasenyi par exemple, dont le chef
est Hema-sud, 65 pour cent de la population est désormais
Alur, 30 pour cent seulement sont Hema-sud et 10 pour cent
de Lendu Tatsi, Djatsi et Bindi. Dans les groupements de
Musezo, Mbisa, Tali, Lonyo, et Kparangandza, les Lendu
occupent désormais les lieux et les communautés originaires
Hema ou Bira ont peu de chance de pouvoir revenir
s’y installer, y voter et s’y faire élire.
Il est urgent que le gouvernement lance un processus de
consultation en vue de présenter au Parlement avant la fin
2008 un texte visant à la révision de l’actuelle loi foncière
et du statut des chefs coutumiers. De son côté, le ministère
de l’Intérieur devrait lancer, en association avec l’Assemblée
provinciale de la Province Orientale, une mission
d’étude concernant le découpage administratif prévalant
actuellement dans le district, en tenant compte de la disparition
de certains groupements et du mouvement des
populations.
Congo: quatre priorités pour une paix durable en Ituri
Rapport Afrique de Crisis Group N°140, 13 mai 2008 Page 13
IV. L’EXPLOITATION DES RESSOURCES
NATURELLES ET MINIERES
Pour se reconstruire et assurer un avenir à ses habitants,
l’Ituri doit disposer d’un cadre de gestion transparent
et équitable de ses ressources. L’histoire récente
du district comme celle du Congo en général n’invite
guère à l’optimisme dans ce domaine. Même si la
situation n’est plus aussi critique qu’il y a quelques
années lorsque la gestion des douanes, l’exploitation
de l’or, du bois ou du café étaient de facto tombées
sous le contrôle des groupes armés, il est encore trop
tôt pour conclure à un retour à la normale, en particulier
du fait de l’implication des FARDC dans de
nombreux trafics et plus généralement de la faiblesse
de l’État dans la région.
Alors que le dossier de l’exploitation du pétrole du lac
Albert crée de nouvelles attentes et risque d’envenimer
rapidement la question du partage des ressources
de la région, que ce soit avec la capitale Kinshasa ou
entre originaires et non originaires et Ituriens euxmêmes,
il apparaît nécessaire d’ouvrir, dès à présent,
un débat sur la gestion de cette manne pétrolière et
plus généralement de l’ensemble des ressources naturelles,
si l’on veut qu’elles contribuent au redécollage
économique et non à l’apparition de nouveaux foyers
de violence dans la région.
A. LES DOUANES, LE BOIS ET L’OR
L’Ituri était pendant des années l’un des exemples les
plus criants du pillage des ressources naturelles de la
RDC.66 De 1999 à 2003, le pillage a été généralisé,
que ce soit dans les secteurs du bois,67 du café68 ou de
66 Rapport final du groupe d’experts sur l’exploitation illégale
des ressources naturelles et autres formes de richesses
de la République démocratique du Congo, Conseil de
sécurité, 16 octobre 2002, UN S/2002/1146, paras. 97 à 138.
67 La RDC exporte chaque année près de 50 000 m³ de bois
qui proviennent à 80 pour cent des forêts de l’Ituri, situées
dans le territoire de Mambasa et, dans une moindre mesure,
dans le territoire d’Irumu. La plupart de la production provient
de Biakato, de Lwemab, de Teturi et de « km26 », un
carrefour d’exploitation situé sur la route Béni-Mambasa.
« Commerce du bois et réduction de la pauvreté », rapport
de Forest Monitor, juin 2007, p. 18.
68 Les plantations de café dans le territoire de Mahagi ont
été saccagées par les groupes armés. En 2003, l’entreprise
commercialisant le café local a été détruite et les groupes
armés ont du vendre leur produit à des opérateurs économiques
ougandais, sur la base de tarifs imposés par les
groupes armés. Entretiens de Crisis Group, opérateurs économiques,
Bunia, mars 2008.
l’or.69 L’armée ougandaise, l’Armée Populaire Congolaise
(APC) de Mbusa Nyamwisi puis les différents groupes
armés de l’Ituri contrôlaient les principaux sites miniers
ainsi que les services d’immigration et les postes douaniers.
70 Les groupes armés appliquaient le système du préfinancement,
qui consistait à obtenir d’un commerçant le
paiement direct d’une somme forfaitaire en l’échange
d’une exception des droits de douane dus à l’État. Selon
le panel d’experts des Nations unies, en 2004 les recettes
douanières déclarées officiellement en Ituri ne dépassaient
pas les $14 000.71
1. Trafics aux frontières et exploitation
sauvage des forêts
Suite à la reprise par les autorités congolaises du contrôle
de l’ensemble des postes douaniers et des principales zones
d’exploitation aurifères et forestières, la situation s’est
quelque peu améliorée. Au niveau des douanes, l’évolution
a été lente car les agents mis en place par les milices sont
restés longtemps en place et certains ont continué à aider
financièrement ces milices après leur perte de contrôle de
la zone. D’autres ont simplement poursuivi les détournements
à des fins d’enrichissement personnel, en liaison
avec certains réseaux d’import-export présents localement.72
En 2007, le gouverneur a procédé à d’importants changements
au sein des services des douanes à Aru. Une commission
d’enquête spéciale de l’Assemblée provinciale
s’est rendue en Ituri en avril 2007 afin d’enquêter sur les
pratiques de la Direction générale des recettes administratives
domaniales, judiciaires et de participation (DGRAD),
69 Les concessions aurifères de l’Ituri appartiennent à l’Office
des mines d’or de Kilomoto (OKIMO) qui détient au total, dans
la Province Orientale, des droits exclusifs sur près de 83 000
km². En Ituri, l’OKIMO contrôle la concession 39 qui englobe
Aru, Faradje et Mahagi, autour de Djalasiga et la concession 40
qui comprend les mines d’Adidi et de Makala, autour de
Mongwalu. Sur le pillage de l’or de l’Ituri pendant la guerre, voir
« Ituri : couvert de sang », Human Rights Watch, op. cit., pp. 13-
14 ; et Jeroen Cuvelier et Stefaan Marysse, « Les enjeux
économiques du conflit en Ituri », l’Afrique des Grands Lacs,
Annuaire 2003-2004, pp. 183 à 190.
70 Rapport du groupe d’experts créé par la résolution 1533 (2004)
concernant la République démocratique du Congo, Conseil de
sécurité, 25 janvier 2005, UN S/2005/30, paras. 116 à 126.
71 Rapport du groupe d’experts créé par la résolution 1533 (2004)
concernant la République démocratique du Congo, Conseil de
sécurité, 27 janvier 2006, UN S/2006/53, para. 51.
72 Pour les dix premiers mois de l’année 2005, les recettes
douanières déclarées officiellement en Ituri avaient plus que
doublé par rapport à 2004. Elles restaient toujours inférieures à
$30 000 et ne représentaient probablement pas plus de 10 pour
cent des recettes fiscales effectivement collectées au niveau des
six postes douaniers du district. Rapport du groupe d’experts créé
par la résolution 1533 (2004) concernant la République démocratique
du Congo, ibid, para 51.
Congo: quatre priorités pour une paix durable en Ituri
Rapport Afrique de Crisis Group N°140, 13 mai 2008 Page 14
de l’Office congolais de douanes et d’accise (OFIDA)
et de la Direction générale des impôts (DGI) locale.73
Suite à ces enquêtes, l’Assemblée provinciale a conclu
à l’existence de fraudes massives et recommandé
plusieurs suspensions, rotations et poursuites pénales.74
La situation est cependant encore loin d’être satisfaisante
: Les changements intervenus au niveau des
douanes n’ont pas permis de mettre un terme à la corruption
ni d’en finir avec la sortie illégale des matières
premières du district.75 Le niveau élevé des taxes
légales et la présence à la frontière de services de collecte
qui n’ont pas vocation à s’y trouver n’incite
guère les opérateurs à opérer dans la légalité.76 Une part
importante des revenus douaniers échappe toujours
au contrôle de l’État congolais. En dépit de quelques
changements intervenus récemment à l’OFIDA, la
fraude perdure et seuls les bénéficiaires semblent avoir
changé. Depuis plusieurs mois, l’OFIDA est sous le
contrôle direct d’un nouveau réseau mis en place par le
gouverneur Autsai lui-même et dans lequel on retrouve
principalement des Lugbara y compris le propre fils du
gouverneur nommé récemment comme responsable de
l’OFIDA à Aru.77 La mise en place d’un mécanisme
crédible de contrôle de l’activité des douanes au niveau
décentralisé s’avère ainsi plus que jamais indispensable.
Dans le secteur du bois, le moratoire de 2002 sur
l’attribution de concessions forestières n’est pas respecté
et aucune politique de reboisement n’est en place.78
73 Rapport de mission de contrôle économique et financier
dans le district de l’Ituri du 18 avril au 12 mai 2007, Assemblée
provinciale de la Province Orientale.
74 Sans attendre les résultats de cette commission, le gouverneur
Autsai avait obtenu le remplacement à la tête de la
DGRAD de Bunia de Vianney Malipta par Mawa Leneki.
75 Selon le rapport du groupe d’experts des Nations unies,
jusqu’en 2006, le leader du FNI, Peter Udaga, alias Peter
Karim, a fait sortir illégalement vers l’Ouganda de grandes
quantité de bois et de café en l’échange d’armes et de munitions.
Les douaniers n’osaient pas intercepter les chargements
par crainte de représailles. Ces activités étaient préfinancées
par des hommes d’affaires ougandais, notamment
un militaire et entrepreneur de bois ougandais à Paidha,
répondant lui aussi au nom de Peter Karim. Rapport du
groupe d’experts créé par la résolution 1533 (2004) concernant
la République démocratique du Congo, Conseil de
sécurité, 18 juillet 2006, UN S/2006/525, paras. 179 à 182.
76 Le décret présidentiel du 28 mars 2002 n’autorise en
théorie que l’OFIDA, l’OCC, la DGM et les services de
santé à être présents à la frontière. En pratique, cependant, la
DGRAD, la DGI collectent également des taxes à ce niveau.
77 Entretiens de Crisis Group, opérateurs économiques et
responsables politiques, Bunia, mars 2008.
78 Des autorisations d’exploitation auraient été données à des
nationaux qui travailleraient pour le compte d’hommes
d’affaires ougandais, kenyans ou soudanais dans le secteur du
Les militaires ont pris le relais des miliciens dans le commerce
illégal du bois dans les territoires de Mahagi et
Aru79 et l’État ne tire pratiquement aucun bénéfice de ces
exportations.80 Selon l’ONG Pax Christi, sur les 102
exploitations forestières créées depuis 2002 en Ituri, une
trentaine à peine seraient officiellement déclarées. Au
total, 175 000 m3 de bois auraient été exportés de Mambasa
en 2007.81 Ces derniers continuent de vendre des
milliers d’hectares de forêts à des exploitants forestiers,
pour des prix dérisoires82 et en violation du code forestier,
souvent avec la complicité des services de l’Etat.
L’emploi créé sur place et les retombées au profit des
communautés locales, notamment les communautés Mbuti
qui sont employées pour l’abattage, restent extrêmement
limités.83 Une reprise en main intégrale du secteur
forestier s’avère ainsi plus que jamais urgente. L’autorité
provinciale et le Parlement national doivent s’engager à
faire respecter le code forestier ainsi que le moratoire sur
l’attribution des concessions. Le compte bancaire ouvert à
Beni doit être fermé afin de renforcer la transparence
dans la gestion des sommes collectées et une commission
d’enquête doit être mise sur pied afin de démanteler le
réseau mafieux impliquant des nationaux civils et militaires
ainsi que des étrangers qui contrôle actuellement
l’exploitation du bois en Ituri.
2. Exploitation aurifère anarchique
En ce qui concerne la gestion des concessions minières de
l’Office des mines d’or de Kilomoto (OKIMO), trois
bois, à l’ouest du territoire de Aru, dans les collectivités de Kaliko
et Ndo. Des éléments de la DMIAP seraient également impliqués
dans du trafic de bois dans la région d’Aru, au niveau des localités
de Rumu, Rogale, Pabiri et Vis-à-Vis. Des camions traverseraient
la frontière la nuit incognito grâce à leur complicité. Ibid.
79 Dans le territoire de Mahagi par exemple, le bois sort en fraude
la nuit par les petits postes frontières de Rona, Simbi, Pono, Sisi,
Boda et Kudikoka, le plus souvent pour le compte de militaires
FARDC en relations d’affaires avec des hommes d’affaires
ougandais ou kenyans. Entretiens de Crisis Group, commerçants
locaux, Mahagi, mars 2008.
80 Comme le souligne le rapport de l’Assemblée provinciale de la
Province Orientale en 2007, le fait que le compte bancaire sur
lequel transitent les taxes générées par l’activité forestière dans le
territoire de Mambasa soit localisé à Beni, dans la province du
Nord Kivu, rend pratiquement impossible tout contrôle de l’usage
de ces ressources par le district de l’Ituri ou l’administration de la
Province Orientale, basée à Kisangani. Entretiens de Crisis
Group, députés provinciaux, Bunia, mars 2008.
81 « Les chefs coutumiers de l’Ituri bradent les forêts contre
quelques cadeaux », Le Potentiel, mars 2008.
82 Plusieurs cas ont été signalés où des chefs coutumiers avaient
cédé des concessions de 100 hectares en l’échange de deux chèvres
ou d’une vache et de $100, entretiens de Crisis Group, opérateurs
économiques et agents administratifs, Bunia, mars 2008.
83 « Commerce du bois », op. cit.
Congo: quatre priorités pour une paix durable en Ituri
Rapport Afrique de Crisis Group N°140, 13 mai 2008 Page 15
problèmes importants demeurent. Comme l’a constaté
la commission Lutundula,84 puis la commission
gouvernementale chargée de la revision des contrats
miniers mis en place le 20 avril 2007, les investissements
promis par les compagnies entrées en partenariat
avec OKIMO ont été réalisés avec retard. De
plus, les contrats signés par OKIMO ont généralement
sous-estimé la valeur du capital apporté par la
partie congolaise. La relance de l’activité minière en
Ituri risque ainsi de ne pas profiter suffisamment à
l’État congolais, le privant des moyens financiers
nécessaires à la reconstruction et au développement
de la région.
À partir de 2003, OKIMO, qui était en quasi faillite,85
a tenté de se renflouer en signant plusieurs contrats
d’amodiation avec des groupes miniers industriels
comme Mwana Africa PLC86 et la joint venture Orgaman87/
Moto Goldmines Ltd88 ainsi que des contrats
84 Rapport de la commission spéciale de l’Assemblée nationale
chargée de l’examen de la validité des conventions à
caractère économique et financier conclues pendant les
guerres de 1996-1997 et de 1998, pp. 196-200.
85 Créé à l’époque coloniale, OKIMO possédait trois mines
souterraines et une usine de traitement à Mongbwalu. Suite
à la guerre, l’usine a été détruite et les mines, occupées par
les exploitants artisanaux.
86 Mwana Africa est un consortium enregistré au Royaume
Uni et qui regroupe des hommes d’affaires du Zimbabwe, de
la RDC, de la Zambie, du Kenya, du Ghana et de l’Afrique
du Sud. Mwana Africa opère principalement dans le secteur
minier au Zimbabwe, en RDC et au Ghana. L’entreprise a
été fondée en 2003 et est dirigée par M. Kalaa Mpinga de la
RDC. Elle s’est installée en 2006 à Nzani dans le territoire
de Mahagi. Pour plus de détails, voir le site internet de la
compagnie, www.mwanaafrica.com.
87 Le groupe Orgaman (Organisation, Participation et Management)
est une entreprise fondée en 1931 par la famille belge
Damseaux et spécialisée à l’origine dans la distribution agroalimentaire.
Le groupe est présent dans le secteur du transport,
de l’élevage, de l’agriculture et de l’immobilier. Dans
le secteur minier, il s’est associé avec OKIMO dès 1987. En
2003, Orgaman crée une nouvelle société, Borgakim, qui
elle-même met en place plusieurs filiales, en partenariat avec
la société australo-canadienne Moto Goldmines et s’engage
dans la prospection de plusieurs gisements sur la base de
contrats d’amodiation avec OKIMO. Le 31 décembre 2007,
Orgaman a cédé ses parts dans les joints ventures créées avec
Moto Goldmines. “Moto Goldmines Acquires Additional
Interest in the Moto Gold Project and Completes Placement
to Sam Jonah”, communiqué de presse de Perth Western
Australia, 31 janvier 2008. disponible sur www.motogold
mines.com/aurora/assets/user_content/File/Moto%20Announce
ment%20-%2031%20January%202008%20-20additional%20
interest.pdf.
88 Moto Goldmines est une compagnie australo-canadienne
opérant principalement en Australie et en RDC. Elle est
dirigée par Sir Sam Jonah, un ancien PDG d’Anglo Ashanti
de sous-traitances avec des comptoirs pour l’exploitation
des lits des rivières de la région. Enfin, Anglo Ashanti
Goldfied (AGA) a lancé des opérations d’exploration sur
le site de Mongwalu.89 Suite aux enquêtes de Human Rights
Watch90 et du rapport du panel d’experts pour l’embargo
sur les armes à destination de la RDC,91 les groupes miniers
industriels ont tenté de mettre en place des procédures
pour ne plus être accusés de financer indirectement les
auteurs de violations des droits humains sur le terrain,
qu’ils soient liés à des milices ou qu’ils appartiennent à
l’armée nationale. Ils ont également tenté d’associer davantage
les communautés de base à leurs activités et promis
de réaliser des infrastructures à leur profit (routes, écoles,
centres de santé).92
En 2006, au terme d’une dure bataille entre le directeur
d’OKIMO et la joint venture Orgaman/Moto Goldmines
Ltd, plusieurs contrats d’amodiation passés par le biais de
ses filiales et manifestement défavorables à OKIMO ont
Goldfield. Elle comprend notamment au sein de son conseil
d’administration, M. Louis Watum ainsi que l’ancien secrétaire
d’état américain pour les Affaires africaines de 2001 à 2003,
Walter Kansteiner, qui occupe un siège d’administrateur consultant.
Pour plus de détails, voir le site internet de la compagnie,
www.motogoldmines.com/ board _of_directors.9.html.
89 En 1996, Ashanti Goldfields a hérité d’un contrat d’amodiation
conclu en 1991 entre OKIMO et l’entreprise Kilomoto
Mining International (KIMIN) et portant sur 2 000 km² au niveau
de la concession 40 près de Mongwalu. Ashanti a perdu ses droits
en 1997 après l’arrivée au pouvoir à Kinshasa de Laurent Désiré
Kabila. Ce dernier les lui a toutefois restitués en novembre 1999
et une convention de plein droit a été signée le 23 juin 2000 entre
OKIMO et Ashanti Goldfield qui a fait passer la part d’OKIMO
dans le capital social de la joint-venture de 51 pour cent à 13,78
pour cent, contre 86,22 pour cent pour Anglo Ashanti Goldfield.
En septembre 2001, un avenant à la convention est venu étendre
les droits d’Ashanti Goldfield sur la concession 40, le contrat
portant désormais sur plus de 8 000 km². Dans son rapport de
juin 2005, la Commission Lutundula avait estimé que la convention
liant OKIMO et Ashanti Goldfields, devenu entre temps
Anglo Gold Ashanti, était excessivement défavorable aux intérêts
de l’État congolais et devait être renégociée en vue de
rééquilibrer le partenariat. Rapport de la commission spéciale de
l’Assemblée nationale chargée de l’examen de la validité des
conventions à caractère économique et financier conclues pendant
les guerres de 1996-1997 et de 1998, pp. 196-200.
90 « Le fléau de l’Or », Human Rights Watch, juin 2005.
91 Rapport du groupe d’experts, 25 janvier 2005, op. cit., paras.
131 à 134.
92 Les 28-29 avril 2007, AngloGold Ashanti (AGA) a organisé à
Mongwalu une rencontre avec la société civile, les mineurs artisanaux,
des ONGs internationales. Lors de cette réunion AGA
s’est engagée à lancer une étude sur l’avenir des mineurs artisanaux.
De son côté, une des filiales de Moto Goldmines/Orgaman,
Borgakim, a engagé en avril 2007 les travaux de réfection sur les
180km qui séparent Watsa de Aru et annoncé vouloir consacrer
près de $100 millions à des investissements dans le secteur
social.
Congo: quatre priorités pour une paix durable en Ituri
Rapport Afrique de Crisis Group N°140, 13 mai 2008 Page 16
été annulés ou modifiés.93 Le 29 mars 2007, le
Comité des sanctions du Conseil de sécurité a ajouté
à la liste d’interdictions de voyager et du gel des
avoirs le docteur Kisoni ainsi que quatre entités
impliquées dans le soutien aux groupes armés soumis
à des sanctions.94 Enfin, en avril 2007, un cadre de
concertation de la société civile de l’Ituri sur les
industries extractives a été mis en place.
Dans ses conclusions rendues publiques le 20 mars
2008, la commission de revisitation des contrats miniers
a demandé au gouvernement d’ouvrir des négociations
avec les trois principaux partenaires d’OKIMO
– Anglo Ashanti Goldfield (AAG), la joint-venture
Moto Goldmines/Orgaman et Mwana Africa en vue
d’obtenir des changements substantiels dans les contrats
de partenariat.95 La recommandation la plus
93 En novembre 2006, la joint venture Moto Goldmines/
Orgaman et OKIMO ont ainsi signé un accord portant annulation
des contrats d’amodiation signés avec ses filiales Amani
Gold et Tangold et modifiant celui conclu avec sa filiale
Rambi Mining. La commission gouvernementale chargée de
la revisitation des contrats miniers a, de son côté, demandé
la résiliation pure et simple des trois contrats ainsi que le
paiement des arriérés des loyers d’amodiation et le paiement
des droits superficiaires dus depuis 2003. Voir le rapport de
la commission de revisitation des contrats miniers tome 1, p.
162, disponible sur le site du ministère des mines de la
RDC, www.miningcongo.cd/pdf/TOME%201%20 RAPPORT
%20CRCM%20VERSION%20FINALE%20270208%20&
_héè.pdf
94 Sont visés par les mesures imposées aux paragraphes 13
et 15 de la résolution 1596 (2005), Kambale Kisoni et sa
compagnie aérienne Butembo Airlines ainsi que les entreprises
Uganda Commercial IMPEX, MACHANGA et le
comptoir spécialisé dans l’or localisé à Butembo, Congocom
Trading House. Kisoni a été assassiné le 5 juillet 2007
à Butembo et de ce fait retiré de la liste. Un autre homme
d’affaire de l’Ituri, Dieudonné Ozia Mazio président de la
Fédération des entreprises du Congo en territoire d’Aru
figure sur la liste du Comité des sanctions pour son implication
dans des activités de contrebande, au profit notamment
au FAPC. En 2005, le groupe d’experts avait constaté que
Kambale Kisoni et Ozia Mazio exportaient illégalement
tous les dix jours en direction de Kampala, respectivement
50kg et 15 à 20kg d’or. Rapport du groupe d’experts créé
par la résolution 1533 (2004) concernant la République
démocratique du Congo, Conseil de sécurité, 26 juillet 2005,
UN S/2005/436, para. 80.
95 La commission gouvernementale en charge de la révision
des contrats miniers a notamment demandé au gouvernement
qu’il obtienne de ces trois partenaires une renégociation
du loyer d’amodiation, la régularisation du paiement des
droits superficiaires dus depuis la signature du contrat, l’enregistrement
des coordonnées géographiques précises des
gisements, un chronogramme d’exécution des travaux et la
transmission des études de faisabilité prévues par le code
minier. Ces études doivent permettre d’évaluer avec précilourde
de conséquences pour l’Ituri porte notamment sur
la demande de révision du partenariat entre OKIMO et
AAG, Anglogold Kilo (AGK). La commission propose
en effet de faire passer les parts sociales d’OKIMO dans
AGK de 13,78 pour cent à 45 pour cent et d’obtenir
qu’AGK rétrocède à OKIMO 6 040 km² de concession.
Le second problème a trait à l’anarchie qui semble perdurer
dans le domaine de l’exploitation aurifère. À côtés
des grands contrats, les autorités de Kinshasa ont accordé,
dans l’opacité la plus totale, des permis d’exploitation à
quelques opérateurs de taille plus modeste. Ceux-ci semblent
disposer des passe-droits nécessaires pour sortir l’or
récupéré directement par petit porteur en direction de la
Tanzanie, sans avoir à passer par aucun régime de déclaration
et de taxation au niveau des services de l’État. Sur
le terrain, des rumeurs persistantes indiquent que de nombreux
opérateurs miniers qui, pour l’heure, ne sont en
théorie qu’en phase d’exploration, auraient également
déjà sorti de l’or par avion en direction de la Tanzanie grâce
à des passe-droits fournis par la présidence à Kinshasa.96
Un ultime problème toujours en suspens est le sort
réservé aux mineurs artisanaux dans le district. On ne
compte pas moins de 100 000 mineurs artisanaux en Ituri,
pour la plupart orpailleurs, qui ont envahi la concession
40 de l’OKIMO depuis des années. Il est urgent non
seulement d’améliorer leurs conditions de travail,97 mais
aussi de préparer le reclassement de ceux qui vont devoir
quitter les concessions attribuées à des opérateurs industriels.
En l’absence d’action dans ce domaine, on ne peut
exclure que les mineurs artisanaux organisent des manifestations
violentes, d’eux-mêmes ou à l’instigation
sion les apports réels de chaque partie en cas de création de
nouvelles joint-ventures afin de répartir équitablement les parts
sociales. La commission demande également que les partenaires
d’OKIMO s’acquittent du paiement de Royalties et de pas-deporte
en cas de création de la joint-venture. S’agissant du Contrat
d’Assistance Technique et Financière signé le 30 décembre 2003
entre la filiale de Moto Goldmines/Orgaman, Borgakim Mining
et OKIMO, la commission demande à Borgakim de respecter ses
engagements en matière de réhabilitation des infrastructure
minières, métallurgiques et énergétiques. Elle souhaite aussi que
le contrat de service soit séparé du contrat d’amodiation et que la
situation de la dette de OKIMO envers Borgakim soit rapidement
clarifiée. Voir le rapport de la commission de revisitation des
contrats miniers, tome 1, p. 94 à 167, disponible sur le site du
ministère des mines de la RDC, www.miningcongo.cd/pdf/TOME
%201%20RAPPORT%20CRCM%20VERSION%20FINALE%
20270208%20&_héè.pdf.
96 Entretiens de Crisis Group, opérateurs économiques et agents
des services administratifs, Bunia, mars 2008.
97 En novembre 2007, la mine d’Adidi dans laquelle travaillaient
près de 15 000 mineurs artisanaux et qui menaçait de s’effondrer
a été fermée sur décision du district.
Congo: quatre priorités pour une paix durable en Ituri
Rapport Afrique de Crisis Group N°140, 13 mai 2008 Page 17
d’hommes politiques locaux, comme c’est déjà le cas
pour les mineurs artisanaux du Katanga. Ces révoltes
pourraient avoir des conséquences beaucoup plus
graves que celles déjà observées à Kolwezi ou à
Likasi.98 On ne peut exclure que des tensions éclatent
également entre mineurs artisanaux eux-mêmes alors
que se développe dans le district un discours de plus
en plus hostile à l’emploi dans les entreprises de l’Ituri
des ressortissants d’autres provinces. Ce discours
vise particulièrement les Nande, qui sont très présents
dans le secteur de l’or et le commerce.99
Sans attendre que ce débat ne s’envenime un peu plus
lors les élections locales ni que la MONUC ne retire
ses troupes de la zone de Mongwalu,100 il est souhaitable
que préparer un plan de reconversion au profit
des mineurs artisanaux parmi lesquels on trouve de
nombreux ex-miliciens dont on peut craindre les
réactions à moyen terme en cas d’opération de déguerpissement
par la force. Plus généralement, dans le
domaine minier, les agents de l’État doivent pouvoir
perquisitionner les dépôts et aéronefs utilisés par les
compagnies en phase d’exploration pour limiter les
risques de sorties illégales de matières premières.
L’Assemblée provinciale et nationale doivent exiger
la publication des contrats liant l’État congolais à
tous les opérateurs miniers et obtenir des clarifications
sur les taxes versées à l’État congolais. Enfin, le
gouvernement et les partenaires étrangers doivent
travailler, en concertation avec les pays frontaliers, à
la mise en place d’un mécanisme de certification et
traçabilité des matières premières sortant par l’Ituri
afin de savoir d’où viennent les produits.
98 Les 25-26 juin et le 27 septembre 2007, plusieurs centaines
de creuseurs artisanaux ont manifesté à Kolwezi afin de
s’opposer à leur éviction des concessions minières cédées
aux entreprises Anvil Mining et Chemaf. En septembre, les
manifestations ont dégénéré en affrontements ouverts avec
la police, faisant deux morts du côté des creuseurs et plus
d’une dizaine de blessés, côté policier. Le 6 mars 2008, des
milliers de mineurs artisanaux ont affronté la police à Likasi
pour s’opposer à des mesures d’éviction de la mine de Kamatanda
qui pourrait être confiée à une entreprise chinoise. Les
affrontements ont fait un mort et trente-deux blessés. « Kolwezi
: affrontements sanglants entre creuseurs et policiers »,
Radio Okapi, 27 septembre 2007, à www.radio okapi.net. ;
et « Katanga (RDC) : violents heurts entre police et mineurs
(ONU) », Agence France-Presse, 7 mars 2008.
99 Entretiens Crisis Group, hommes d’affaires Nande et
intellectuels Ituriens, Bunia, mars 2008.
100 Entretien de Crisis Group, cadres de la MONUC,
Kinshasa, février 2008.
B. NOUVELLES TENSIONS ENTRE KAMPALA
ET KINSHASA POUR LE PETROLE DU LAC
ALBERT
La mise en exploitation annoncée du pétrole du lac Albert
suscite également des inquiétudes pour l’avenir de la
province. Le problème se situe à deux niveaux : sur le
plan régional et sur le plan purement local avec des
risques pour la stabilité de l’Ituri. Au niveau régional, le
pétrole du lac Albert101 constitue depuis des dizaines
d’années la toile de fond des relations entre l’Ouganda et
la RDC en Ituri.102 Pendant la guerre, Kampala a multiplié
les revirements d’alliance avec les groupes armés locaux
sur la base d’une triple préoccupation : tenir Kigali à l’écart,
limiter l’influence de Kinshasa et sécuriser les opérations
menées par Heritage Oil et Tullow Oil, les partenaires
choisis par Kampala pour mener l’exploration.103
À partir de 2002 et le rapprochement opéré entre Kampala
et Kinshasa, Heritage Oil a engagé des discussions avec
la présidence congolaise en vue d’obtenir des permis
d’exploration en Ituri. Le 2 juin 2002, Heritage Oil signe
avec le gouvernement congolais un protocole d’accord
pour le développement de la production potentielle de
pétrole dans la vallée de la Semiliki, pour une superficie
de 30 000 km². Après que Heritage Oil a décidé de
s’associer avec Tullow Oil pour l’exploration des blocs
sur le lac Albert, des négociations ont été ouvertes à
Kinshasa avec cette compagnie. Elles ont abouti, en
juillet 2006, à la signature entre le gouvernement
101 La zone d’exploration pétrolière sur le lac Albert est divisée
en cinq blocs dont trois côté ougandais, les blocs 1, 2 et 3A et
deux côté congolais, les blocs I et II. En 1987, côté congolais, la
zone située au sud du lac avaient été explorée par AMOCO mais
les premiers sondages sur ces blocs dits III et IV s’étaient révélés
décevants et la campagne d’exploration avait été rapidement
arrêtée. Jeroen Cuvelier, Stefaan Marysse, « Les enjeux économiques
du conflit en Ituri », L’Afrique des Grands Lacs,
Annuaire 2003-2004, p. 196.
102 Dominique Johnson, « Les sables mouvants : l’exploration du
pétrole dans le Graben et le conflit congolais », rapport de Pole
Institute, Goma, 13 mars 2003.
103 Heritage Oil est une entreprise côtée aux bourses de Londres
et de Toronto. Fondée en 1992, par son actuel PDG, Tony
Buckingham, elle est présente en Ouganda depuis 1997. Heritage
a commencé ses premiers forages côté ougandais en 2002 en
partenariat avec la compagnie sud-africaine Energy Africa, avec
laquelle elle a monté la filiale Eagle Drill. À partir de 2005,
Heritage Oil s’est associée à Tullow Oil, une entreprise irlandaise
qui possède le savoir faire technique en matière de sondage de
nappes pétrolières. Tullow Oil est l’opérateur sur les blocs 1 et
A3 pour lesquels elle détient 50 pour cent des parts des permis
d’exploration, à égalité avec Heritage Oil. Tullow Oil détient 100
pour cent du permis d’exploration du bloc 2 pour lequel elle est
l’opérateur. Entretiens de Crisis Group, Heritage Oil, Kampala,
mars 2008.
Congo: quatre priorités pour une paix durable en Ituri
Rapport Afrique de Crisis Group N°140, 13 mai 2008 Page 18
congolais et Tullow Oil d’un contrat de partage de
production sur les blocs I et II.104
Toutefois, avec la fin de la transition et l’imminence
d’une mise en exploitation des réserves côté ougandais,
le dossier pétrole du lac Albert est redevenu une
source de tensions entre Kinshasa et Kampala. La
question de la délimitation frontalière, dont dépend la
répartition des profits escomptés de l’exploitation
pétrolière sur le lac Albert, n’ayant jamais été réglée,
plusieurs incidents violents ont eu lieu entre juillet et
septembre 2007, au niveau des barges de Heritage
Oil et de l’île lacustre de Rukwanzi.105 Suite à ces
incidents, les deux pays ont multiplié les consultations,
signé le 8 septembre 2007 l’accord de Ngurdoto,
106 mis en place une commission permanente con-
104 L’accord prévoit un partage des profits tirés de la production
sur les blocs I et II du côté congolais selon la clé de
répartition suivante : 48.5 pour cent pour Tullow Oil, 39,5
pour cent pour Heritage Oil et 12 pour cent pour la société
d’état congolaise des hydrocarbures, COHYDRO. Ibid.
105 Le 29 juillet 2007, un premier incident frontalier est survenu
au niveau du lac Albert lorsque quatre soldats de
l’armée ougandaise (UPDF) ont été interceptés par l’armée
congolaise après avoir navigué plusieurs heures dans les
eaux territoriales congolaises. Les quatre soldats ougandais
ont été faits prisonniers avant d’être finalement libérés le 6
août 2007. Le 3 août 2007, un incident entre les FARDC et
l’armée ougandaise à la frontière des deux pays sur le lac
Albert a causé la mort d’un officier FARDC et d’un
ingénieur britannique de Heritage Oil. Enfin, le 24 septembre,
l’UDPF a ouvert le feu sur une embarcation occupée par des
Congolais, tuant six personnes et en blessant cinq autres.
Voir notamment Marie France Cros, « Congo-Ouganda :
nouvel incident frontalier meurtrier », La Libre Belgique, 26
septembre 2007.
106 Dans le domaine de la défense et de la sécurité, l’accord de
Ngurdoto prévoit : la mise en place d’officier de liaison entre
les armées des deux pays afin d’éviter les incidents frontaliers ;
la création d’une commission conjointe de vérification de la
démilitarisation de l’île de Rukwanzi, la mise en place d’une
équipe de surveillance conjointe et d’une administration conjointe
locale provisoire sur l’île ; la mise sur pied d’un commission
ad hoc chargée de la reconstitution de la frontière ; et
la création d’un comité chargé des questions d’immigration.
Les deux pays se sont également engagés à parachever le
désarmement et le rapatriement des forces négatives présentes
sur leur territoire et l’éloignement des camps de réfugiés
à plus de 150km de la frontière et leur sensibilisation en
vue de leur retour dans le cadre d’un accord tripartite avec le
UNHCR. L’accord envisage aussi la normalisation des relations
diplomatiques et un échange d’ambassadeurs en 2008
ainsi que la mise en place d’une commission chargée d’étudier
les modalités pratiques de l’exécution de la décision
rendue le 19 décembre 2005 par la Cour internationale de
justice condamnant l’Ouganda à réparer les conséquences de
son invasion de la RDC. Voir le communiqué conjoint sur la
jointe destinée à faire baisser la tension.107 Avec l’aide des
anciennes puissances coloniales, la Belgique et le Royaume
Uni, signataires de la convention frontalière de 1915, les
deux pays ont créé une commission mixte chargée de la
reconstitution de la frontière commune. Cette commission
a débuté ses travaux le 15 mars 2008.
Pour autant, la question du balisage dans les eaux du lac
Albert et aux embouchures de la rivière Semiliki est
encore loin d’être réglée. Elle pourrait déboucher sur de
nouvelles tensions dans les mois à venir au cas où les deux
pays ne parviendraient pas à se mettre d’accord sur le
tracé de leur frontière commune, sur l’avenir de l’île de
Rukwanzi et sur la mise en place d’une « zone d’intérêts
communs » pour l’exploitation du pétrole. Or, sur ce
dernier point, le compromis annoncé lors de la signature
de l’accord de Ngurdoto108 et confirmé à Kampala le 25 janvier
2008 est encore, en réalité, incertain, notamment en
raison des incertitudes qui pèsent encore sur les contrats
passés entre Kinshasa, Tullow Oil et Heritage Oil.
La question de la délimitation frontalière et du partage de
l’île de Rukwanzi posent également problème. Pour les
chefs de collectivité côté congolais, cette question est sans
fondement car le tracé de la frontière est connu depuis
toujours. Pour eux, 30 à 40 pour cent de la superficie de
l’île de Rukwanzi se trouve du côté congolais. Le débat
actuel s’explique seulement par le fait que le lit de la rivière
Semiliki, qui avait été choisi par les colonisateurs comme
point de repère pour le tracé de la frontière, s’est déplacé
depuis 1914. Il passait autrefois par Kianza et Riarahobo
et se trouve aujourd’hui 3,5km plus à l’ouest, côté congolais.
109 Depuis l’époque coloniale, l’île était interdite à
l’habitation permanente, mais à partir des années 1990, une
population de marginaux s’y est progressivement installée
rencontre de Ngurdoto disponible à l’adresse http://congoplanet.
net/download/arusha 080907.pdf.
107 Le 9 octobre 2007, les deux pays ont mis sur pied trois commissions
conjointes, l’une militaire, l’autre sécuritaire et la troisième
économique. Les commissions se réunissent depuis lors tous les
deux mois. Entretiens de Crisis Group, MONUC, Bunia, mars 2008.
108 L’accord de Ngurdoto prévoit à son article 4 une gestion
concertée du commerce transfrontalier des produits miniers et du
pétrole entre les deux pays. Lors de rencontre de Kampala, le 28
janvier 2008, les deux pays ont signé un avenant portant modification
de l’accord de coopération en matière d’hydrocarbure datant
de 1990 et prévoyant la mise en place d’un groupe d’experts
chargé de l’évaluation de l’état de l’exploration pétrolière sur le
lac Albert. Ils ont notamment convenu de la désignation d’un
expert du ministère des hydrocarbures auprès de l’ambassade de
la RDC à Kampala, chargé de suivre les activités d’exploitation
dans la partie ougandaise. « Hydrocarbures : La RDC et l’Ouganda
s’accordent sur la revisitation de l’accord de coopération signé en
1990 », Digital Congo.net, 5 février 2008.
109 Entretien de Crisis Group, cadres Bahema Sud, Kampala,
novembre 2007.
Congo: quatre priorités pour une paix durable en Ituri
Rapport Afrique de Crisis Group N°140, 13 mai 2008 Page 19
et a commencé à s’y livrer à la pêche et au petit commerce,
en dehors de tout contrôle de l’État ougandais
ou congolais.
Depuis 2005 cependant les services de l’État de la
RDC et de l’Ouganda se sont progressivement réimplantés.
Suite à l’accord de Ngurdoto du 8 septembre
2007, la RDC et l’Ouganda ont décidé de démilitariser
l’île et de l’administrer de manière concertée
: l’Ouganda et la RDC ont ainsi chacun redéployé
des policiers sur l’île et Kampala y a nommé un
administrateur tandis que Kinshasa devrait y nommer
prochainement aussi un co-administrateur.
Le règlement de cette question tarde à venir, car sur
le dossier du pétrole du lac Albert deux camps
s’affrontent à Kinshasa. Le premier souhaite que le
contrat préparé en 2006 par Tullow Oil soit confirmé et
honoré par la partie congolaise. C’était la ligne de
l’ancien conseiller spécial à la sécurité à la présidence,
Samba Kaputo. C’est toujours celle soutenue
par ses alliés politiques comme le ministre des Mines
et président du Mouvement Social pour le Renouveau,
Pierre Lumbi ou le sénateur MSR John Tibasima,
qui convoite le poste de gouverneur de la future
province de l’Ituri.110 Le ministère des Affaires étrangères,
Mbusa Nyamwisi, pour des raisons diplomatiques,
serait également sur cette ligne. Il s’agirait
de tenir compte des rapports de force entre les deux
pays et de ne pas rouvrir un dossier sensible.
Le second camp, dans lequel on retrouve le ministre
des Hydrocarbures, Lambert Mende, le ministre de
l’Intérieur Kalume Numbi et le gouverneur de la Province
Orientale Médard Autsai souhaite, au contraire,
que d’autres opérateurs que Heritage Oil et Tullow
Oil soient retenus pour exploiter le pétrole congolais.
Certains craignent qu’au cas où ces deux compagnies
seraient retenues par Kinshasa, elles privilégieraient
systématiquement leurs activités en Ouganda au
détriment de celles du Congo et renonceraient à construire
une raffinerie sur le territoire de la RDC. Lors
de leurs visites sur le terrain en décembre 2007, des
membres de la délégation congolaises ont à mot couvert
accusé Heritage Oil et Tullow Oil de s’apprêter à
exploiter le pétrole côté congolais à travers des
champs Kingfisher et Ngassa, situé côté ougandais.111
110 John Tibasima est un Hema sud, ex-RCD, rallié au MSR
lors des élections de 2006. Tibasima aurait gardé des liens
étroits avec la partie ougandaise, et en particulier avec le
ministre ougandais de la Défense, le général Krispas Kiongo,
un Kondjo de l’Ouganda qui suit de très près les affaires de
l’Ituri. Entretiens de Crisis Group, Bunia, mars 2008.
111 Ces craintes semblent toutefois avoir été dissipées côté
congolais, Tullow Oil ayant montré à la partie congolaise que
Certains, parmi lesquels le commissaire de district adjoint
de l’Ituri ont demandé à ce que Heritage Oil et Tullow
Oil s’abstiennent de toute mise en exploitation côté
ougandais avant le lancement de la campagne d’exploration
prévue côté congolais.112
Signe de ces tensions, le ministre des Hydrocarbures,
Mende, a ainsi annoncé le 17 octobre 2007, sans concertation
avec la compagnie irlandaise, l’annulation des droits
de Tullow Oil sur le bloc I et a exigé une modification
des termes du contrat de partage de production sur le bloc
II. En décembre 2007, le ministère congolais des Hydrocarbures
a proposé au président Kabila d’accorder le bloc
I à la compagnie franco-espagnole H-Oil. Cette décision,
jugée illégale par Tullow Oil, a toutefois été bloquée par
le premier camp et les pourparlers se poursuivent. Pour
l’heure, l’entreprise la mieux placée pour récupérer le
bloc I semble être la compagnie pétrolière sud-africaine
SaCOil.113 Le 7 février 2008, Mende a menacé de remettre
en cause les droits de Heritage Oil et Tullow Oil sur le
bloc II au cas où ces deux compagnies n’accepteraient
pas de signer un nouvel accord sur le partage des profits.
Ces revirements successifs et tiraillements internes à la
partie congolaise sur ce dossier pourraient avoir des
conséquences sur la stabilité de l’Ituri. Selon certaines
sources, l’une des clauses secrètes de l’accord de Ngurdoto
Mountain Lodge, près d’Arusha en Tanzanie, le 8 septembre
2007 stipulait justement que le statu quo favorable
à Heritage Oil et Tullow Oil ne serait pas remis en cause
et que l’île de Rukwanzi serait cédée à l’Ouganda. En cas
de remise en cause de ses intérêts, il est donc peu probable
que l’Ouganda reste sans réagir car le président Museveni
a fait de ce dossier une priorité nationale.114 D’ors et déjà,
ce qu’ils prenaient pour des tuyaux de pompage dirigés vers le
territoire congolais n’étaient que des câbles servant aux opérations
de prospection. Entretiens de Crisis Group, représentant du ministère
des Hydrocarbures, Bunia, mars 2008.
112 « Uganda, DR Congo Move Against Oil Curse », The Monitor,
17 décembre 2007.
113 La compagnie sud-africaine South Africa Congo Oil (SaCOil),
dans laquelle on retrouve Divine Inspiration Group a déjà acquis
trois permis d’exploration sur le côté ouest de la RDC en 2007.
Elle serait aussi la mieux placée pour emporter le bloc III . Africa
Energy Intelligence, no. 457, 6-19 février 2008 et no. 458, 20
février-4 mars 2008. Selon d’autres sources, Kinshasa souhaiterait
accorder le bloc I à New African Global Energy – New Age – la
junior contrôlée par le gouverneur de la province sud-africaine du
Gauteng, Tokyo Sexwale, et dirigée par Steve Lowden.
114 Le discours de l’Ouganda sur la question de l’Ituri reste ambigu.
Lors de la crise frontalière de juillet-août 2007, le ministre de la
Défense ougandais, Krispas Kiongo, avait laissé entendre que
l’UPDF n’hésiterait pas à intervenir en Ituri en cas de problème.
Lors du sommet de l’Union africaine au Ghana en juillet 2007, le
président Museveni avait rappelé que la Communauté Est Africaine
(CEA), en tant qu’espace swahiliphone avait vocation à
intégrer l’est de la RDC et que l’Ituri avait autrefois appartenu à
Congo: quatre priorités pour une paix durable en Ituri
Rapport Afrique de Crisis Group N°140, 13 mai 2008 Page 20
la partie ougandaise aurait décidé d’agir désormais de
manière unilatérale sur le dossier pétrolier et la question
de la construction de la raffinerie. On peut exclure
que de nouvelles tensions soient suscitées sur le terrain
par les camps en compétition sur ce dossier, notamment
lors des futures élections locales.115
Au niveau strictement local, le dossier du pétrole du
lac Albert risque de poser également plusieurs problèmes.
A l’image des autres ressources naturelles
comme l’or, et compte tenu des enjeux sus-mentionnés,
le dossier est géré dans la plus grande opacité.
Certes, en juillet 2007, le ministre des Hydrocarbures
s’est rendu en Ituri à la tête d’une délégation de
représentants du gouvernement central et provincial
et de la compagnie Tullow Oil. Il a tenté de rassurer
les populations quant aux bénéfices qu’elles allaient
tirer de la mise en exploitation prochaine du pétrole.
Il leur a aussi assuré qu’une raffinerie serait construite
à Bunia et non à Béni116 comme le dénonçaient
certains acteurs hostiles à l’emprise économique des
Nande du nord Kivu en Ituri.117
Malgré tout, les communautés de base ne sont pas
rassurées. Elles souhaiteraient être davantage consultées
dans la gestion de ce dossier et avoir la garantie
qu’elles pourront bénéficier effectivement de l’exploitation
pétrolière dans le district.118 Les populations et
l’Ouganda (en réalité au royaume de Bunyoro du Roi Kabalega).
Entretiens de Crisis Group, notables Hema sud, Kampala,
novembre 2007.
115 Entretiens de Crisis Group, MONUC et acteurs politiques
de l’Ituri, Bunia, mars 2008.
116 Le 20 juin 2007, le gouverneur de la Province Orientale a
publié un communiqué dans lequel il affirme que le pétrole
de l’Ituri sera exploité et raffiné à Bunia et non au Nord Kivu.
En réalité, il semble plus probable que cette raffinerie sera
construite en territoire ougandais. Elle raffinera le pétrole pour
en faire du gasoil et du kérosène et non de l’essence. Entretiens
de Crisis Group, bureau de l’UE, Bunia, novembre 2007.
117 Voir notamment la lettre envoyée à la veille de la visite du
ministre des Hydrocarbures par la faction UPC dirigée par
Faustin Dz’bo Kalogi. Outre l’UPC Dz’bo, le MSR, la société
civile et de nombreux membres de la communauté Hema
militent activement pour la construction de la raffinerie à
Bunia. Document remis à Crisis Group par des notables
locaux en novembre 2007.
118 Lors de la visite de la délégation du ministre des Hydrocarbures
à Kasenyi, à 60km de Bunia, les chefs de collectivités
ont demandé à ce que les emplois soient créés localement
et que 40 pour cent des revenus tirés de l’exploitation
du pétrole du lac Albert revienne au district de l’Ituri, sans
attendre son changement de statut en province à part entière.
Les chefs coutumiers disent de leur côté ne pas comprendre
pourquoi l’assemblée territoriale n’est pas en charge de ce
dossier, alors que selon eux, le sol et le sous-sol appartiennent,
constitutionnellement, aux communautés locales à trales
chefs de collectivités riveraines de l’île de Rukwanzi
se demandent si la découverte du pétrole ne risque pas de
raviver les tensions intercommunautaires sur fond de conflit
pour le partage de la rente locale. Certains accusent déjà
le président Kabila de les avoir sacrifiées en acceptant
que l’île de Rukwanzi passe sous souveraineté ougandaise.
D’autres s’alarment plutôt de la rapide dégradation
de leur environnement qui pourrait compromettre l’avenir
de la pêche sur le lac Albert, une activité essentielle à la
survie des populations.119
Les incertitudes qui continuent sur le contenu des différents
contrats et sur le choix des exploitants pétroliers
retenus côté congolais contribuent à alimenter les spéculations
de craintes.120 Même si pour l’instant l’attentisme
prévaut, dans l’espoir de voir les dividendes de cette découverte
transformer rapidement l’économie des territoires
de Irumu et Djugu, la question de la part réservée
aux communautés et aux autorités locales est présente
dans toutes les têtes. Le risque de voir de nouvelles violences
éclater dans des territoires comme Irumu et Djugu,
qui sont à peine pacifiés, ne doit ainsi pas être sousestimé
et nécessite une transparence accrue dans la
gestion des contrats et ressources pétrolières afin d'éviter
tout envenimement de la situation. Enfin l’ultime défi
pour la consolidation de la paix en Ituri a trait à la question
de la justice et de la réconciliation communautaire.
vers leurs assemblées. Entretiens de Crisis Group, chefs coutumiers,
novembre 2007.
119 Selon les chefs de collectivités de la région, Rukwanzi est
occupée quasi exclusivement de populations congolaises mais 30
pour cent des terres seulement appartiennent à la RDC. L’intérêt
pour l’Ouganda de placer l’ensemble de l’île sous sa souveraineté
directe s’expliquerait par le fait que les forages réalisés à
partir de Rukwanzi dans le lac Albert sont parmi les plus prometteurs.
D’autres sources affirment que Rukwanzi ne présente
aucun intérêt en terme d’exploitation mais permet seulement aux
bateaux d’accoster plus facilement. Entretien de Crisis Group,
chefs de collectivités, Bunia et Kampala, novembre 2007.
120 Le contenu des différents contrats – celui de Heritage Oil puis
de Tullow Oil signé en 2006 avec le gouvernement congolais –
et les dispositions de l’accord signé entre Kabila et Museveni en
septembre 2007 n’ont jamais été transmis au Parlement congolais
pour approbation. Certains affirment que le président Kabila se
serait engagé à ne rien changer aux accords passés pendant la
guerre avec Heritage Oil. Entretiens de Crisis Group, Kampala,
mars 2008.
Congo: quatre priorités pour une paix durable en Ituri
Rapport Afrique de Crisis Group N°140, 13 mai 2008 Page 21
V. JUGER ET RECONCILIER
Dans le domaine de la justice et de la réconciliation,
l’Ituri se trouve dans une situation particulièrement
complexe. S’agissant de la question des poursuites à
engager contre les auteurs des crimes atroces commis
dans le district depuis la fin des années 1990, on doit
porter au crédit de l’action de la CPI d’avoir envoyé
un signal très fort en direction des groupes armés. Au
niveau de l’auditorat militaire, des actions ont également
été prises localement pour sanctionner certains
auteurs de crimes graves, notamment des militaires.
Toutefois, l’impunité demeure la règle et de nombreux
miliciens impliqués dans des massacres font
aujourd’hui partie des forces de sécurité régulières.
Plus grave encore, plusieurs chefs de milices et
responsables politiques impliqués dans les crimes ne
font l’objet d’aucune poursuite que ce soit au niveau
de la justice locale ou au niveau de la CPI. Cette
situation conduit à penser localement, que ce soit au
niveau des communautés ou au niveau des défenseurs
des droits humains, que la CPI a eu une gestion politique
des dossiers. Cette perception tend à entamer le
crédit du processus judicaire et à renforcer, au sein de
chaque communauté, puis au niveau de l’ensemble
des Ituriens, un sentiment de victimisation qui constitue
un nouvel obstacle au processus de réconciliation
intercommunautaire.
Dans ce domaine, les progrès observés jusqu’ici
restent superficiels. Si de nombreux séminaires et ateliers
ont été organisés et des comités locaux de pacification
mis en place dans les territoires, leur impact
est resté limité à un retour progressif à une coexistence
pacifique. Les tensions intercommunautaires restent
toutefois nombreuses, alimentées par les conflits de
terre non solutionnés, mais aussi et surtout par
l’absence de travail, en profondeur, sur les traumatismes
et injustices subis pendant la guerre, que ce
soit au niveau individuel ou communautaire.
A. LUTTER CONTRE L’IMPUNITE DE
MANIERE CREDIBLE ET EFFICACE
L’Ituri a été le premier dossier sur lequel la CPI a
ouvert des enquêtes, suite à la demande transmise en ce
sens par le gouvernement congolais, en mars 2004.121
121 Dans une lettre en date du 3 mars, le président Kabila a
officiellement saisi la CPI pour qu’elle enquête sur les
crimes commis sur tout son territoire depuis le 1 juillet
2002. Le 23 juin 2004, le procureur a annoncé l’ouverture
d’une enquête de la Cour sur le cas de l’Ituri.
Le transfert , le 17 mars 2006, à la Haye du chef de
l’UPC, Thomas Lubanga, dont le procès devrait débuter à
partir de 23 juin 2008, a envoyé un signal fort à
l’ensemble des auteurs des crimes de guerre et des crimes
contre l'humanité. Grâce à l’inculpation et au transfert, le
18 octobre 2007 de Germain Katanga, un Ngiti chef
d’état-major des FRPI, puis, le 7 février 2008, un Lendu,
chef d’état-major du FNI devenu par la suite colonel
FARDC, Mathieu Ngudjolo,122 la CPI est parvenue à faire
taire le sentiment jusqu’alors prédominant en Ituri que les
leaders des communautés alliées du gouvernements
n’auraient pas à répondre de leurs crimes, les Hema étant
les seuls, à travers Lubanga, à devoir être inquiétés.
Sur le plan de la justice locale, des efforts ont également
été menés pour lutter contre les crimes les plus graves
commis par les militaires. Le 18 juin 2007, le tribunal
militaire de Bunia a rendu son jugement à l’encontre de
dix-sept soldats de la 1ère brigade intégrée poursuivis
pour des pillages dans la ville de Bunia en janvier de la
même année. Les dix-sept soldats ont été renvoyés de
l’armée et quatorze ont été condamnés à des peines de dix
ans de prisons. Les trois qui avaient réussi à s’échapper
ont été jugés par contumace et condamnés à vingt ans de
prison chacun. Suite au procès des neuf officiers FARDC
impliqués dans les massacres de Bavi entre août et
novembre 2006, tous les militaires ont été renvoyés de
l’armée et condamnés à des peines allant de douze à
quinze ans de prison. Quant au gouvernement congolais,
il devra verser environ $480 000 aux familles des
victimes à titre de dommages et intérêts.
Malgré tout, une grande frustration est perceptible tant au
niveau des communautés que des défenseurs des droits
humains en ce qui concerne la lutte contre l’impunité en
Ituri. L’action de la justice, qu’elle soit nationale ou
internationale, fait ainsi l’objet de critiques nombreuses.
Il est vrai que sur le plan local, la lutte contre l’impunité
pour les crimes commis par les chefs de milice ou les
responsables de l’armée est souvent menée de manière
partiale et partielle. En l’absence d’une loi nationale de
mise en oeuvre précisant les modalités de traitement judiciaire
des crimes de masse définis par le Statut de Rome,
les auteurs de massacres de masse ne sont justiciables, en
vertu du droit congolais, que devant la justice militaire.
122 À l’instar de Germain Katanga, Ngudjolo est accusé de crimes
contre l’humanité et de crimes de guerre qu’il aurait perpétrés
dans la ville de Bogoro en février 2003. En avril 2008, la Cour a
rendu public le mandat d’arrêt délivré le 22 août 2006 contre
Bosco Ntaganda, un Tutsi congolais, ancien chef d’état major
adjoint de l’UPC. Ntaganda, qui occupe actuellement les fonctions
de chef d’état-major du CNDP de Laurent Nkunda, au Nord
Kivu, est accusé comme Lubanga d’avoir recruté et engagé des
enfants soldats dans des combats en Ituri, entre juillet 2002 et
décembre 2003.
Congo: quatre priorités pour une paix durable en Ituri
Rapport Afrique de Crisis Group N°140, 13 mai 2008 Page 22
Or, celle-ci ne peut offrir en aucun cas les mêmes
chances d’impartialité et d’équité que la justice civile,
même si l’une et l’autre souffrent à l’identique de la
corruption endémique qui gangrène l’ensemble de
l’appareil judiciaire en RDC. En effet, la plupart des
criminels des l’Ituri ayant été intégrés dans l’armée,
il est peu probable que la hiérarchie militaire instruise
l’auditorat de lancer des poursuites contre ces nouvelles
recrues. Le vote d’une loi de mise en oeuvre du
Statut de Rome pourrait au moins permettre à la
justice civile de traiter des crimes de masse, augmentant
ainsi les chances de voir la lutte contre l’impunité
progresser dans le pays.
La lutte contre l’impunité engagée au niveau de la CPI
fait également l’objet de critiques nombreuses sur le
terrain. Les communautés continuent de s’interroger sur
le sens de cette justice lointaine, perçue comme déconnectée
des réalités locales. Les observateurs sur le
terrain peinent à comprendre les raisons qui ont amené
la CPI à poursuivre Lubanga pour son implication
dans le recrutement d’enfants au sein de sa milice et
non pour les atrocités commises par les troupes de
l’UPC. Cette décision devrait être mieux expliquée,
notamment en direction des membres de la communauté
Hema, dont beaucoup continuent de témoigner
de la sympathie à Lubanga et seraient probablement
prêts à lui donner à nouveau leurs enfants, au cas où
éclaterait une nouvelle guerre communautaire.
Les missions sur le terrain et les programmes radiodiffusés
de sensibilisation sur le travail de la Cour soutenus
par le greffe à partir de ces bureaux de liaison
établis à Kinshasa et à Bunia ne sauraient se substituer
à une véritable stratégie intégrée de lutte contre l’impunité.
Cette stratégie doit combiner éducation civique
et judiciaire, explication de son action, sensibilisation
des décideurs politiques, appui à l’ensemble de la
chaîne pénale (bureau des procureurs, tribunaux de première
instance, tribunaux d’appel, etc.), et mobilisation
des soutiens auprès des bailleurs de fonds, à
commencer par les Etats parties au Statut de Rome.
L’argument selon lequel la Cour ne peut contribuer á
la mobilisation pour le renforcement des capacités
judiciaires nationales car son action était fondée sur
une évaluation de l’incapacité de ces juridictions, ne
peut tenir, surtout sept ans après l’ouverture des enquêtes.
123 L’incapacité de la justice congolaise a été
depuis longtemps établie. Le bureau du Procureur se
réfère d'ailleurs désormais souvent au concept de
« complémentarité positive » qui encourage ouvertemement
les poursuites nationales et appelle à un plus
123 Entretien téléphonique de Crisis Group, représentant de
la CPI, 5 mai 2008.
forte coopération entre la justice internationale et locale.
Avec le soutien des Etats parties au Statut de Rome et des
institutions intéressées, le bureau du Procureur devrait
désormais apporter un soutien actif au renforcement de la
chaîne pénale et à la lutte contre l’impunité dans le pays.
La plus grande difficulté que la CPI doit surmonter dans
le cadre des procès qu’elle a prévus d’instruire sur les
crimes perpétrés en Ituri est de corriger le sentiment
dominant dans le district que la CPI a géré ces dossiers de
manière politique. La population soupçonne, en effet la
CPI d’avoir évité l’ouverture de certaines enquêtes à l’encontre
des responsables nationaux ou étrangers ayant
commandité les crimes en Ituri pour ne cibler que les
chefs de milice ayant osé défier le gouvernement de
Kinshasa. Cette perception de partialité risque de remettre
en cause la crédibilité de la Cour.124
Ce sentiment est aujourd’hui renforcé depuis l’annonce
en février 2008 qu’avec le transfert à la Haye de Mathieu
Ngudjolo, la Cour avait clôt la première phase de ses
enquêtes en RDC, centrée sur les crimes commis par les
leaders et groupes actifs en Ituri. Bien que le bureau du
Procureur a indiqué qu’il allait engager une nouvelle
phase d’enquêtes125 portant sur l’ensemble des crimes
commis à l’Est de la RDC, le fait qu’il ait explicitement
fait référence à la situation dans les provinces des Kivus a
été interprété, en Ituri, comme une décision de la Cour de
ne pas pousser plus loin ses enquêtes dans le district.
La, collaboration active entre le gouvernement congolais
et la Cour pour les transferts de Lubanga, Katanga ou
Ngudjolo à La Haye et la coopération entre la CPI et le
gouvernement ougandais font également douter de la
volonté de la Cour à remonter plus haut dans la chaîne de
responsabilité et de complicité nationale ou étrangère
pour les crimes commis en Ituri.
Les crimes attribués à l’ancien chef du FAPC, Jérôme
Kakwavu, actuellement G5 à l’état-major militaire à
Kinshasa, Cobra Matata des FRPI ou de Peter Karim du
FNI ne diffèrent pas par leur gravité de ceux dont la
responsabilité est attribuée à Lubanga, Katanga ou Ngudjolo.
126 De manière récurrente en Ituri revient également
la question du devenir de la première enquête ouverte par
124 « En Ituri, la CPI ne s’est occupée que des exécutants et elle a
laissé tranquilles les commanditaires », Entretiens de Crisis
Group, défenseur des droits humain, Bunia, novembre 2007.
125 « Déclaration du Bureau du Procureur donnant suite au
transfèrement à La Haye de Mathieu Ngudjolo Chui », 7 février
2008, disponible sur www.icc-cpi.int/press/pressreleases /330.
html&l=fr.
126 Voir « CPI/RDC: Arrestation d’une nouvelle personne soupçonnée
de crimes de guerre : La CPI devrait enquêter au sujet de
hauts responsables liés aux chefs de guerre », communiqué de
Human Rights Watch, 7 février 2008.
Congo: quatre priorités pour une paix durable en Ituri
Rapport Afrique de Crisis Group N°140, 13 mai 2008 Page 23
la CPI en Ituri, concernant le massacre de Nyakunde
en septembre 2002. Jusqu’à ce jour, elle n’a donné
lieu à aucun mandat d’arrêt international.127 Pour les
observateurs locaux, cette situation s’explique en
raison de l’implication dans ce massacre128 non seulement
des FRPI, du FNI mais aussi et surtout de l’APC,
l’armée du RCD-ML de Mbusa Nyamwisi129, actuellement
ministre des Affaires étrangères à Kinshasa.
L’absence de poursuites contre les soutiens extérieurs
que les chefs de groupes armés ont reçu en dehors de
l’Ituri conduit à penser, sur le terrain, que la CPI ne
vise que les proies faciles et exerce une justice du fort
contre le faible. Le soutien financier et militaire apporté
par de hauts responsables à Kinshasa, Kampala ou
Kigali aux milices ayant perpétré des massacres en
Ituri a pourtant déjà été amplement documenté.130
Dans une lettre, en date du 11 novembre 2006, l’ancien
président du FNI, actuellement en détention, raconte
dans le détail comment le FNI a reçu l’appui de plusieurs
hauts décideurs congolais et ougandais. La présence
de conseillers militaires rwandais auprès de l’UPC
puis le soutien apporté au MRC, par Kigali, à partir
de 2005 ont également été maintes fois signalés.131
Mise bout à bout, tous ces éléments contribuent à alimenter,
en Ituri, des soupçons quant à la partialité de
la CPI. A moyen terme, ce sentiment risque de faire
oublier le rôle positif joué par la Cour dans la région
mais aussi et surtout d’entamer sa capacité à dissuader
de nouveaux crimes atroces. Face à ces risques, la
Cour devrait réaffirmer publiquement que le bureau
du Procureur va continuer les investigations en Ituri et
qu’il engagera des poursuites à l’encontre des auteurs
des crimes atroces, sans considération pour leur nationalité
ou les fonctions officielles qu’ils occupent
aujourd’hui. Sous réserve que leur responsabilité dans
ces crimes atroces puisse être établies, les enquêtes
devraient concerner en priorité les principaux chefs
de milices de l’Ituri toujours en liberté (Jérôme Kakwavu,
Peter Karim, Cobra Matata, Floribert Kisembo
Bahemuka), les responsables du massacre de Nyakunde
ainsi que les dirigeants congolais, rwandais et
127 Entretiens de Crisis Group, ONGs des droits humains, La
Haye, mars 2008.
128 Entretiens de Crisis Group, ONGs des droits humains,
Bunia, mars 2008.
129 Voir « Ituri couvert de sang”, Human Rights Watch, op.
cit., p. 33. Voir aussi la lettre publique du président du FNI,
Floribert Njabu, « quelques vérités sur les implications dans
la tragédie de l'Ituri », écrite le 11 novembre 2006 depuis la
prison de Makala/CPRK à Kinshasa au Procureur de la CPI,
Luis Moreno-Ocampo, p. 5 , titre 2.1 , « Implications du
R.C.D / K-ML ».
130 Ibid.
131 Ibid.
ougandais qui ont armé et soutenu les milices actives en
Ituri. Lorsque les personnes concernées sont protégées par
des immunités en RDC ou à l’étranger, la CPI constitue,
en effet, l’unique recours pour les victimes des crimes
commis en Ituri.
Dans les autres cas, il apparaît en revanche important que
l’instruction et les procès puissent se dérouler, désormais,
en RDC, afin que les Ituriens s’approprient véritablement
le processus et deviennent eux-mêmes les acteurs de la
lutte contre l’impunité. Comme le souligne l’article 1 du
Statut de Rome, la CPI n’est qu’une justice complémentaire.
Compte tenu des réalités actuelles de la justice en
RDC et en Ituri en particulier, cela ne peut être envisagé
que si des chambres mixtes, dans lesquelles juges, procureurs,
enquêteurs et avocats étrangers et congolais travailleraient
ensemble, étaient mises en place au sein de
l’appareil judiciaire congolais.
Pour qu’un tel mécanisme puisse être institué, le gouvernement
devrait prendre l’initiative de proposer la mise
sur pied de chambres mixtes au sein de l’appareil judiciaire
congolais afin de juger des crimes de guerre et des
crimes contre l'humanité commis en Ituri. Afin de parvenir
rapidement à la création d’une structure efficace, le
gouvernement devrait engager des consultations avec le
corps des magistrats, l’ordre des avocats et la société
civile congolaise ainsi qu’avec les partenaires de la RDC.
Ces derniers doivent,en effet, sortir de la logique des
appuis d’urgence pour s’engager durablement dans la
reconstruction du système judiciaire congolais et le
rétablissement de l’état de droit en RDC.132 Ce rapprochement
de la justice avec le terrain – sous réserve que le
processus fasse l’objet d’un appui substantiel de la part
des partenaires internationaux de la RDC – est indispensable
pour aider à la cicatrisation des souffrances infligées
aux victimes et amener à une réconciliation réelle.
Dans ce domaine cependant, à côté du volet judiciaire et
compte tenu de l’ampleur des crimes commis, la mise sur
pied d’une Commission vérité et réconciliation apparaît
indispensable tout comme le lancement de programmes
d’appui aux victimes et aux anciens combattants.
B. RECONCILIER LES ITURIENS
Le processus de pacification de l’Ituri a permis de mettre
un terme à la vague de violences intercommunautaires qui
132 La formule des chambres mixtes qui constitue une alternative
efficace et économe à la création d’un tribunal pénal international
pour la RDC a déjà été utilisée au Sierra Leone, au Timor
Est, en Bosnie Herzégovine, au Cambodge et au Kosovo. Voir
« Rule-of-Law Tools for Post-conflict States : Maximizing the
legacy of hybrid courts », UN Office of the Hight Commissioner
for Human Rights, 2008.
Congo: quatre priorités pour une paix durable en Ituri
Rapport Afrique de Crisis Group N°140, 13 mai 2008 Page 24
l’ont endeuillées. Peu de progrès a toutefois été accompli
en matière de réconciliation. Les communautés se
côtoient mais ne se fréquentent guère et la méfiance
et les préjugés entre communautés demeurent très
fortement ancrés. Cette situation risque de donner lieu
à de nouvelles violences, à l’occasion de nouveaux
conflits de terre ou de nouvelles pommes de discorde
pour le partage des ressources naturelles.
Jusqu’ici les prises de paroles dans ce domaine sont
restées limitées. De nombreux séminaires et ateliers
ont été organisés et des comités de pacification ont
permis d’apaiser les tensions localement. Ces actions
n’ont toutefois touché qu’une minorité et le repli sur
sa communauté d’origine demeure la règle. Le
sentiment de victimisation au sein des communautés
Lendu/Ngiti et Hema demeure très fort. La marginalisation
des Lendu à l’époque de la colonisation, que
ce soit au niveau de l’éducation ou plus tard de l’accès
aux postes de responsabilité, continue de nourrir un
sentiment de révolte à l’encontre des privilégiés Hema.
Ils admettent ainsi difficilement leur part de responsabilité
dans les violences, en renvoyant la responsabilité
sur les provocations des Hema, les Lendu
affirmant avoir réagi, de manière impulsive, sans
peser les conséquences de leurs actes. Du côté des
Hema, le sentiment d’être victime est également très
répandu et la reconnaissance des crimes commis ou
suscités par des membres de la communauté toujours
très difficile à faire admettre. De surcroît, les Hema
se présentent comme la cible d’un complot international
impliquant Kinshasa, les ex-Far Interhamwe
ainsi que plus généralement les « forces négatives ».
Dans les deux communautés, quelques voix vont
même jusqu’à recommander une séparation des deux
groupes, sans toutefois rencontrer beaucoup d’écho
pour le moment.
Au cas où l’ampleur de ces antagonismes intercommunautaires
continuerait ainsi d’être sous-estimée, on
ne peut exclure qu’après quelques années de calme relatif,
de nouvelles violences interethniques n’éclatent, que
ce soit à l’occasion de nouveaux conflits de terres,
d’un conflit pour l’accès et le partage des ressources
ou lors des futures élections locales. Sans attendre
que ce risque ne se matérialise, la meilleure action de
prévention à suivre serait probablement de mettre sur
pied un programme spécifique pour l’Ituri dans le
cadre de la Commission vérité et réconciliation.
Pouvant être créée en application de la constitution
de 2006 par une simple loi organique, cette commission
n’est toutefois toujours pas en place, plus d’un
an après l’entrée en fonction du gouvernement Gizenga.
Tirant les leçons des échecs du fonctionnement de la
commission mise en place pendant la transition –
dont le bilan fut totalement insignifiant – plusieurs ONGs
ont proposé de mettre sur pied une nouvelle commission
ainsi que des petites commissions locales inspirées des
cérémonies traditionnelles de réconciliation au profit des
auteurs des crimes mineurs.133
En complément de ces actions, il paraît important de prévoir
des actions de suivi psychologique au profit des victimes,
notamment pour les femmes, mais aussi des combattants
afin qu’ils puissent dépasser les traumatismes endurés
pendant la guerre et deviennent également les acteurs
au quotidien de la pacification durable du district.134
133 Entretien de Crisis Group, ONG de défense des droits
humains, Justice Plus, Bunia, mars 2008.
134 Entretien de Crisis Group, Professeur Lobho, un des intellectuels
ayant inspiré la création de l’UPC, Kinshasa, novembre
2007.
Congo: quatre priorités pour une paix durable en Ituri
Rapport Afrique de Crisis Group N°140, 13 mai 2008 Page 25
VI. CONCLUSION
L’Ituri est sans doute la région du Congo où, en
l’absence d’État et d’intérêt du gouvernement de
transition à y rétablir son autorité, la communauté
internationale s’est le plus investie à partir de juin
2003 pour tenter d’y prévenir une situation à la
rwandaise, puis y désarmer les milices. Ses efforts
ont en partie été couronnés de succès, et malgré les
difficultés importantes rencontrées pour y établir des
conditions minimales de sécurité, les élections générales
de 2006 ont pu s’y dérouler dans des conditions
très satisfaisantes. Aujourd’hui, à l’approche des
élections locales et de la transformation du district en
province à l’horizon 2009, le défi en Ituri est celui de
la stabilisation et de la reconstruction.
Les acteurs principaux de ces deux processus ne sont
plus internationaux. La reconstruction de l’Ituri
représente un test significatif de la volonté du gouvernement
congolais à vouloir changer le système de
mauvaise gouvernance prévalant dans le pays depuis
l'indépendance et à apporter aux populations les dividendes
de la paix. Tout comme dans les Kivus, seule
une approche globale pourra être couronnée de
succès. Ce n’est qu’en attaquant le problème iturien
sur quatre fronts simultanés – désarmement, question
foncière, partage équitable des ressources et impunité
– que la stabilisation du district aura des chances
d’être pérenne et que le défi de prévention de nouvelles
violences pourra réellement être relevé.
Nairobi/Bruxelles, 13 mai 2008
Congo: quatre priorités pour une paix durable en Ituri
Rapport Afrique de Crisis Group N°140, 13 mai 2008 Page 26
ANNEXE A
CARTE DE L’ITURI
Courtesy of GIS Unit, MONUC. This map is exclusive property of United Nations MONUC. The boundaries
and names shown and the designations used on this map do not imply official endorsement or acceptance by
the United Nations.
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ANNEXE B
CARTE DE LA RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DE CONGO
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ANNEXE C
LES PRINCIPAUX GROUPES ARMÉS DE L’ITURI
L’UPC (Union des patriotes congolais), dirigée
par Thomas Lubanga, était la plus ancienne et la
mieux organisée des milices du district. Créée
en 2000 par Lubanga, John Tibasima et le chef
Kawa Panga Mandro avec le soutien de l’Ouganda,
suite à une scission au sein du RCD-KML de
Mbusa Nyanwisi, l’UPC était une milice au service
de la défense de la communauté Hema. Elle était
présente à l’origine sur les parties des territoires
d’Irumu, de Djugu, d’Aru et de Mahagi occupées
par les Hema et sur le territoire de Mambasa où
vivent les populations d’origine Bira et Walese. En
2001, suite à la dissidence du FAPC encouragée
par Kinshasa et Kampala, l’UPC perd le contrôle
des territoires d’Aru et Mahagi. En 2002, l’UPC se
retrouve en guerre ouverte contre le RCD-KML et
sa branche armée l’APC. Celle-ci lui ravit le territoire
de Mambasa mais l’UPC parvient à prendre le
contrôle du chef lieu de district, Bunia, avec l’aide
de l’armée ougandaise aux termes de combats
particulièrement meurtriers.
La même année, l’UPC commet plusieurs massacres
de populations civiles dans les villages Lendu
réputés hostiles. C’est le cas notamment à Zumbe,
dans le territoire de Djugu, le 15 octobre 2002. En
février 2003, le chef Kawa Panga Mandro, ministre
de la Défense de l’UPC, entre en dissidence avec
l’aide de Kinshasa pour créer le PUSIC sur la
partie du territoire d’Irumu occupée par les
populations Hema Sud (Bahema Banyawagi de
Mandro, Tchomia et les Hema Sud sur l’axe
Kasenyi Sota). Après sa rupture avec Kampala et
son rapprochement avec le RCD et le Rwanda,
l’UPC est expulsée de Bunia par l’armée ougandaise
et les milices Lendu (FNI, FRPI) le 6 mars
2003. Les miliciens Lendu massacrent les populations
civiles Hema perçues comme pro-UPC..
Deux mois plus tard, suite au départ de l’UPDF,
l’UPC réinvestit Bunia au prix de durs combats et
commet en représailles de massacres à l’encontre
des populations Lendu.
Le FNI (Front national intégrationiste) a été créé
en janvier 2002 avec l’aide des Ougandais sous la
présidence de Floribert Njabu. Cette milice Lendu
fédère en fait des petits groupes d’auto-défense de
combattants organisés en réaction à la mise sur
pied de l’UPC. C’est un groupe qui reste faiblement
structuré et au commandement fortement
décentralisé présent exclusivement sur le territoire de
Djugu au sein des populations Lendu Pitsi, Lendu
Tatsi, Lendu Watsi et Lendu Djatsi. Njabu ne contrôle
en fait que le FNI de Kpandroma. Le FNI de la zone de
Zumbe (population Lendu Tatsi) est dirigé par Mathieu
Ngudjolo Chui, celui de Mbau par Godas Sukpa, celui
de Loga par Floribert Burombi et celui de l’axe
Mongwalu-Kilo-Kobu par Dragon Masasi et Kung Fu).
Le FNI opère en collaboration avec les FRPI qui sont
censées à l’origine être leur branche armée. Après la
rupture entre Kampala et l’UPC, les branches du FNI
reçoivent régulièrement des armes de l’armée ougandaise
mais sont principalement en alliance avec
Kinshasa et le RCD-KML qui les alimentent en armes
et assurent des formations militaires. Fin 2002, le FNI
commet plusieurs massacres de populations civiles dans
les villages Hema Gegere comme Nizi le 11 octobre
2002, Largu et Blukwa octobre 2002. Le FNI participe
à la prise de Bunia par l’UPDF en mars 2003 avant
d’être expulsé en mai 2003 par l’UPC.
Les FRPI (Forces de résistance patriotique en Ituri) :
milice Lendu formée à partir de 2002 sur le territoire de
Irumu par les populations Lendu Bindi ou Ngiti. Elle
évolue en alliance avec le FNI dont elle affirme être la
branche armée. Commandée par Germain Katanga et
Cobra Matata, elle est alimentée en armes par Kinshasa
et se distingue par ses attaques particulièrement meurtrières
contre les populations civiles Hema et Bira (en
réaction au fait que le secrétaire général de l’UPC, John
Tinanzabo, était lui-même Bira). Les FRPI sont ainsi
impliquées dans les massacres de Nyakunde du 5 au 15
septembre 2002, Bogoro le 24 février 2003, Songolo le
31 août 2002 et Tchomia le 31 mai 2003 et le 15 juillet
2003.
Le PUSIC (Parti pour l’unité et la sauvegarde de
l’intégrité du Congo) : la milice a été créée en février
2003 sur incitation de Kinshasa par le Chef Khawa
Panga Mandro, ministre de la Défense de l’UPC.
PUSIC récupère les principaux commandants Hema
Sud de l’UPC et occupe la zone Mandro où l’UPC
disposait de son principal centre d’instruction militaire.
Elle bénéficie principalement du soutien en armes de
l’Ouganda en l’échange d’une sécurisation du port de
Kasenyi sur le lac Albert et de l’axe Kasenyi Bunia au
profit de l’UPDF et des commerçants ougandais. Le
PUSIC mène par contre assez peu d’offensive et agit
surtout comme une milice de protection au profit des
Congo: quatre priorités pour une paix durable en Ituri
Rapport Afrique de Crisis Group N°140, 13 mai 2008 Page 29
populations Hema Banyawagi et Hema Sud contre
les attaques FNI, FRPI et UPC.
Les FAPC (Forces armées du peuple congolais) :
la milice a été créé en 2001 sur les territoires d’Aru
et Mahagi par Jérome Kakwavu Bukande, un tutsi
originaire du territoire de Masisi dans la province
du Nord Kivu. Kakwavu est un ancien de l’UPC
ayant rompu avec Lubanga à l’incitation de
Kinshasa. A la différence des autres groupes armés
du district, c’est une milice multiethnique dont la
plupart des commandants sont Tutsis originaire du
Nord Kivu. Sur le terrain, le FAPC mène assez peu
d’offensive et, grâce à son contrôle du poste
douanier d’Aru et du marché d’Ariwara, il crée une
zone franche dont tirent partie Kampala, les réseaux
commerciaux Nande et ceux du Sud Soudan.
FPDC (Forces populaires pour la démocratie au
Congo) : cette milice créée en 2000 était composée
principalement de combattants d’origine Alur et opérait
principalement sur le territoire de Mahagi, à Mahagi
ville, Gonyeri et Kulikoka. Elle est créée par la
communauté Alur pour contrer les actions de l’UPC et
de FNI sur le territoire de Mahagi. Dirigée par un
ancien député Thomas Unencan, c’est une petite milice
relativement peu combative.
Congo: quatre priorités pour une paix durable en Ituri
Rapport Afrique de Crisis Group N°140, 13 mai 2008 Page 30
ANNEXE D
SUCCÈS ET LIMITES DU DÉSARMEMENT PENDANT LA PERIODE
DE TRANSITION (2003-2006)
Le processus de désarmement des groupes armés de l’Ituri
a débuté à Bunia en septembre 2003, suite à l’intervention
robuste de l’UE à travers l’opération Artémis. Placée
sous commandement de l’UE, la Force multinationale
intérimaire d’urgence (FMIU) se déploie à partir du 6
juin 2003. Appelée par le Conseil de sécurité135 pour
faciliter le déploiement d’une brigade supplémentaire
de la MONUC et stopper l’escalade de violence qui avait
marqué le retrait des troupes ougandaises de l’Ituri et la
prise de contrôle de Bunia par l’UPC le 12 mai 2003,136
elle entre très vite en conflit avec la milice de Thomas
Lubanga qui contrôlait la ville.137 Face aux miliciens qui
cherchent à s’opposer à l’opération « Bunia sans armes »,
le commandant de la force adopte une approche agressive.
138
Au départ de la mission de l’Ituri, fin août 2003, l’UPC
ne contrôle plus Bunia mais l’insécurité perdure et la
ville reste ethniquement divisée.139 En dehors de Bunia,
les combats et les violences contre les civils se poursuivent,
les milices FNI et FRPI cherchant à tirer parti
de l’affaiblissement de l’UPC pour attaquer les zones
Hema, désormais moins bien protégées.
135 Résolution 1484, Conseil de sécurité des Nations unies,
S/RES/1484, 31 mai 2003.
136 Le 23 avril 2003, la MONUC avait déployé 200 des 700
casques bleus uruguayens prévus pour assurer la sécurité dans
Bunia. Ces derniers ne purent cependant empêcher l’UPC de
prendre le contrôle de Bunia. Le 18 mai 2003, deux observateurs
militaires de la MONUC furent assassinés à Mongbwalu,
à 65km au nord de Bunia.
137 Les accrochages les plus violents se sont déroulés, le 11
juillet 2003, dans le camp de l’UPC situé à Miala, au nord de
Bunia.
138 « J’avais donné comme consignes d’être agressif et déterminé
: frappez fort à la première opportunité. Le 21 juin, je
rencontrais M. Lubanga chef de l’UPC la milice qui contrôlait
Bunia avec environ 2.500 hommes et lui ordonnais de quitter
la ville sous 72 heures ». Voir le témoignage du Général
Thonier dans « Les moyens de l’autonomie stratégique française,
Acte de la journée d’étude du 14 janvier 2004 », Fondation
pour la recherche stratégique, pp. 56-58, disponible sur
www.frstrategie.org/barreFRS/publications/colloques/2004011
4/20040114.doc.
139 La partie sud de la ville, occupée par les populations Lendu,
est pratiquement inaccessible aux Hema. Quant aux Lendu, ils
ne s’aventurent guère dans la partie nord et centre (comprenant
Mudzipela, Lembabo, Sayo et Nyakasanza) à dominante Hema.
1. L’introuvable stratégie politique intégrée
Compte tenue de la brièveté de son mandat et des limites
de son périmètre d’intervention,140 la Force multinationale
ne s’implique pas dans la mise sur pied d’un
cadre de dialogue avec les chefs de milices. C’est la
MONUC qui, à partir septembre 2003, se charge de
mettre sur pied ce cadre à travers le Comité de concertation
des groupes armés (CCGA) de l’Ituri.141 Aux termes
de longues négociations, tous les groupes armés finissent,
le 17 décembre 2003, par donner leur accord de
principe au lancement d’un processus de désarmement.
Désireux de consolider cet accord, la MONUC et le
CIAT multiplient les initiatives : en janvier 2004, la
MONUC obtient du PNUD, de l’UNICEF et du gouvernement
de transition la préparation d’un programme
pilote de désarmement spécifique pour l’Ituri, le Programme
de désarmement et réinsertion communautaire
(DRC).142
Avec l’aide du CIAT, la MONUC exerce de fortes
pressions sur le gouvernement de Kinshasa pour qu’il
intègre l’Ituri dans le processus de transition et restaure
l’autorité de l’État, en y nommant des magistrats et en y
remplaçant l’administration intérimaire de l’Ituri par
des représentants directs. Enfin, les 10-14 mai 2004, la
MONUC et le CIAT parrainent une réunion des chefs
des milices de l’Ituri à Kinshasa en présence du président
Kabila. Au terme de cette rencontre, les chefs des
140 Conformément à la résolution 1484, la zone d’opération de
la FMIU était circonscrite à la ville de Bunia. En pratique,
toutefois, la FMIU avait délimité une zone dite d’intérêt élargi
ce qui lui permit de mener des missions de reconnaissance audelà
de Bunia. Ses aéronefs effectuèrent également des missions
de survol sur plusieurs points du district afin de dissuader
les groupes armés d’attaquer certains villages laissés sans
protection.
141 La première réunion du CCGA avait eu lieu à Kinshasa les
16-17 août 2003. Les suivantes se déroulent à Bunia, sous la
présidence du bureau local de la MONUC.
142 C’est le PNUD qui pilote le DRC et se charge de l’organisation,
de l’entretien des sites de transit, de la conception des
projets de réinsertion des combattants démobilisés. La
MONUC s’occupe principalement de la sécurisation des camps
de transit mais en pratique aide aussi au transport des excombattants
dans et hors des sites de transit. Le DCR prend en
charge les combattants âgés de dix-huit et plus qui acceptent
de remettre une arme sur la base du ratio théorique d’une arme
par combattant.
Congo: quatre priorités pour une paix durable en Ituri
Rapport Afrique de Crisis Group N°140, 13 mai 2008 Page 31
groupes armés signent un acte d’engagement par lequel
ils affirment vouloir participer sans réserve au processus
de DRC à partir du 1er septembre 2004, en contrepartie
de l’intégration de leurs troupes dans l’armée
nationale et de la reconnaissance de grades pour leurs
officiers.
Sur le terrain, la situation n’évolue pas aussi positivement
: les casques bleus parviennent à se déployer progressivement
en dehors de Bunia mais, à l’été 2004, ils
ne contrôlent toujours pas Nizi, ni Fataki (aux mains de
l’UPC/L), ni Aru (sous contrôle FAPC de Jérôme
Kakwavu Bukande) ni Mahagi (encore aux mains du
FNI et du FAPC). Si l’UPC/K, le PUSIC, le FPDC143 et
la branche FNI basée au sud de Mahagi semblent prêts
à s’engager dans le DRC,144 la plupart des éléments des
FRPI, des FAPC145 et de l’UPC/L,146 ainsi que la majorité
des branches du FNI,147 contestent toujours le principe
même du cessez-le-feu. Tandis que leurs leaders signent
l’acte d’engagement à Kinshasa, ces groupes recrutent,
reçoivent des armes, multiplient les barrages routiers,
conservent le contrôle de certaines mines, et s’attaquent
à la population civile148 et aux casques bleus.149 Fin 2004,
143 Les Forces populaires pour la démocratie au Congo.
144 C’est notamment le cas de l’UPC/K, du PUSIC, du FPDC
et du FNI basé au sud de Mahagi.
145 Le FAPC continue de contrôler le poste douanier très
lucratif d’Aru et le marché d’Ariwara à travers lequel
s’organisent toutes sortes de trafic entre l’Ouganda, la RDC et
le Sud Soudan.
146 Le 8 décembre, l’ancien chef d’état-major de l’UPC,
Floribert Kisembo, quitte le mouvement pour fonder l’UPC/K.
Il est remplacé à la tête de l’UPC/Lubanga par son ancien
adjoint, Bosco Ntaganda. L’UPC/L adopte une ligne plus
radicale sur le terrain que l’UPC/K.
147 La montée des tensions entre le FNI et les FAPC dans la
zone Djalasiga et Kpandroma, qui s’affrontent régulièrement
pour le contrôle des mines d’or de Djalasiga, sert d’excuses
aux branches Walendu Pitsi et Watsi pour ne pas désarmer.
148 Le 19 septembre 2004 des éléments FRPI attaquent des
civils Bira à Lengabo, à 10km à l’est de Bunia, tuant quatorze
personnes et brûlant une centaine d’habitations. Le 30 décembre
2004, des éléments de l’UPC/L de Joo et Nyamamba attaquent
le village Lendu de Datule. En réaction le FNI attaque les
UPC/L à Mbavi, Mubkva, Mangala, Wasa et Mutanga
l’obligeant à se replier sur Chu et Joo, à 10km au nord de
Nyamamba. Le 4 janvier 2005, les Lendu attaquent des
positions UPC/L à Nyamamba, Mbogi 1 et 2 et Kawa
détruisant un camp militaire UPC/L. Le 19 janvier 2005, une
attaque attribuée à des éléments du FNI à lieu à Tche, une
collectivité Hema nord situé à 40km au nord est de Bunia,
dans le territoire de Djugu fait près d’une vingtaine de morts
parmi les civils.
149 Le 2 septembre 2004, un casque bleu marocain est enlevé
au nord de Bunia, dans la zone de Mudzipela, par des éléments
de l’UPC/L. Il est relâché au bout de cinq jours.
à peine plus de 1 500 combattants ont ainsi adhéré au
DRC.150
L’échec relatif de l’opération désarmement négocié en
2003-2004 tient à plusieurs facteurs. Le manque de
sincérité des chefs miliciens et la permanence des liens
commerciaux entre les groupes armés et certains militaires
et des hommes d’affaires étrangers ont joué naturellement
un grand rôle.151 Les divergences d’approche
entre les principaux acteurs du système des Nations
unies et l’attitude du gouvernement de transition ont
aussi été déterminantes.
Au sein de l’ONU, la Directrice de bureau de Bunia,
Dominique MacAdams, défendait une ligne volontariste
et une stratégie politique globale mêlant « la carotte et
le bâton ». Or pour les militaires de la brigade Ituri,
l’usage du « bâton » était encore prématuré. Ils exigeaient
des renforts, la sécurisation du lac Albert par
l’unité navale riveraine du bataillon uruguayen (Urbatt)
ainsi que le déploiement des brigades FARDC avant de
pouvoir sanctionner les milices violant leurs engagements,
prendre le contrôle de leurs mines et de leurs
postes de douane et protéger les combattants acceptant
de désarmer.152 De son côté, le PNUD estimait ne pas
avoir les moyens de mettre en place le DRC en des délais
aussi brefs. S’il réussit à ouvrir en septembre 2004 cinq
centres de transit153 pour l’accueil des combattants, il ne
parvint pas à lancer des programmes de réinsertion
crédible en temps utile.154
L’attitude du gouvernement de transition fut tout aussi
problématique car l’Ituri n’était clairement pas une
priorité pour lui. L’installation des nouvelles autorités
locales eut ainsi lieu avec retard.155 Le président Kabila
150 Seizième rapport du Secrétaire général sur la Mission de
l'Organisation des Nations Unies en République démocratique
du Congo, Conseil de sécurité, 31 décembre 2004, UN
S/2004/1034, p. 4.
151 Rapport du groupe d’experts, 25 janvier 2005, op. cit.,
paras 94 à 134.
152 Fin 2004, toutefois, la MONUC mena des opérations de
rétorsion contre les groupes armés FAPC et FNI qui se
disputaient la zone de Ndrele et Mahagi. Ces opérations
précipitèrent la reddition de nombreux miliciens.
153 Kpandroma, Nizi, Mahagi, Kasenyi et Aveba. Début 2005,
le PNUD ouvre également des sites de transit à Bunia et à Mt
Awa.
154 Les directeurs des sites de transit ne sont arrivés sur place
qu’en mars 2005. Pendant plusieurs mois, les ex-combattants
ont été livrés à eux-mêmes. De nombreux combattants
cantonnés dans les camps de Kpandroma et Mahagi perdirent
patience et retournèrent dans le maquis. Entretiens de Crisis
Group, ex-combattants, Bunia, novembre 2007.
155 La présidente de l’Assemblée intérimaire de l’Ituri,
Pétronille Vaweka, ne prend ses fonctions qu’à la fin du mois
Congo: quatre priorités pour une paix durable en Ituri
Rapport Afrique de Crisis Group N°140, 13 mai 2008 Page 32
ne signa le décret prévu par l’acte d’engagement nommant
les chefs de milices aux postes de généraux
FARDC que le 11 décembre 2004.156 Enfin, lorsque les
troupes FARDC arrivèrent en Ituri, à la fin du mois
d’août 2004, elles fragilisèrent plutôt qu’elles ne consolidèrent
le processus. Compte tenu de l’alliance forgée
pendant la guerre entre Kinshasa et les groupes armés
Lendu, les combattants UPC et PUSIC et les populations
Hema virent dans les soldats de la première brigade
intégrée157 et plus encore, dans ceux du second
contingent158 déployé à partir d’octobre 2004, des troupes
venues pour « tuer les Hema».
Les efforts déployés par le commandant de la 1ère brigade
intégrée, le colonel Marcel Ekuba Mondo, pour
rassurer les populations n’ont que peu d’impact159 et
d’août 2004, soit deux mois après sa nomination au poste de
Commissaire du district.
156 Le décret nomme Germain Katanga pour le FRPI, Jérôme
Kakwavu pour les FAPC, Goda Sukpa pour le FNI et
Kyaligonza Nduru pour le PUSIC, Floribert Kisembo
Bahemuka de l’UPC/K et Bosco Ntaganda de l’UPC/L au
poste de généraux au sein des FARDC. À l’exception de ce
dernier qui justifie son absence à Kinshasa par le fait qu’il
aurait été blessé, tous prennent leur fonction à Kinshasa en
janvier 2005. Ces nominations sont perçues comme un déni de
justice car plusieurs de ces chefs de milices ont commis des
crimes de guerre. Toutefois, pour la MONUC et les autorités
congolaises, la priorité est alors d’éloigner ces hommes de
l’Ituri, de les isoler de leurs bases et de faire avancer le processus
quitte à engager contre eux, ultérieurement, des poursuites.
Actuellement, Jérôme Kakwavu travaille au sein du G5
à l’état major général à Kinshasa. Après avoir été commandant
second de la région militaire du Bas Congo, Floribert Kisembo
est actuellement commandant adjoint de la région militaire à
Kindu. Depuis 2007, Kyaligonza est le commandant adjoint de
la base de Kitona. Cf. « RDC : l’armée ne doit pas nommer
des criminels de guerre », communiqué de Human Rights
Watch, 10 janvier 2005.
157 Les éléments de la 1ère brigade intégrée, formée par la
Belgique avec l’aide de la France, de l’Allemagne et du
Luxembourg, se déploient à Bunia à partir de la fin août 2004.
158 Ce second contingent comprend dans ses rangs de
nombreux ex-APC, l’armée du RCD-KML qui a combattu aux
côtés des milices Lendu contre les Hema, à partir de 2002. Ce
contingent entretient d’excellentes relations avec le FAPC,
probablement sur la base d’un accord pour le partage de
revenus miniers dans la région. La MONUC tenta de
s’opposer à leur déploiement en vain.
159 Avant 2003, le Colonel Marcel Ekuba avait fait parti du
groupe d’officiers dépêchés par le Général Kisempia de la
maison militaire du président Kabila pour ravitailler en armes
les milices Lendu FNI et FRPI. L’armement passait par l’APC
de Mbusa Nyamwisi et arrivait à Beni. Les avions de la compagnie
Butembo airlines, appartenant au docteur Kisoni,
assuraient ensuite le transport des armes jusqu’à Mahagi et
Kpandroma. Le Colonel Ekuba avait également assuré directement
la formation de miliciens FNI et FRPI au centre de
sont rapidement contrecarrés par les exactions que commettent
ses troupes, que ce soit à l’encontre des populations
civiles ou des combattants récemment démobilisés.
Loin de créer le cadre de sécurité propice à la mise
en oeuvre du DRC, l’arrivée des FARDC contribua ainsi
à rapprocher de nouveau ces dernières des groupes
armés locaux.
Face à cette impasse, début 2005, la MONUC tente de
réagir en renforçant la pression sur les groupes armés.160
Après la mort de neuf casques bleus bangladeshi, pris
dans une embuscade des miliciens FNI, le 25 février,
les différents acteurs du processus décident de revoir
totalement leur stratégie. Cet incident, dont la responsabilité
est imputée à l’ensemble des milices et non aux
seuls FNI, entraîne ainsi une rupture immédiate du
dialogue avec les groupes armés et un basculement vers
un traitement purement sécuritaire du problème des
groupes armés en Ituri.161
2. Le désarmement forcé
Dans les jours qui suivent la mort des casques bleus à
Ndoki, la MONUC et les FARDC, qui reçoivent des
renforts, lancent plusieurs opérations robustes contre
les FNI.162 Les chefs de milices présents à Kinshasa
Nyaleke. Son arrivée à la tête de la 1ère brigade intégrée fut,
dans ce contexte, perçue comme une provocation et une
menace directe par les miliciens Hema.
160 Le 24 février, la MONUC mène une opération de recherche
et de saisie d’armes à Ariwara et réussit à désarmer 116 FAPC.
Le même jour, elle arrête 30 combattants FNI lors d’une
opération similaire à Datule.
161 Selon la version officielle présentée alors par la MONUC,
dix-neuf casques bleus et leur interprète seraient tombés dans
une embuscade lors d’une patrouille à Ndoki, 5km à l’ouest du
village de Kafe ou Kawa. En fait, la patrouille à pied qui
comptait dix-neuf soldats divisés en deux groupes et un interprète
congolais était dirigée par de jeunes officiers récemment
déployés sur zone. Ces derniers menaient des opérations de
reconnaissance dans la zone alors que les FARDC avaient, de
leur côté, lancé des opérations de désarmement forcé. Lorsque
la patrouille est arrivée au niveau d’une colline, située à proximité
d’un camp FNI, elle y a mis le feu ce qui a été interprété
comme un acte hostile par le FNI. Contrairement à l’habitude
des patrouilles non hostiles de la MONUC entrant en zone
occupée par les miliciens, ce détachement de casques bleus
n’avait pas de drapeau blanc avec lui. Les miliciens ont fini
par tirer en l’air puis la panique s’est emparée des deux côtés
et des combats ont éclaté, entraînant la mort de neuf casques
bleus.
162 Le 1er mars 2005, une task force comprenant des soldats
pakistanais, sud-africains et népalais mène, avec l’appui des
hélicoptères indiens de la MONUC, une opération à Loga au
cours de laquelle ils détruisent le quartier général du FNI avec
des dommages collatéraux importants. Loga était le bastion
des durs du FNI dirigés par les commandants Floribert
Congo: quatre priorités pour une paix durable en Ituri
Rapport Afrique de Crisis Group N°140, 13 mai 2008 Page 33
sont placés en résidences surveillées, puis finalement
arrêtés, sur demande du Conseil de sécurité. Le CIAT,
par la voix de son président, le RSSG Swing, lance un
ultimatum aux miliciens pour qu’ils déposent les armes
avant la fin du mois de mars. Enfin, le 7 avril, le CIAT
demande au gouvernement de transition de lancer sans
délai des mandats d’arrêts nationaux et internationaux
contre la hiérarchie militaire de l’UPC-L, à commencer
par son chef d’état major Bosco Ntaganda et le chef d’état
major adjoint, Jonvith Linganga Mandro, qu’il tienne
pour responsable d’actes de torture et de violence à
l’encontre de combattants démobilisés. Entre mars et avril
2005, la plupart des chefs de groupes armés de l’Ituri
sont ainsi neutralisés: Thomas Lubanga, le chef de
l’UPC-L, Floribert Njabu, le chef du FNI, Germain
Katanga celui des FRPI et le Chef Yves Kahwa Panga
Mandro du PUSIC.163
En dépit de la persistance des problèmes logistiques
sérieux,164 et d’un manque de coordination entre les étatsmajors
de la MONUC et des FARDC lors des opérations
conjointes, cette approche répressive donne, dans
un premier temps, une forte impulsion au processus de
désarmement. À la clôture du programme le 25 juin
2005, 15 941 combattants ont rejoint le processus de
désarmement parmi lesquels 4 395 enfants associés ont
été démobilisés. Avant même l’expiration de l’ultimatum,
le FAPC est le premier groupe à désarmer ses 3
322 sur les sites d’Aru et de Mont Awa.165 L’UPC-K166
Burombi et Abeli, chargés des opérations au sein de cette
milice. Burombi entretiendrait jusqu’à ce jour un groupe de
miliciens évoluant entre Loga, Anu et Klutsogu.
163 D’autres responsables des milices les rejoignent en prison :
John Tinanzabo Zeremani, le secrétaire général de l’UPC/L à
Bunia, Djokaba Lambi, le président ad intérim de l’UPC,
Goda Sukpa, Pitchu Iribi, Georges Masudi et Philémon
Manono, tous du FNI au CPRK a Kinshasa.
164 Beaucoup de combattants rencontrent des difficultés pour
se rendre sur les sites de désarmement compte tenu des distances
qu’il leur faut parcourir dans un environnement encore
insécurisé. L’accès leur est parfois refusé faute de place. Entretiens
de Crisis Group, anciens combattants, Bunia, novembre
2007.
165 Le leader du FAPC et plusieurs de ses officiers n’étaient
pas originaires de l’Ituri mais du Masisi et ne défendaient
aucune communauté particulière. Le mouvement avait émergé
en 2002 à partir de l’UPC, grâce au soutien du président
Museveni et du président Kabila, désireux d’affaiblir l’UPC,
alors soutenue par le Rwanda. Jérôme Kakwavu se rendait
ainsi fréquemment à Kampala avec son escorte armée. Il a
finalement désarmé lorsqu’il a compris que faute d’un enracinement
local réel, son mouvement risquait de ne pas tenir face
à la montée de la pression internationale. Auparavant, il est
parvenu à négocier un accord intéressant avec le gouvernement
congolais. En l’échange d’une remise de son important
stock d’armes, il a obtenu son intégration en tant que général
au sein des FARDC (G5 à l’état major général), la signature
et le FPDC ont fait de même et ont cessé également
d’exister. Le deuxième groupe ayant désarmé est le FNI
principalement sur les sites de Kpandroma et Mahagi
avec 2 958 combattants; puis le PUSIC sur les sites de
Kasenyi et Bunia (1 862) et l’UPC-L sur Nizi et Bunia
(1 374).
Les limites du processus apparaissent cependant rapidement
: le nombre d’armes collectées – 6 200 – reste
relativement faible et 70 pour cent d’entre elles ne sont
plus en état de fonctionner.167 L’objectif initial d’éradication
des groupes armés n’est pas atteint car l’UPCL,
168 l’essentiel du FRPI et plusieurs branches du FNI169
ont rejeté le processus et conservent une forte capacité
de nuisance. Au mois de juin 2005, une nouvelle alliance,
le Mouvement révolutionnaire congolais (MRC) derrière
laquelle se rangent la plupart de ces groupes armés voit
le jour.170 Sans jamais parvenir à absorber le FNI et les
d’un accord technique des forces pour ses troupes parmi
lesquelles se trouvaient de nombreuses ex-Forces armées
zaïroises, une amnistie pour faits de guerre et faits insurrectionnels
ainsi que la sauvegarde de ses intérêts financiers,
comme son réseau de camions de transports, son hôtel à
Ariwara et plusieurs maisons à Goma. Entretiens de Crisis
Group, anciens combattants, Bunia, novembre 2007.
166 L’UPC-K n’a jamais eu plus d’une centaine de combattants.
167 « Dix-huitième rapport du Secrétaire général sur la Mission
de l'Organisation des Nations Unies en République démocratique
du Congo », Conseil de sécurité des Nations unies,
S/2005/506, p. 5.
168 Certains UPC-L adhèrent au processus mais la plupart, sous
l’influence des officiers comme Jonvith Linganga et Bosco
Ntaganda, préfèrent rejoindre le MRC. Dans les faits, Bosco
Ntaganda remet une partie de ses armes lourdes à la MONUC
et plus tard une autre à Cobra Matata du FRPI. Sous prétexte
de se rendre à une réunion MRC chez Cobra Matata, Ntaganda
quitte l’Ituri. Après avoir traversé la rivière Semiliki en
pirogue, il atteint Rwabisengo en Ouganda puis se rend à
Bunagana et rejoint finalement l’insurrection armée de Laurent
Nkunda dans le Masisi. Entretiens de Crisis Group, des
anciens combattants MRC, Bunia, novembre 2007.
169 L’opération provoque en réalité une fragmentation croissante
du FNI entre les branches favorables à Njabu et celles
qui suivent Peter Karim. Ceux de Zumbe adhèrent au processus
de désarmement. En revanche, les branches Walendu Pitsi
et Watsi ainsi que le FNI de Loga refusent de désarmer.
170 L’idée de créer une alliance regroupant les milices de l’Ituri
encore actives aurait été lancée par Mathieu Ngudjolo et
Kakolele Bwambale alors qu’ils étaient tous deux, encore
détenus à la prison de Makala à Kinshasa. Le projet aurait reçu
le soutien de Laurent Nkunda. Après son évasion de la prison
de Makala, Kakolele retrouve Ngudjolo à Kampala. Les deux
hommes se rendent ensuite à Kigali dans la résidence de
Nkunda et engagent des discussions avec John Tibasima du
PUSIC, Justin Lobho du FNI Zumbe, Dido Manyihora, Sheriff
Ddjadza du FNI Kpandroma, Sambi du FRPI et Dieudonné
Mbuna de l’UPC. Ils s’entendent sur un cahier des charges
Congo: quatre priorités pour une paix durable en Ituri
Rapport Afrique de Crisis Group N°140, 13 mai 2008 Page 34
FRPI, 171 le MRC parvient à aligner jusqu’à 300 combattants
issus des trois groupes armés encore actifs dans
le district. Il s’affirme en attaquant les FARDC afin de
récupérer leur armement ou les chasser de certains axes
stratégiques.
Enfin, les difficultés persistantes observées dans la mise
en oeuvre du programme de désarmement du PNUD,172
les nouveaux massacres de civils,173 les agressions
régulières des FARDC contre la population et les
démobilisés174 et plus généralement l’absence de retour
de l’autorité de l’État en dehors de Bunia et de quelques
petits centres urbains, montrent très vite l’urgence
qu’il y a à lancer un nouveau plan d’action afin de
consolider le retour de la paix dans le district.
Malheureusement, après le départ de Bunia, en août
2005, de Mme MacAdams et, un mois plus tard, la fin
du DRC, le gouvernement de transition et la MONUC
commun au MRC puis rentrent en Ouganda pour annoncer
officiellement la création du mouvement, à Kampala, le 15
juin 2005. Aux termes de ce cahier des charges, le MRC
demandait l’octroi d’une région militaire en Ituri dirigée par un
officier MRC, l’intégration de ses éléments armés au sein des
FARDC et de ses cadres à des postes politiques, l’amnistie et
le retrait des mandats émis contre ses membres et la libération
de tous les détenus du mouvement à Bunia, Kisangani et
Kinshasa.
171 Le FRPI est en alliance avec le MRC mais reste indépendant.
Du côté FNI, la branche Ngudjolo rejoint le MRC mais
la branche Peter Karim ne noue qu’une relation de circonstance
avec le mouvement. Peter Karim souhaite uniquement
pouvoir utiliser l’armement du MRC pour lancer des attaques
sur Kudikoka, dans le territoire de Mahagi, où la présence
FARDC perturbe ses trafics d’or et de bois vers l’Ouganda.
Une fois cet objectif atteint, Peter Karim confisque l’armement
MRC et oblige les commandants du mouvement à partir. Le
MRC installe alors son quartier général dans le village de
Ngudjolo, à Kambutso, groupement Bedu Ezekere dans la
région de Zumbe.
172 Les filets de sécurité sont versés avec irrégularité et les
aides à la réinsertion avec plusieurs mois de retard. Les programmes
sont souvent mal ciblés et ne convainquent pas les
anciens combattants qu’une réinsertion dans la vie civile est
possible. Entretiens de Crisis Group, anciens combattants,
Bunia, novembre 2007.
173 « Rien de nouveau en Ituri : la violence continue », Médecins
sans Frontières, août 2005, disponible sur www.msf.ch/
fileadmin/user_upload/uploads/rapports/congo__rdc/violences
/Rap_ituri_FINAL_FR.pdf.
174 Plusieurs anciens combattants sont victimes d’attaques par
des FARDC au motif qu’ils auraient participé à des massacres
de militaires. D’autres se voient ravir leurs kits de réinsertion
ou l’argent versé dans le cadre du filet de sécurité par des
militaires frustrés de voir les anciens combattants assistés par
le PNUD alors qu’eux se sentent abandonnés par le gouvernement
de Kinshasa. Entretiens de Crisis Group, anciens combattants,
Bunia, novembre 2007.
n’accordent plus le même degré d’importance à l’Ituri
et aucune stratégie politique globale n’est arrêtée en
vue d’obtenir le désarmement. Les consultations engagées
par le PNUD en vue d’élaborer un plan d’action
conjoint avec la MONUC ne débouchent sur aucune
initiative d’envergure.
La priorité est clairement donnée au traitement sécuritaire
des problèmes de l’Ituri et les opérations conjointes
MONUC/FARDC se multiplient.175 Les objectifs
de ces opérations sont multiples : elles visent à
sanctionner les milices qui n’ont pas adhérer au DRC, à
déloger le MRC du littoral du lac Albert,176 mais également
à faire en sorte que les groupes armés ne puissent
venir perturber la conduite des opérations électorales.
En complément, des pressions sont exercées au niveau
diplomatique177 afin de priver les milices de leurs
soutiens extérieurs. De son côté, la CPI rend public le
17 mars 2006 le mandat d’arrêt contre Thomas
Lubanga qui est aussitôt transféré à la Haye.
Au bilan, les opérations conjointes parviennent à maintenir
les milices sous pression et à faire échec à la tentative
d’expansion du MRC.178 Elles s’avèrent toutefois
insuffisantes pour amener les milices à désarmer en
grand nombre et récupérer les armes détenues par les
communautés. La méfiance des miliciens et des populations
à l’égard des FARDC reste, en effet, très forte.179
La Commission nationale de démobilisation et de réinsertion
(CONADER) qui est chargée de mettre un
175 En octobre 2005, la MONUC et les FARDC se déploient
dans les zones aurifères de Kilo et Mongwalu privant ainsi les
groupes armés d’importantes sources de revenus. En
novembre les FARDC et la MONUC mènent une opération
conjointe contre les MRC dans le territoire d’Irumu. Au cours
du premier semestre 2006, FARDC et MONUC conduisent
plusieurs opérations similaires dans le territoire de Djugu et la
région de Fataki afin de contenir les activités du FNI et du
FRPI.
176 Mi 2005, le MRC a attaqué les positions les moins bien
défendues des FARDC dans cette région dite des Monts Bleus
et repris le contrôle du littoral du lac Albert.
177 Le 23 août 2005, le gouvernement ougandais déclare persona
non grata sur son territoire six dirigeants du MRC :
Dieudonné Mbuna, Mathieu Ngudjolo, Kakolele, Dido
Manihora, Sheriff Ndjadza et Sambi.
178 Au-delà de l’impact de ces opérations, le MRC reste
confronté à l’absence de confiance mutuelle entre miliciens
Lendu et Hema.
179 En octobre 2005, les FARDC de la 4ème brigade FARDC
basée à Awi tuent cinq enfants qu’ils avaient pris en otage
pour le transport de biens pillés dans la localité de Chekele.
Début 2006, des soldats FARDC attaquent directement des
communautés soupçonnées d’aider les groupes armés. Ils
massacrent plus de 60 civils et commettent un grand nombre
de viols.
Congo: quatre priorités pour une paix durable en Ituri
Rapport Afrique de Crisis Group N°140, 13 mai 2008 Page 35
nouveau programme de désarmement dans le cadre du
Programme national de désarmement, démobilisation et
réinsertion (PNDDR), n’inspire pas non plus confiance,
notamment chez les miliciens Hema qui l’accusent
d’avoir un parti pris pro-Lendu. Il est vrai, qu’avant
2003, le coordinateur de la CONADER, le Colonel
Duku, ex- G2, en charge du renseignement à l’Etat-
Major Opérationnel Intégré180 (EMOI) avait lui aussi
fait parti des officiers chargés par le président Kabila
d’alimenter en armes et de former les milices Lendu
dans le camps de Nyaleke, au Nord Kivu.
Comme en février 2005, c’est finalement la mort d’un
casque bleu et l’enlèvement de sept autres à Tsupu181
par le FNI de Peter Karim Udaga, le 28 mai 2006, qui
obligent la MONUC et la FARDC à reconsidérer
l’approche privilégiée depuis plus d’un an. Afin de protéger
la vie des otages, ils suspendent les opérations
militaires contre les FNI et engagent des tractations.182
Cependant, à quelques semaines de la tenue du premier
tour des élections présidentielles, les autorités congolaises
voient tout l’intérêt qu’il y aurait à utiliser ces
discussions pour initier un dialogue avec les communautés
locales et voir comment satisfaire certaines
revendications des groupes armés, restés relativement
populaires dans chacune de leur communauté respective.
Il s’agit non seulement d’obtenir un cessez-le-feu
afin que les scrutins ne soient pas perturbés, mais aussi
de faire en sorte qu’un maximum de voix puisse se
porter sur le candidat Kabila, dès le premier tour.
C’est ainsi que les tractations pour la libération des otages
se transforment rapidement en véritables négociations.
Après la reprise, le 29 juin, par les FRPI de leur ancien
bastion de Tcheyi, tombé un mois plus tôt aux mains
des FARDC et de la MONUC, les opérations conjointes
de désarmement forcé183 sont définitivement abandonnées,
ouvrant la voie à de véritables pourparlers de paix
avec les groupes armés.184
180 L’EMOI, était chargé de l’entraînement militaire des
milices Lendu du FNI et des FRPI. Il a assuré le transfert
d’armes et de munitions à Aveba et planifié et supervisé les
opérations de Nyakunde et de Tchomia.
181 Tsupu se trouve à côté de Libi entre Fataki et Niodha, dans
le territoire de Djugu.
182 Le Département des opérations de maintien de la paix à
New York envoie des instructions très claires dans ce sens afin
que la vie des otages ne soit pas mise en danger. Entretiens de
Crisis Group, un ancien responsable de la MONUC, Kinshasa,
juin 2007.
183 La MONUC se contente alors d’apporter un soutien
logistique et de former les brigades FARDC.
184 Après la reprise de Tcheyi, le FRPI lance des opérations sur
Aveba et sa région, entraînant de nombreux déplacements de
3. Le désarmement par la cooptation
Après 35 jours de discussions et la médiation de quelques
députés Lendu de la région, des notables Pitsi, les
sept casques bleus seront finalement libérés sains et
saufs.185 Le 10 juillet 2006, Peter Karim et le gouvernement
congolais signent un mémorandum d’accord sur les
conditions d’intégration du FNI au sein des FARDC.186
De nombreuses promesses lui sont faites et de l’argent
est distribué afin que sa communauté Walendu Pitsi
soutienne le président Kabila et son parti, le PPRD, lors
des élections.
Dans le même élan, le 26 juillet 2006, la MONUC organise
une rencontre entre le MRC de Mathieu Ngudjolo
et le colonel Mukuntu, représentant la présidence de la
république. Par un communiqué les deux parties affirment
s’être mises d’accord sur le principe de l’intégration
du MRC au sein des FARDC et sur celui d’une
amnistie générale au profit des miliciens. Ils s’engagent
également à ce que les élections du 30 juillet se déroulent
dans des conditions maximales de sécurité. Simultanément,
à partir du 5 juin 2006, la CONADER lance
son programme de désarmement DDR. Malgré l’absence
des FRPI dans ces négociations et une liberté de
circulation limitée pour les candidats, ces accords permettent
effectivement aux élections de se dérouler dans
le calme.
En revanche, le résultat en termes de désarmement des
milices est beaucoup plus décevant. Certes, officiellement,
entre juin et septembre 2006, 6 728 combattants
sont désarmés et 2 332 armes récupérées. Toutefois, il
apparaît rapidement que les groupes armés ont conservé
une capacité opérationnelle relativement intacte et que
les chiffres de démobilisés fournis par la CONADER
ont été artificiellement gonflés. Profitant du manque de
rigueur dans le processus d’identification des combattants,
de nombreux « faux miliciens » attirés par l’argent
promis aux démobilisés se sont faits enregistrés alors
qu’ils ne figuraient sur aucune liste et qu’ils ne pouvaient
pas remettre une seule arme à feu. Le ratio de un
à trois entre le nombre d’armes collectées et le nombre
de combattants démobilisés est, en effet, très bas.
population. Le 6 juillet 2006, des tirs d’AK-47 provenant
d’une zone FRPI atteignent un hélicoptère de la MONUC.
185 Deux le 27 juin et les cinq autres, le 8 juillet 2006.
186 Les autorités congolaises se montrent très généreuses avec
Peter Karim afin de s’assurer du calme et du soutien de la
communauté des Walendu Pitsi. Plusieurs de ses anciens
proches sont élus, comme Bura Pulinion au poste de député
national et Ferdinand Ngbadhego à celui de député provincial.
La MONUC et les agences évoquent de leur côté la construction
de routes et d’écoles dans sa communauté. Entretiens de
Crisis Group, des ex-miliciens, Bunia, juin 2007.
Congo: quatre priorités pour une paix durable en Ituri
Rapport Afrique de Crisis Group N°140, 13 mai 2008 Page 36
Par ailleurs, dans les mois qui suivent l’opération, le
manque de suivi dans les actions de réinsertion proposées
par la CONADER amène de très nombreux combattants
officiellement démobilisés à rejoindre leur
groupe armé d’origine dès leur sortie des sites de transit
et le paiement du filet de sécurité.187
En réalité, les chefs des groupes armés attendent toujours,
avant de déposer les armes, un engagement solennel du
gouvernement en matière d’amnistie, de reconnaissance
de grade mais aussi la confirmation de la victoire officielle
du président Kabila qui a envoyé ses représentants
négocier avec eux. Or courant août, la contre performance
relative du président Kabila au premier tour ne
fait plus de doute, rendant nécessaire l’organisation d’un
second tour à l’issue incertaine. Devant le risque d’enlisement
du dossier et alors que la situation sécuritaire
sur le terrain se dégrade à nouveau sous l’effet des exactions
des FARDC et des FRPI188 le RSSG adjoint, Hailé
Menkerios, fait pression sur le conseiller spécial en
matière de sécurité à la présidence, Samba Kaputo,189
pour qu’une délégation de haut niveau retourne sur le
terrain et finalise rapidement les accords.
Dès la proclamation officielle de la victoire du président
Kabila par la Commission électorale indépendante,
le 15 novembre 2006, les discussions connaissent ainsi
une brutale accélération. Le 16 novembre, une délégation
des autorités congolaises et de la MONUC rencontre
le MRC de Mathieu Ngudjolo à Kambutso.190 Au
terme de la rencontre, les deux parties signent un
accord prévoyant l’envoi au brassage de l’ensemble des
troupes du MRC au plus tard le 31 décembre 2006 et
187 Entretien de Crisis Group, des ex-combattants, Bunia,
novembre 2007.
188 Entre août et novembre 2006, la 1ère brigade intégrée de
l’Ituri commet, selon la MONUC, pas moins de 32 exécutions
sommaires de civils parmi lesquels deux agents de la CEI, le
29 octobre à Fataki. Le 7 octobre 2006, des FRPI lancent une
attaque contre la 6ème brigade FARDC sur le mont Omi. Au
cours de cette opération, plusieurs miliciens dont trois commandants
FRPI, Mukiro alias Yuda, Soleil et Moise Oudo sont
tués. Le 10 octobre 2006, les hommes de la 13ème brigade
intégrée venu du centre de brassage de Nyaleke, dans le territoire
de Béni, sont déployés sur le terrain en remplacement du
811ème bataillon qui n’avait jamais été brassé et s’était montré
très indiscipliné. Le 18 novembre, des affrontements surviennent
entre cette brigade et le FRPI à Auva, dans le groupement
de Boloma.
189 Le directeur de Cabinet de Samba Kaputo, Pierre Lumbi, le
conseiller à la présidence Mwarabu, le Colonel Mukuntu et le
Major Tumba sont les plus impliqués sur ce dossier.
190 Cette décision est confirmée lors du congrès du MRC les
25-27 novembre qui décide de l’envoi au 4 décembre 2006 à
Rwampara de 200 éléments MRC avec 185 armes.
l’octroi d’une amnistie générale.191 Le gouvernement
promet également à Ngudjolo un poste de colonel au sein
des FARDC, ainsi que les grades de lieutenants colonels
pour quatre de ses officiers. Le 17 novembre, Ngudjolo
se rend à Bunia afin d’y rencontrer le nouveau commandant
de la zone opérationnelle des FARDC en Ituri,
le Général Vainqueur Mayala. Il s’adresse également à
la radio pour confirmer la fin de la guerre et annoncer
l’intégration du MRC au sein des FARDC.192
Le 18 novembre, une délégation du ministère congolais
de la Défense et de la MONUC se rend à Doi dans le
territoire de Djugu pour négocier avec Peter Karim.
Peter Karim promet d’envoyer ses premiers éléments
armés au centre de transit de Kpandroma dès le 27
novembre. Enfin, le 28 novembre, Cobra Matata finit
également par signer un accord de paix avec le gouvernement,
193 tandis que le lendemain a lieu une rencontre
entre des responsables du FRPI et le vice-ministre de la
Défense, à Bunia. Le 29 novembre, le MRC et les FRPI
signent finalement avec le gouvernement un accord
cadre prévoyant le lancement d’une troisième phase de
désarmement, conformément aux principes du PNDDR.
Le 14 décembre, le FNI de Peter Karim adhère également
à l’accord.
Considéré comme une avancée majeure et l’ultime étape
du désarmement définitif des groupes armés de l’Ituri,
cet accord s’avère, dans les faits, difficile à mettre en
oeuvre. Des affrontements ont lieu entre les FNI et les
FARDC le 24 décembre. En mars 2007, seuls une centaine
de FNI se sont effectivement rendus sur les sites de
brassage tandis que les FRPI n’ont envoyé qu’une
dizaine de miliciens et une quarantaine d’enfants associés.
Plus de six mois sont nécessaires pour que les chefs
de milices acceptent de sortir de brousse. La phase III du
désarmement qui se met en place le 4 août 2007 permet
de désarmer 1 840 miliciens.
191 L’accord signé le 16 novembre 2006 entre le colonel
Mukuntu pour le gouvernement de la RDC et Mathieu Ngudjolo
prévoit à son article 6 de formaliser l’amnistie, notamment à
travers le retrait des mandats d’arrêts internationaux à charge
des membres du MRC engagés dans le processus.
192 Le MRC organise, les 25-27 novembre un congrès dans la
localité de Kambutso au cours duquel il décide de se scinder
en une branche politique et en branche armée. La présidence
du mouvement est confiée à Justin Ngabu et le secrétariat à
Mbuna Dieudonné. Entretiens de Crisis Group, ex-combattants
MRC, Bunia, juin 2007.
193 L’accord retient la date du 11 décembre pour l’arrivée de
300 FRPI au centre de transit d’Aveba. Cobra Matata avait
déjà été nommé au grade de Colonel des FARDC en janvier
2005.
Congo: quatre priorités pour une paix durable en Ituri
Rapport Afrique de Crisis Group N°140, 13 mai 2008 Page 37
ANNEXE E
LISTE DES ACRONYMES
AAG Anglo Ashanti Goldfield
APC Armée populaire congolaise
CCGA Comité de concertation des groupes armés de l’Ituri
CEA Communauté Est Africaine
CIAT Comité international d’appui à la transition
CNDP Congrès national pour la défense du peuple
CONADER Commission nationale de démobilisation et de réinsertion
CPI Cour pénale internationale
DDR Programme de désarmement, démobilisation et réintégration
DGI Direction générale des impôts
DGM Direction générale des migrations congolaise
DGRAD Direction générale des recettes administratives domaniales, judiciaires et de participation
DRC Programme de désarmement et réinsertion communautaire
EMOI État-major opérationnel intégré
EUSEC Mission de l’UE, à caractère civil, de conseil et d’assistance de l’Union européenne en
matière de réforme du secteur de la sécurité
FAPC Forces armées du peuple congolais
FARDC Forces armées de la République démocratique du Congo
FMIU Force multinationale intérimaire d’urgence
FNI Front des nationalistes intégrationnistes
FPDC Forces populaires pour la démocratie au Congo
FRPI Forces de résistance patriotique en Ituri
LRA L’Armée de résistance du Seigneur, un mouvement en rébellion contre le gouvernement
de l’Ouganda
MLC Mouvement pour la libération du Congo
MONUC Mission des Nations unies en République démocratique du Congo.
MRC Mouvement révolutionnaire congolais
MSR Mouvement social pour le Renouveau (parti congolais)
OCC Office Congolais de Contrôle (établissement public à caractère technique et commercial
doté de la personnalité juridique et placé sous la tutelle du Ministère du commerce)
OCHA Bureau de la coordination des affaires humanitaires de l’ONU
OFIDA Office congolais des douanes
OKIMO Office des mines d’or de Kilomoto
ONU Organisation des Nations unies
PNDDR Programme national de désarmement, démobilisation et réinsertion
PNUD Programme des Nations unies pour le développement
PPRD Parti du peuple pour la reconstruction et la démocratie
PUSIC Parti pour l’unité et la sauvegarde de l’intégrité du Congo
RCD-ML Rassemblement congolais pour la démocratie-mouvement de libération
RCN Réseau de citoyens, justice et démocratie, une ONG belge agissant pour la promotion du
droit et l’indépendance de la justice
RDC République démocratique du Congo
RHA Réseau HAKI NA AMANI (Justice et Paix), constitué des ONGs non confessionnelles et
confessionnelles qui travaillent sur les problématiques de la paix, de la gestion des conflits
et des droits humains
Congo: quatre priorités pour une paix durable en Ituri
Rapport Afrique de Crisis Group N°140, 13 mai 2008 Page 38
RSSG Représentant spécial du Secrétaire général de l’Organisation des Nations unies
UE Union européenne
UNHCR Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés
UNICEF Le Fonds des Nations unies pour l'enfance
UPC Union des patriotes congolais
UPDF Les Forces de défense du peuple de l’Ouganda
Congo: quatre priorités pour une paix durable en Ituri
Rapport Afrique de Crisis Group N°140, 13 mai 2008 Page 39
ANNEXE F
À PROPOS D'INTERNATIONAL CRISIS GROUP
International Crisis Group est une organisation nongouvernementale
indépendante à but non lucratif qui emploie
près de 135 personnes réparties sur cinq continents. Cellesci
conçoivent des analyses de terrain et mènent une
sensibilisation à haut niveau dans un but de prévention et
de résolution des conflits.
L’approche de Crisis Group est fondée sur une recherche de
terrain. Des équipes d'analystes postés dans des pays à risque
ou à proximité de ceux-ci effectuent des recherches sur le
terrain. À partir des informations recueillies et des évaluations
de la situation sur place, Crisis Group rédige des rapports
analytiques rigoureux qui s’accompagnent de recommandations
pratiques destinées aux décideurs internationaux. Crisis Group
publie également CrisisWatch, un bulletin mensuel de 12 pages
offrant une mise à jour régulière et succincte des situations de
conflit potentiel ou en cours les plus importantes partout dans
le monde.
Les rapports et briefings de Crisis Group sont largement
diffusés par courrier électronique et par l’envoi de versions
imprimées à de nombreux ministères des Affaires étrangères
et organisations internationales. Ils sont également accessibles
au grand public via le site internet de l’organisation :
www.crisisgroup.org. Crisis Group travaille en étroite
collaboration avec les gouvernements et ceux qui les
influencent, notamment les médias, afin de les sensibiliser à ses
analyses et de générer un soutien pour ses recommandations
politiques.
Le Conseil d'administration de Crisis Group, qui compte
d'éminentes personnalités du monde politique, diplomatique,
des affaires et des médias, s'engage directement à promouvoir
rapports et recommandations auprès des décideurs politiques
du monde entier. Crisis Group est co-présidé par Christopher
Patten, ancien Commissaire européen aux Relations
extérieures, et par Thomas Pickering, ancien ambassadeur des
États-Unis. Gareth Evans, ancien ministre australien des
Affaires étrangères, en est le président depuis janvier 2000.
Crisis Group a son siège à Bruxelles et des bureaux de liaison à
Washington, New York, Londres et Moscou. L'organisation
dispose actuellement de onze bureaux de terrain (à Bichkek,
Bogota, Le Caire, Dakar, Islamabad, Istanbul, Jakarta, Nairobi,
Pristina, Séoul et Tbilissi) et seize représentations locales (Abuja,
Bakou, Bangkok, Beyrouth, Belgrade, Colombo, Damas,
Dili, Douchanbé, Erevan, Jérusalem, Kaboul, Katmandou,
Kinshasa, Port-au-Prince, Pretoria et Téhéran). Crisis Group
couvre une soixantaine de pays et territoires touchés ou menacés
par des crises sur quatre continents. En Afrique, il s’agit de :
Burundi, Côte d’Ivoire, Érythrée, Éthiopie, Guinée, Kenya,
Liberia, Ouganda, République centrafricaine, République
démocratique du Congo, Rwanda, Sierra Leone, Somalie,
Soudan, Tchad et Zimbabwe ; en Asie : Afghanistan,
Bengladesh, Birmanie, Cachemire, Corée du Nord, Indonésie,
Kazakhstan, Kirghizstan, Népal, Ouzbékistan, Pakistan,
Philippines, Sri Lanka, Tadjikistan, Thaïlande, Timor-Leste
et Turkménistan; en Europe : Arménie, Azerbaïdjan, Bosnie-
Herzégovine, Chypre, Géorgie, Kosovo, Serbie et Turquie; au
Moyen-Orient : toute la région qui s'étend de l'Afrique du Nord
à l'Iran ; et en Amérique Latine : Colombie, région andine et
Haïti.
Crisis Group est financé par des gouvernements, des fondations
caritatives, des sociétés et des donateurs privés. Les agences
et départements gouvernementaux qui financent actuellement
Crisis Group sont : l’Agence australienne pour le développement
international, l’Agence autrichienne pour le développement,
l’Agence canadienne de développement international,
l'Agence américaine pour le développement international,
l’Agence néo-zélandaise pour le développement international,
l’Aide irlandaise, le Centre canadienne de recherches pour le
développement international, le Conseil de la Recherche
Economique et Sociale du Royaume-Uni, le Département
des Affaires étrangères et du Commerce de l’Australie, le
Département des Affaires étrangères et du Commerce
international du Canada, le Département fédéral des Affaires
étrangères de la Confédération suisse, le Département du
Royaume-Uni pour le développement international, le
Ministère fédéral allemand des Affaires étrangères, le Ministère
belge des Affaires étrangères, le Ministère finlandais des
Affaires étrangères, le Ministère français des Affaires
étrangères, la Principauté du Liechtenstein, le Ministère
luxembourgeois des Affaires étrangères, le Ministère
néerlandais des Affaires étrangères, le Ministère suédois des
Affaires étrangères, le Ministère tchèque des Affaires étrangères,
le Ministère royal des Affaires étrangères du Danemark, le
Ministère royal norvégien des Affaires étrangères, le Ministère
des Affaires étrangères turc et le Qatar.
Les fondations et donateurs du secteur privé regroupent:
Carnegie Corporation of New York, Ford Foundation, Fundación
DARA Internacional, Iara Lee and George Gund III
Foundation William & Flora Hewlett Foundation, Hunt
Alternatives Fund, Kimsey Foundation, Korea Foundation,
John D. & Catherine T. MacArthur Foundation, Charles
Stewart Mott Foundation, Open Society Institute, Pierre
and Pamela Omidyar Fund, Ploughshares Fund, Victor
Pinchuk Foundation, Provictimis Foundation, Radcliffe
Foundation, Sigrid Rausing Trust, et VIVA Trust.
mai 2008
De plus amples renseignements concernant Crisis Group sont disponibles sur notre site web: www.crisisgroup.org
Congo: quatre priorités pour une paix durable en Ituri
Rapport Afrique de Crisis Group N°140, 13 mai 2008 Page 40
ANNEXE G
RAPPORTS ET BRIEFINGS DE CRISIS GROUP DEPUIS JANVIER 2005
AFRIQUE AUSTRALE
Post-Election Zimbabwe: What Next?, Rapport Afrique Nº93,
7 juin 2005
Swaziland: The Clock Is Ticking, Briefing Afrique Nº29, 14
juillet 2005
Zimbabwe's Operation Murambatsvina: The Tipping Point?,
Rapport Afrique Nº97, 17 août 2005
Zimbabwe’s Continuing Self-Destruction, Briefing Afrique
N°38, 6 juin 2006
Zimbabwe: An Opposition Strategy, Rapport Afrique N°117,
24 août 2006
Zimbabwe: An End to the Stalemate?, Rapport Afrique
N°122, 5 mars 2007
Zimbabwe: A Regional Solution?, Rapport Afrique N°132,
18 septembre 2007
Zimbabwe: Prospects from a Flawed Election, Rapport Afrique
N°138, 20 mars 2008
AFRIQUE CENTRALE
Peace in Northern Uganda: Decisive Weeks Ahead, Briefing
Afrique N°22, 21 février 2005
The Congo's Transition is Failing: Crisis in the Kivus,
Rapport Afrique Nº91, 30 mars 2005
Shock Therapy for Northern Uganda's Peace Process, Briefing
Afrique Nº23, 11 avril 2005
The Congo: Solving the FDLR Problem Once and For All,
Briefing Afrique Nº25, 12 mai 2005
Building a Comprehensive Peace Strategy for Northern
Uganda, Briefing Afrique Nº27, 23 juin 2005
Élections au Burundi: reconfiguration radicale du paysage
politique, Briefing Afrique Nº31, 25 août 2005 (aussi disponible
en anglais)
A Congo Action Plan, Briefing Afrique N°34, 19 octobre 2005
Katanga: la crise oubliée de la RDC, Rapport Afrique N°103,
9 janvier 2006 (aussi disponible en anglais)
A Strategy for Ending Northern Uganda’s Crisis, Briefing
Afrique N°35, 11 janvier 2006
La réforme du secteur de la sécurité en RDC, Rapport Afrique
N°104, 13 février 2006 (aussi disponible en anglais)
Congo’s Elections: Making or Breaking the Peace, Rapport
Afrique N°108, 27 avril 2006
Beyond Victimhood: Women’s Peacebuilding in Sudan, Congo
and Uganda, Rapport Afrique N°112, 28 juin 2006
Sortir du piège du conflit: promouvoir la bonne gouvernance au
Congo, Rapport Afrique N°114, 20 juillet 2006 (aussi disponible
en anglais)
Peace in Northern Uganda?, Briefing Afrique N°41, 13
septembre 2006
La sécurité des élections au Congo: les leçons des affrontements
de Kinshasa, Briefing Afrique N°42, 2 octobre 2006 (aussi
disponible en anglais)
Burundi: la démocratie et la paix en danger, Rapport Afrique
N°120, 30 novembre 2006 (aussi disponible en anglais)
Congo: poursuivre l’engagement international après les
élections, Briefing Afrique N°44, 9 janvier 2007
Northern Uganda: Seizing the Opportunity for Peace, Rapport
Afrique N°124, 26 avril 2007
Congo: consolider la paix, Rapport Afrique N°128, 5 juillet
2007 (aussi disponible en anglais)
Burundi : conclure la paix avec les FNL, Rapport Afrique
N°131, 28 août 2007 (aussi disponible en anglais)
Le processus de paix pour le Nord de l’Ouganda : continuer
sur la lancée, Briefing Afrique N°46, 14 septembre 2007
Congo: ramener la paix au Nord Kivu, Rapport Afrique
N°133, 31 octobre 2007 (aussi disponible en anglais)
Republique Centrafricaine : anatomie d’un État fantôme,
Rapport Afrique N°136, 13 décembre 2007 (aussi disponible
en anglais)
AFRIQUE DE L’OUEST
Côte d'Ivoire: le pire est peut-être à venir, Rapport Afrique
N°90, 23 mars 2005
Islamist Terrorism in the Sahel: Fact or Fiction?, Rapport
Afrique Nº92, 31 mars 2005
Guinée: conjurer la descente aux enfers, Rapport Afrique
N°94, 13 juin 2005 (aussi disponible en anglais)
Liberia's Elections: Necessary but Not Sufficient, Rapport
Afrique N°98, 7 septembre 2005
Côte d'Ivoire: les demi-mesures ne suffiront pas, Briefing
Afrique N°33, 12 octobre 2005
Liberia: Staying Focused, Briefing Afrique N°36, 13 janvier 2006
Liberia: Resurrecting the Justice System, Rapport Afrique
N°107, 6 avril 2006
La Guinée en transition, Briefing Afrique N°37, 11 avril
2006 (aussi disponible en anglais)
Côte d’Ivoire: la paix comme option, Rapport Afrique N°109,
17 mai 2006
Nigeria: Want in the Midst of Plenty Rapport Afrique N°113,
19 juillet 2006
The Swamps of Insurgency: Nigeria’s Delta Unrest, Rapport
Afrique N°115, 3 août 2006
Côte d’Ivoire: augmenter la pression, Briefing Afrique N°40, 7
septembre 2006
Fuelling the Niger Delta Crisis, Rapport Afrique N°118, 28
septembre 2006
Nigeria’s Faltering Federal Experiment, Rapport Afrique
N°119, 25 octobre 2006
Guinée: le changement ou le chaos, Rapport Afrique N°121,
14 février 2007
Nigeria’s Elections: Avoiding a Political Crisis, Rapport
Afrique N°123, 28 mars 2007
Nigeria: Failed Elections, Failing State?, Rapport Afrique
N°126, 30 mai 2007
Congo: quatre priorités pour une paix durable en Ituri
Rapport Afrique de Crisis Group N°140, 13 mai 2008 Page 41
Côte d'Ivoire: Faut-il croire à l’accord de Ouagadougou ?,
Rapport Afrique N°127, 27 juin 2007 (aussi disponible en
anglais)
Sierra Leone: The Election Opportunity, Rapport Afrique
N°129, 12 juillet 2007
Guinée: le changement en sursis, Briefing Afrique N°49, 8
novembre 2007 (aussi disponible en anglais)
Nigeria: Ending Unrest in the Niger Delta, Rapport Afrique
N°135, 5 décembre 2007
Côte d'Ivoire: garantir un processus électoral crédible,
Rapport Afrique N°139, 22 avril 2008
CORNE DE L’AFRIQUE
Darfur: The Failure to Protect, Rapport Afrique N°89, 8 mars
2005 (aussi disponible en arabe)
A New Sudan Action Plan, Briefing Afrique Nº24, 26 avril 2005
Do Americans Care About Darfur?, Briefing Afrique Nº26, 1
juin 2005
The AU's Mission in Darfur: Bridging the Gaps, Briefing Afrique
Nº28, 1 juin 2005
Counter-Terrorism in Somalia: Losing Hearts and Minds?,
Rapport Afrique Nº95, 11 juillet 2005
The Khartoum-SPLM Agreement: Sudan's Uncertain
Peace, Rapport Afrique Nº96, 25 juillet 2005
Garang's Death: Implications for Peace in Sudan, Briefing
Afrique Nº30, 9 août 2005 (aussi disponible en arabe)
Unifying Darfur's Rebels: A Prerequisite for Peace, Briefing
Afrique N°32, 6 octobre 2005 (aussi disponible en arabe)
The EU/AU Partnership in Darfur: Not Yet a Winning
Combination, Rapport Afrique N°99, 25 octobre 2005
Somalia’s Islamists, Rapport Afrique N°100, 12 décembre 2005
Ethiopia and Eritrea: Preventing War, Rapport Afrique N°101,
22 décembre 2005
Sudan: Saving Peace in the East, Rapport Afrique N°102, 5
janvier 2006
To Save Darfur, Rapport Afrique N°105, 17 mars 2006
Sudan’s Comprehensive Peace Agreement: The Long
Road Ahead, Rapport Afrique N°106, 31 mars 2006
Somaliland: à l’Union africaine de montrer le chemin, Rapport
Afrique Nº110, 23 mai 2006 (aussi disponible en anglais)
Tchad: vers le retour de la guerre, Rapport Afrique N°111,
1er juin 2006
Darfur’s Fragile Peace Agreement, Briefing Afrique N°39,
20 juin 2006 (aussi disponible en arabe)
Beyond Victimhood: Women’s Peacebuilding in Sudan, Congo
and Uganda, Rapport Afrique N°112, 28 juin 2006
Can the Somali Crisis be Contained? Rapport Afrique N°116,
10 août 2006
Getting the UN into Darfur, Briefing Afrique N°43, 12 octobre
2006
Somalia: The Tough Part Is Ahead, Briefing Afrique N°45, 26
janvier 2007
Darfur: Revitalising the Peace Process, Rapport Afrique N°125,
30 avril 2007
A Strategy for Comprehensive Peace in Sudan, Rapport Afrique
N°130, 26 juillet 2007 (aussi disponible en arabe)
Sudan: Breaking the Abyei Deadlock, Briefing Afrique N°45,
12 octobre 2007 (aussi disponible en arabe)
Ethiopia and Eritrea: Stopping the Slide to War, Briefing Afrique
N°47, 5 novembre 2007
Darfur’s New Security Reality, Rapport Afrique N°134, 26
novembre 2007 (aussi disponible en arabe)
Kenya in Crisis, Rapport Afrique N°137, 21 février 2008
Sudan’s Comprehensive Peace Agreement: Beyond the
Crisis, Briefing Afrique N°50, 13 mars 2008 (aussi disponible
en arabe)
AUTRES RAPPORTS ET BRIEFINGS
Pour les rapports et les briefings de Crisis Group sur
• l’Asie ;
• l’Afrique ;
• l’Europe ;
• l'Amérique latine et la Caraïbe ;
• le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord ;
• des sujets thématiques ;
• CrisisWatch,
veuillez vous rendre sur notre site web : www.crisisgroup.org.
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Rapport Afrique de Crisis Group N°140, 13 mai 2008 Page 42
ANNEXE H
CONSEIL D'ADMINISTRATION DE L’INTERNATIONAL CRISIS GROUP
Co-présidents
Christopher Patten
Ancien commissaire européen aux Relations extérieures; ancien
gouverneur de Hong Kong; ancien membre du Conseil des ministres
britannique; chancelier de l’université d'Oxford
Thomas Pickering
Ancien ambassadeur des États-Unis auprès des Nations Unies, de
la Russie, de l’Inde, d’Israël, d’El Salvador, du Nigéria et de la
Jordanie
Président directeur général
Gareth Evans
Ancien ministre des Affaires étrangères d'Australie
Comité de direction
Morton Abramowitz
Ancien secrétaire d’État adjoint; ancien ambassadeur des États-
Unis en Turquie
Cheryl Carolus
Ancienne Haut Commissaire de l’Afrique du Sud auprès du
Royaume-Uni; ancienne secrétaire générale de l'ANC
Maria Livanos Cattaui*
Ancienne secrétaire générale de la Chambre de commerce
internationale
Yoichi Funabashi
Éditorialiste en chef et chroniqueur de l’Asahi Shimbun, Japon
Frank Giustra
Président du conseil d’Endeavour Financial Corporation, Canada
Stephen Solarz
Ancien membre du Congrès des États-Unis
George Soros
Président de l’Open Society Institute
Pär Stenbäck
Ancien ministre des Affaires étrangères, Finlande
*Vice-présidente
Adnan Abu-Odeh
Ancien conseiller politique du Roi Abdallah II et du Roi Hussein;
ancien représentant permanent de la Jordanie auprès des Nations
unies
Kenneth Adelman
Ancien ambassadeur des États-Unis et directeur de l'Agence
américaine pour le contrôle des armes et le désarmement
Ersin Arioglu
Membre du Parlement turc; président émérite de Yapi Merkezi
Shlomo Ben-Ami
Ancien ministre des Affaires étrangères d’Israël
Lakhdar Brahimi
Ancien conseiller spécial du Secrétaire général des Nations unies;
ancien ministre des Affaires étrangères algérien
Zbigniew Brzezinski
Ancien conseiller à la Sécurité nationale auprès du président des
États-Unis
Kim Campbell
Ancienne Premier ministre du Canada
Naresh Chandra
Ancien secrétaire de cabinet; ancien ambassadeur de l’Inde aux
États-Unis
Joaquim Alberto Chissano
Ancien président du Mozambique
Victor Chu
Président du First Eastern Investment Group, Hong Kong
Wesley Clark
Ancien commandant suprême des forces alliées de l'OTAN en Europe
Pat Cox
Ancien président du Parlement européen
Uffe Ellemann-Jensen
Ancien ministre des Affaires étrangères du Danemark
Mark Eyskens
Ancien Premier ministre de Belgique
Joschka Fischer
Ancien ministre des Affaires étrangères d’Allemagne
Leslie H. Gelb
Président émérite du Conseil des Relations étrangères, États-Unis
Carla Hills
Ancienne ministre au Logement; ancienne représentante au Commerce
extérieur des États-Unis
Lena Hjelm-Wallén
Ancienne Vice-Premier ministre et ministre des Affaires étrangères
de Suède
Swanee Hunt
Présidente de l’Initiative for Inclusive Security, Présidente, Hunt
Alternatives Fund; ancienne ambassadrice des États-Unis en
Autriche
Anwar Ibrahim
Ancien Premier ministre adjoint de Malaisie
Asma Jahangir
Rapporteur spécial des Nations unies sur la liberté de religion ou
de conviction; présidente de la Commission des droits de
l'Homme au Pakistan
Nancy Kassebaum Baker
Ancienne sénatrice des États-Unis
James V. Kimsey
Fondateur et président honoraire d’America Online, inc. (AOL)
Wim Kok
Ancien Premier ministre des Pays-Bas
Ricardo Lagos
Ancien président du Chili
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Rapport Afrique de Crisis Group N°140, 13 mai 2008 Page 43
Joanne Leedom-Ackerman
Romancière et journaliste, États-Unis
Ayo Obe
Présidente du comité directeur du Mouvement mondial pour la
démocratie, Nigéria
Christine Ockrent
Journaliste et écrivain, France
Victor Pinchuk
Fondateur de l’Interpipe Scientific and Industrial Production
Group
Samantha Power
Écrivain: professeur à la Kennedy School of government, Harvard
University
Fidel V. Ramos
Ancien président des Philippines
Ghassan Salamé
Ancien ministre du Liban; professeur de relations internationales à
Paris
Douglas Schoen
Partenaire fondateur de Penn, Schoen & Berland Associates, États-
Unis
Thorvald Stoltenberg
Ancien ministre des Affaires étrangères de Norvège
Ernesto Zedillo
Ancien président du Mexique; directeur du Yale Center for the
Study of Globalization
CONSEIL PRÉSIDENTIEL
Le conseil présidentiel de Crisis Group est un groupe éminent de donateurs privés qui apportent un soutien essentiel, du
temps et une expertise à Crisis Group dans l’accomplissement de sa mission.
Khalid Alireza
Canaccord Adams Limited
Bob Cross
Equinox Partners
Frank Holmes
Iara Lee & George Gund
III Foundation
Ford Nicholson
Ian Telfer
Guy Ullens de Schooten
Neil Woodyer
Don Xia
CONSEIL CONSULTATIF INTERNATIONAL
Le Conseil consultatif international est constitué de donateurs privés qui contribuent régulièrement, par leur savoir et leur
expérience, aux activités de Crisis Group.
Rita E. Hauser
(Co-Chair)
Elliott Kulick
(Co-Chair)
Marc Abramowitz
Hamza al Kholi
Anglo American PLC
APCO Worldwide Inc.
Ed Bachrach
Patrick Benzie
Stanley Bergman &
Edward Bergman
BHP Billiton
Harry Bookey and
Pamela Bass-Bookey
John Chapman Chester
Chevron
Citigroup
Richard Cooper
Credit Suisse
Neil & Sandy DeFeo
John Ehara
Frontier Strategy Group
Seth Ginns
Alan Griffiths
Charlotte & Fred Hubbell
Khaled Juffali
George Kellner
Amed Khan
Shiv Vikram Khemka
Scott Lawlor
StatoilHydro ASA
McKinsey & Company
Harriet Mouchly-Weiss
Najib Mikati
Donald Pels
PT Newmont Pacific
Nusantara (Robert
Humberson)
Michael Riordan
Tilleke & Gibbins
Vale
VIVATrust
Stanley Weiss
Yasuyo Yamazaki
Yapi Merkezi
Construction and
Industry Inc.
Shinji Yazaki
Sunny Yoon
CONSEILLERS
Les conseillers sont d'anciens membres du Conseil d'administration qui maintiennent leur collaboration avec Crisis Group
et sont sollicités de façon ponctuelle pour apporter leurs conseils et leur soutien à Crisis Group.
Martti Ahtisaari
(Président émérite)
Diego Arria
Paddy Ashdown
Zainab Bangura
Christoph Bertram
Jorge Castañeda
Alain Destexhe
Marika Fahlen
Stanley Fischer
Malcolm Fraser
Bronislaw Geremek
I.K. Gujral
Max Jakobson
Todung Mulya Lubis
Allan J. MacEachen
Barbara McDougall
Matthew McHugh
George J. Mitchell
(Président émérite)
Surin Pitsuwan
Cyril Ramaphosa
George Robertson
Michel Rocard
Volker Ruehe
Mohamed Sahnoun
Salim A. Salim
William Taylor
Leo Tindemans
Ed van Thijn
Shirley Williams
Grigory Yavlinski
Uta Zapf

SOURCE: RELEIFWEB

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