La terre a toujours été la principale base des conflits entre différentes communautés ethniques de l’Ituri, un district de la Province orientale, dans le nord-est de la République démocratique du Congo (RDC).
Des rapports d’organisations non gouvernementales (ONG) locales affirment qu’entre 2006 et 2010, ces conflits, qui ont parfois engendré des affrontements directs entre membres de différentes communautés, ont fait entre 100.000 et 150.000 victimes.
«Pour prévenir de nouveaux conflits et résorber les effets des conflits du passé, les femmes et autres acteurs des ONG ont mis en place des initiatives privées pour la sensibilisation et la formation de la population aux droits de l’Homme, à la prévention et à la gestion pacifique des conflits dans les communautés», déclare Marie Kanyobayo, responsable de l’Union des femmes pour le développement (UFD), une ONG locale.
Selon Kanyobayo, «la femme étant généralement une actrice majeure pour la construction et le maintien de la paix au sein des familles, l’UFD fonde sa sensibilisation et sa formation sur le rôle de la femme pour la construction de la paix et de la justice sociales».
Et elle ajoute : «Le succès de ces actions réside dans le fait qu’elles impliquent beaucoup d’acteurs sociaux, parmi lesquels les Nations Unies, des organisations internationales, des autorités locales, y compris celles de la police et de l’armée congolaises».
Jeanine Kiwa, une agricultrice, qui s’est vu arracher son champ lors de la guerre par un groupe de combattants Hema qui y ont installé leur quartier général en 2005, a indiqué «avoir recouvré son champ depuis 2009 grâce aux interventions de l’UFD et d’autres ONG qui sensibilisent sur la justice».
«L’UFD a parlé à ces anciens combattants qui avaient déjà vendu une partie de mon champ. J’ai récupéré la partie qui n’était pas encore vendue. Ils m’ont demandé pardon devant le chef du territoire de Njugu et je leur ai pardonné», a-t-elle dit à IPS.
«La population en général ignore le droit applicable aux problèmes des terres. La justice coûte cher et la population est pauvre. Cette justice est inaccessible et les victimes renoncent à prendre part à des procédures, souvent longues et inefficaces», explique Alfred Mbutu, prêtre et membre de la Commission diocésaine de justice et de paix qui organise aussi des séances de sensibilisation des communautés locales pour la paix et la justice.
«En collaboration avec tous ces partenaires, nous avons déjà organisé plusieurs campagnes d’information et de sensibilisation à Mahagi, Njugu, Aru et Mambasa, quatre territoires administratifs de l’Ituri», a indiqué Gilbert Tandia Bakonzi, formateur au sein du 'Centre Pélican Training for Peace and Justice', une ONG congolaise basée en Ituri.
Tandia a expliqué à IPS : «Chacun des acteurs intervenants s’occupe d’un volet qui relève de sa compétence. Par exemple l’ONU Habitat, qui a une grande expérience dans la résolution des conflits basés sur les conflits fonciers, partage avec les responsables territoriaux l’expérience tirée des autres pays, tandis que l’ONG belge RCN (Réseau des citoyens network justice et démocratie) s’occupe de la vulgarisation des textes de lois en lien avec les aspects fonciers».
«L’ONU Habitat propose ainsi des solutions en ce qui concerne la gestion des pâturages, des enclaves, des limites territoriales entres terres occupées par différentes ethnies, et associe différents leaders communautaires à la recherche des solutions spécifiques aux problèmes spécifiques de leurs communautés respectives», a souligné Xavier Macky de l’ONG Justice plus, et collaborateur de l’ONU Habitat en Ituri.
«Les responsables religieux contribuent aussi à ressouder les communauté sur la base des concepts de pardon, de réconciliation, d’acceptation mutuelle des uns par les autres, qui fondent le principe de la cohabitation pacifique et le dialogue franc entre les communautés vivant dans un environnement post-conflit», affirme Jean Claude Sady du Conseil des confessions religieuses d’Ituri (CCRI). Ces concepts fondent également la «cohésion sociale pour la relance économique rurale».
Le CCRI est une plate forme d’ONG de l’Ituri, qui ont pour activités principales le monitoring des lieux de détention et le suivi des cas de détentions irrégulières, la sensibilisation et la mobilisation des églises, des ethnies à la conscience collective et à la réconciliation. Il forme aussi des volontaires sur la justice, la réconciliation et sur comment trouver des solutions non judiciaires aux conflits fonciers dans les communautés.
Simon Angoyon, un para-juriste, qui a bénéficié des formations organisées par le CCRI, a indiqué à IPS que désormais, son «travail est de répercuter, dans les communautés les plus lointaines, notamment celles des pygmées, les campagnes de sensibilisation sur les problèmes fonciers ainsi que sur les solutions locales qui peuvent y être apportées».
«Avec l’appui de toutes les ONG impliquées, les autorités locales en charge des titres fonciers, immobiliers et cadastres, s’occupent de la vulgarisation des textes légaux et des résolutions formulées lors des séances de sensibilisation et de formation», souligne Pascal Sindani, un agent de l’administration chargée de la conservation des titres immobiliers de l’Ituri
BUNIA, RD Congo , 26 juil (IPS)